R. Caillié, Préparation du Gdîd (viande séchée), rapport à la viande chez les Maures, 1828

Le 11, je vis tuer un bœuf. Des esclaves lui lièrent les quatre pieds, et l’abattirent, puis lui plantèrent un piquet à travers la peau de la gorge pour l’empêcher de remuer la tête ; un marabout le saigna, et les esclaves le dépouillèrent. La viande, coupée en tranches étroites, fut exposée sur des traverses en bois soutenues par quatre piquets, pour la faire sécher. On fit un entourage d’épines pour en écarter les chiens, et on la couvrit de nattes pour l’empêcher de se corrompre au soleil. Un esclave coucha auprès jusqu’à ce qu’elle fut séchée, et entretint la nuit un petit feu au-dessous pour chasser l’humidité. Cette viande ainsi séchée fut mise dans des sacs en cuir pour être conservée. Lorsqu’elle est bien préparée, elle peut se garder longtemps sans se corrompre et n’a pas de goût désagréable. Les Maures la mangent ordinairement sans autre préparation et sans la faire cuire. Les esclaves qui ont dépouillé le bœuf reçoivent le cou et quelques os; la tête est donnée aux haddads ; le reste des os est distribué en cadeaux.

Les Maures n’invitent jamais leurs amis, ni même leurs parens, à manger ils ont, ils la conservent pour eux. Quelquefois plusieurs se réunissent, fournissent chacun un bœuf qu’ils tuent l’un après l’autre, et mangent la viande en commun, comme je l’ai déjà dit pour les jeunes gens qui tuent des moutons. C’est pour eux une sorte de carnaval, auquel ils donnent un nom qui signifie partie à manger de la viande.