Traités d’alliance puis de protectorat avec les Almâmî du Fûta Jalôn : Ibrâhîm Sôrî b. ‘Abd al-Qadir et Hammad b. Abî Bakr, , 1881-1888

Traité conclu, le 5 juillet 1881, avec l’almamy Ibrahima Sory et l’almamy Hamadou, chefs du Fouta-Djallon

Le Foula-Djallon, qu’une longue et vieille amitié unit à la France, sachant que le peuple français ne cherche pas à étendre ses possessions en Afrique, mais bien des relations amicales destinées à fournir les échanges commerciales ; connaissant depuis longtemps que les Français ne s’immiscent jamais dans les affaires particulières de leurs alliés et qu’ils respectent d’une façon absolue les lois, les mœurs, les coutumes et la religion des autres, a signé avec le gouvernement de la République française le traité suivant :

L’almamy Ibrahima Sory, fils de l’almamy Abdoul Gadirou, et l’almamy Hamadou, fils de l’Almamy Boubakar, chefs du Fouta-Djallon, le docteur Jean Bayol, médecin de 1ère classe de la marine, chevalier de la Légion d’honneur, représentant le gouvernement de la République française, et M. Ernest Noirot, attaché à la mission du docteur Bayol, ont signé d’un commun accord le traité suivant :

Art. 1. —Le Fouta-Djallon déclare être l’allié intime des Français auxquels l’unit déjà une vieille et loyale amitié. Les almamys, chefs de pays, placent le Fouta-Djallon sous le protectorat de la France.

Art. 2. — Les almamys, chefs du Fouta-Djallon, déclarent autoriser les Français, à l’exclusion des autres nations, à voyager librement et à faire du commerce sur le territoire qui lui est soumis.

Art. 3. — Ils permettent aux Français, à l’exclusion des autres nations, d’établir des maisons de commerce dans toutes les parties du Fouta-Djallon.

Art. 4. — Les Français qui viendront s’établir dans le Fouta-Djallon seront protégés par les almamys et auront à respecter les lois du pays.

Art. 5. — Les marchandises servant aux échanges commerciales ne seront passibles d’aucun droit à la rentrée ; les produits recueillis dans le pays et emportés par les Français ne payeront également aucun droit.

Art. 6. — Les négociants français seront tenus de payer un droit fixe de 1,000 fr. (valeur payée en marchandises) à l’almamy pour chaque maison de commerce et un droit de 500 fr. en marchandises au chef du pays dans lequel ils établiront leurs factoreries, les droits payés, le commerce sera entièrement libre.

Art. 7. — Les Français auront à prévenir l’almamy des points où ils voudront établir des comptoirs.

Art. 8. — Les négociants français sont tenus de payer un droit pour l’achat du terrain où ils voudront construire leurs maisons de commerce. La somme à payer sera réglée à l’amiable entre le chef et les négociants français.

Art. 9. — Les almamys s’engagent à assurer la parfaite exécution de ce traité.

Art. 10.— De son côté, le gouvernement français s’engage, dès que ce traité aura été révolu de la signature du chef de l’Elat (décret du 31 décembre 1881), à envoyer un cadeau important aux deux almamys qui se succèdent alternativement au pouvoir en vertu des lois du Fouta-Djallon.

Art. 11. —En outre, il sera payé chaque année une rente de 3,000fr. à Talmamy Sory, (ils de l’almamy Abdoul-Gadirou et une rente de 3,000 fr. à l’almamy Hamadou, fils de l’almamy Boubakar. Ces rentes seront payées par semestre au poste de Boké, le 1er janvier et le 1er juillet.

Art. 12. — Les deux chefs du diwal de Timbi et du diwal de Lobé, que leur situation aux frontières du Fouta-Djallon met à même de rendre les plus grands services aux caravanes qui vont aux comptoirs français et aux Français qui vont dans le Fouta, recevront chacun une rente de 1,500 fr. par an, payable par moitié à Boké comme les précédentes.

Le gouvernement français, désireux d’être utile aux Peulhs qui vont porter leurs produits aux portes des rivières du Sud et aux comptoirs du Haut-Sénégal, les autorise à s’adresser au médecin du poste français pour se faire soigner en cas de maladie. Ce traité entrera en vigueur dès qu’il aura été revêtu de la signature du chef des Français. Les rentes à payer par la France compteront du jour de rentrée de l’ambassade française à Douhol-Fella, le 1er juillet 1881 .

