M. Park, Le Lion du Niger, 1799

Peu de moments après, comme nous traversions une grande plaine découverte où étaient quelques buissons épars, mon guide, qui était à quelques pas devant moi, me dit en langage foulah quelques mots que je ne compris pas. Je lui demandai en mandingue ce qu’il voulait dit : Wara billi billi (un très grand lion ), me répondit-il ; et il me faisait signe de m’enfuir. Mais mon cheval était trop fatigué ; ainsi nous marchâmes lentement pour dépasser le buisson où était caché l’animal. Cependant, n’apercevant rien moi-même, je croyais que mon guide s’était trompé, lorsque tout à coup le Foulah mit la main à sa bouche en s’écriant : Soubah ou Allahi (« Dieu nous préserve »). Et à ma grande surprise j’aperçus alors, à une petite distance du buisson, un grand lion rouge, qui avait la tête couchée entre les deux pattes de devant. Je m’attendais qu’il allait sur-le-champ s’élancer sur moi, et j’ôtai machinalement mes pieds des étriers, afin qu’en cas d’attaque mon cheval devînt plutôt que moi sa victime. Mais l’animal, probablement, n’était pas fort affamé, car il nous laissa passer tranquillement, quoique nous fussions bien à sa portée. Mes yeux étaient tellement fixés sur ce roi des animaux qu’il me fut impossible de les en détourner, jusqu’à ce que nous fussions à une grande distance.