Bar Hebraeus, Ecclesiastique, III, 111-124, Passages traitant de Marûta de Tikrit, v. 1250 n-è

A cette époque vivait Marouta moine célèbre en vertus. Il était du pays de Beit Nuhadrê, du village nommé Sourzaq. Il demeura dans le monastère de Nardas et y fut moine et prêtre. De là il alla à Callinice et passa. vingt ans dans le monastère de Mar Zaki ; il s’y instruisit abondamment dans les divins Livres.

De là il alla demeurer dans la montagne d’Édesse et y apprit l’art d’écrire, puis il vint ait monastère de Mar Mattaï et y établit des règles et des lois excellentes.

Lorsque les empires commencèrent à être troublés et que nos monastères qui étaient près de la cour royale des Perses furent détruits à la mort de Gabriel, médecin royal il alla demeurer à ‘Aqoulâ ou Koufah dans les cellules de Raban Èabour. Mar Samuel, métropolite de l’Orient, chercha à l’ordonner à Tagrit, et il n’accepta pas.

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La même année, à. savoir l’an 940 (629), lorsque la paix fut confirmée, le patriarche Athanase, surnommé le chamelier, envoya son disciple Jean le diacre, du village de Beth ‘Èlaîâ, près du roi de Perse pour ses affaires ‘particulières.

Jean, à son retour, entra au monastère de Mar Mattaï sous le gouvernement de Christophore, métropolite du monastère, et d’Âdaï, supérieur. Comme il y trouva des moines purs et saints, il leur persuada de s’unir au patriarche et aux Occidentaux. Tous lui obéirent et le métropolitain Mar Christophore lui-même réunit les évêques voisins Georges de Siggar (Singara), Daniel de Beit Nuhadre, Grégoire de Beit Raman, et Jezdapneh de Sarzoul, et tous les cinq allèrent avec Jean près du patriarche. Ils emmenèrent avec eux trois hommes illustres du même monastère dignes de la vocation (épiscopale) Marouta dont nous avons parlé plus haut, Âîtalahâ et Âhâ. Quand ils arrivèrent près dit patriarche, ils firent union avec lui et lui demandèrent de consacrer des évêques pour l’Orient ;mais le patriarche ne le voulut pas, à cause d’un canon porté au concile de Nicée « qu’après la mort du grand métropolite de l’Orient, les évêques orientaux se choisiraient un chef et un père commun ». Aussi ces évêques choisirent Marouta, le consacrèrent grand métropolitain à Tagrit et lui donnèrent pouvoir sur toute l’Église orthodoxe d’Orient et pour ordonner un métropolite au monastère de Mar Mattaï. Ce métropolite du monastère, ordonné par le maphrien de Tagrit, aurait son siège à la droite du maphrien au-dessus de tous les évêques, mais en dessous dit maphrien. Là encore Âîtalahâ fut consacré évêque de Goumal qui est l’une des grandes villes du pays de Marge ait. nord-est de laquelle est le mont de Èlfef, et Âhâ (évêque) de Pir-Shabur

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Alors le maphrien retourna ait monastère de Mar Mattai, le métropolite de ce monastère et les six évêques, ils réunirent les autres évêques qu’ilstrouvèrent et mirent douze diocèses sous le pouvoir du maphrien de Tagrit

i” Du Beit ‘ArbaU; 2° de Siggar; 3° de Ma^altîâ (ou Ma’ alfa); 4° d’Arzoun 5″ de Cornai; 6° de Beit Ramman qui est Beit Ouâztq; 7° de Karmeh; 8° de Gozarta de Qardou; 9″ de Beit Nouhadrê; 10° de Pîr sabour; 11° de Sarzoul

12° des Arabes chrétiens qui sont les Taglibites et demeurent sous les tentes. Le métropolite du monastère n’eut que le seul diocèse de Ninive. Après avoir réglé ces affaires, Marouta alla à Tagrit et l’orna et la décora des monastères et des églises qu’il y construisit. A son époque le royaume des Arabes subjugua le pays, mais, par sa prudente direction, il ouvrit la citadelle de Tagrit, et personne n’y fut molesté. A cette époque les orthodoxes se multiplièrent en Perse et une nombreuse troupe d’Èdesséniens qui avaient été emmenés en captivité par les Perses’2 allèrent demeurer dans le Slgistàn et dans le Korasàn. Ils firent demander des évêques au maphrien Marouta et il leur en envoya trois, un pour le Sîgîstân, l’autre pour Hérat) et le troisième pour l’Adourbigan. Ainsi la profession orthodoxe se développa et se répandit par tout l’Orient.

Et Marouta, après avoir rempli son office durant vingt ans, mourut le samedi deuxième jour du mois de Ior (mai) de l’an 960 des Grecs (= 649) et il fut enseveli dans la grande église qu’il avait bâtie lui-même dans la citadelle.

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L’année de la mort de Marouta mourut aussi le patriarche Jean qui avait succédé à Athanase son maître Théodore fut patriarche après lui*. Celui-ci désira ordonner le maphrien pour Tagrit comme le patriarche d’Alexandrie ordonnait le métropolite pour les Abyssins; il écrivit aux f>vêques et aux chefs de rOdent et se les concilia. Les Orientaux convinrent après qu’il eut fait un accord avec eux, grâce aux lettres de recommandation («saçrxTMtxï;) et aux témoignages des évêques occidentaux qu’à la mort du patriarche le maphrien imposerait les mains à celui qu’on élèverait (a cette charge), et que si le patriarche ne pouvait exister sans le maphrien, le maphrien ne le pourrait pas non plus sans le patriarche. Alors les habitants de Tagrit choisirent Denha, disciple de Mar Marouta, et le conduisirent au patriarche Théodore qui le consacra maphrien de Tagrit et de tout l’Orient, après quoi il vint occuper son siège. Le maphrien Denha, après avoir rempli son office pastoral durant dix ans, mourut le trois du second Teschri (novembre 660) et fut enseveli avec Mar Marouta dans l’église de la citadelle.