Douhol-Fella, 5 juillet 1881. Le chef de la Mission du Niger, D’ Bayol. Noirot.

Alpha Oumarou, Âhmadou Ba, almamy Ibrahima Sory, Hamadou, Ladou,Madi-Âiliou, Âlpha Hamadou Palé, almamy Hamadou, Oumarou, fils de l’almamy Hamadou.

Clause additionnelle au traité du 5 juillet 1881

Le gouvernement français, reconnaissant envers la famille de l’almamy Omar pour la grande sympathie qu’elle n’a cessé de témoigner à la France et la généreuse hospitalité qu’elle a toujours offerte à ses envoyés, confiant dans la promesse formelle de l’almamy Sory, garantissant la pleine exécution du traité passé le 5 juillet 1881 à Douhol-Fella, entre le Fouta-Djallon et lui, s’engage sur le rapport de son représentant, le docteur Bayol :

1* A payer chaque année à Boké et par moitié une rente de 2,000 fr. à l’almamy Sory;

2* Une rente de 1,000 fr. à Hamadou-Paté, fils de l’almamy Omar.

Fait à Douhol-Fella, le 5 juin 1881. Le chef de la mission, D’ Bayol. E. Noirot. Almamy Ibrahima Sory, Hamadou, Ladou, Madi Alliou, Alpha Hamadou-Paté, fils de l’almamy Oumarou. (Signatures des interprètes).

 Convention supplémentaire conclue, le 30 mars 1888, avec le Fouta-Djallon

Au nom de la République française,

Entre nous, J. Gallieni, lieutenant-colonel d’infanterie de marine, commandant supérieur du Soudan français, représenté par Jules Plat, sous-lieutenant d’infanterie de marine, chef de la mission du Fouta-Djallon, et le docteur Pierre Fras, médecin de deuxième classe de la marine, détaché de la mission, d’une part ;

 

Et Alfa Ibrahima Sopy, émir-el-Moulmenin du Fouta-Djallon, commandant les chefs de tous les pays appelés diwals, du Fouta-Djallon, qui sont : Timbo, Labé, Kolen, Roïn, Kolladé, Akolemadji, Timbi-Touni, Timbi-Madinah, Massi, Baïlo, Fodé-Hadji et autres diwals de moindre importance, d’autre part, a été conclu ce qui suit :

Art. 1.— L’Almamy Ibrahima Sôry, émir-el-Moulmenin, se met et met l’Almamy Hamadou et leurs successeurs, désignés suivant la coutume du pays, sont le protectorat exclusif de la France.

Art. 2. — Le gouvernement de la République française prend l’engagement de ne s’immiscer en rien dans les affaires intérieures du pays et de respecter les usages existants.

Art. 3. — Le commerce français est entièrement libre et exempt de toute redevance dans toute retendue du Fouta-Djallon. Il a droit à la protection des chefs du pays.

Il en sera de même pour les commerçants du Fouta-Djallon dans les pays protégés par la France ou lui appartenant.

Les rentes promises aux Almamys sont supprimées.

Art. 4. — Tout acte, convention ou stipulation contraires à la présente convention sont et demeurent abrogés.

Art. 5. — La présente convention sera exécutoire du jour de sa ratification par le gouvernement de la République française.

Fait signé à Fougoumbâ, en triple expédition, le 30 mars 1888. Le sous-lieutenant d’infanterie de marine chef de mission du Fouta-Djallon, J. Plat. Le médecin de 1ère classe de la marine détaché à la mission, Dr P. Fras. L’interprète de 2ème classe, traducteur d’arabe, Amadi Gori.

Signature de :

Almamy Ibrahima ; avec : Thiero Ibrahima Sori Timbi ; Alfa M’Abdoulaye (grand marabout) ; Mamadou Saïdou (conseiller intime); Almamy Hamadou avec Oumarou (son fils aîné). Gloire à Dieu : Alfa Mamadou Paie, fils d’ Almamy Oumar, fils d’ Almamy Abdoul Radour.