Pindare, Isthmiques, II, XÉNOCRATE D’AGRIGENTE, v. 475 av. n-è

Str. 1. — O Thrasybule, les hommes d’autrefois, qui montaient sur le char des Muses aux réseaux d’or, leur noble lyre à la main, s’empressaient de lancer des hymnes mélodieux à ces enfants beaux d’une ravissante puberté, amie d’Aphrodite au trône brillant.

Ant. 1. — Car, en ce tempe, la Muse n’était ni avide de gain, ni mercenaire; on n’achetait pas la voix de Terpsichore, douce comme le miel; elle n’inscrivait pas sur son front le prix de ses chante suaves. Mais il faut aujourd’hui suivre ce mot d’un Argien, qui s’éloigne peu de la vérité.

Ép. 1. — « L’argent, l’argent fait l’homme, disait-il; j’ai perdu à. la fois mes biens et mes amis.» Vous me comprenez : elle n’est point inconnue la victoire que je chante, remportée dans l’Isthme par les coursiers de Xénocrate, grâce à Poséidon, qui lui envoya la couronne de Sélinum [fenouil sauvage, symbole de Sélinonte] dorien, pour qu’il en ceignit ses cheveux,

Str. 2. — Honorant ainsi un héros au beau char, lumière d’Agrigente. Près de Crissa, le puissant Apollon le vit, et là aussi le combla de gloire; et, dans la superbe Athènes, admis aux fêtes renommées des Érechtides, il n’eut pas à blâmer la main du mortel qui veillait sur son char en pressant les coursiers,

Ant. 2. — La main de Nicomaque portée à propos sur les brides abattues. Celui-ci fut même reconnu par les héraults des jeux, par les Éléens, prêtres de Zeus Kronide; sans doute, pour les avoir reçus en hôte généreux; ils saluèrent d’une voix affectueuse celui que la brillante victoire venait de recevoir dans ses bras,

Ép. 2. — Dans leur propre pays, appelé l’enceinte sacrée de Zeus Olympien ; où les fils d’Ènésidème se couvrirent d’une gloire immortelle. Ce n’est pas d’aujourd’hui, ô Thrasybule, que vos palais connaissent les aimables pompes et le miel des doux hymnes ;

Str. 3. — Car nul écueil, nulle route n’arrête celui qui porte aux hommes illustres les présents que leur doivent les vierges de PHélicon. Puisse-je, en lançant au loin le disque, l’emporter autant que Xénocrate par l’aménité de son caractère ! Les citoyens vénéraient ses mœurs;

Ant. 3. — Il aimait à élever des coursiers selon la coutume des Grecs; il prenait part à tous les banquets des dieux. Autour de sa table hospitalière ne souffla jamais de vent qui fit plier les voiles; mais, en été, il naviguait jusqu’au Phase; en hiver, jusqu’aux rivages du Nil.

Ep. 3. — Que son fils, en dépit de l’envie qui obsède l’âme humaine, n’oublie donc jamais, ni la vertu paternelle, ni ces vers; car, je ne les ai point composés pour qu’ils dorment dans le silence. Chante-les, ô Nicasippe, quand tu seras chez mon hôte chéri.