Alvaro de Cordoba, Arabisation des élites Hispaniques, v. 840

« Mes coreligionnaires aiment à lire les poèmes et les romans des Arabes ; ils étudient les écrits des théologiens et des philosophes musulmans, non pour les réfuter, mais pour se former une diction arabe correcte et élégante. Où trouver aujourd’hui un laïc qui lise les commentaires latins sur les saintes Écritures ? Qui d’entre eux étudie les Évangiles, les Prophètes, les Apôtres ? Hélas ! Tous les jeunes chrétiens qui se font remarquer par leurs talents, ne connaissent que la langue et la littérature arabes ; ils lisent et étudient avec la plus grande ardeur les livres arabes ; ils s’en forment à grands frais d’immenses bibliothèques, et proclament partout que cette littérature est admirable. Parlez leur, au contraire, de livres chrétiens : ils vous répondront avec mépris que ces livres-là sont indignes de leur attention. Quelle douleur ! Les chrétiens ont oublié jusqu’à leur langue, et sur mille d’entre nous vous en trouverez à peine un seul qui sache écrire convenablement une lettre latine à un ami. Mais s’il s’agit d’écrire en arabe, vous trouverez une foule de personnes qui s’expriment dans cette langue avec la plus grande élégance, et vous verrez qu’elles composent des poèmes, préférables, sous le point de vue de l’art, à ceux des Arabes eux-mêmes »