Jean Froissart, III, 39, 1386 : Grenade soutient Jean de Castille contre Jean de Portugal et le Duc de Lancastre (qui revendique la couronne de Castille pour sa femme Constance), v. 1430 n-è

Si les nouvelles etoient grandes dans ces royaumes et pays voisins de Castille, ainsi étoient-elles en lointaines villes et marches.

Le roi de Grenade (Muhammad b. Yûsuf b. Ismâ’il b. Faraj) quoique il ne soit pas de notre loi, se doutoit grandement de l’armée du duc de Lancastre et du roi de Portugal et des alliances que ils dévoient faire et avoir ensemble que, au temps à venir, les flamèches qui de ce feu pourroient naître ne retournassent sur lui et sur son royaume : et eut conseil le dit roi de Grenade, pour le meilleur et le plus sûr qu’il auroit certains traités et accords au roi Jean de Castille, car ce roi doutoit trop plus les Anglois et les Portingalois que il ne faisoit les Espagnols.

Si envoya, sur forme de paix et d’amour, grands messages ambassadeurs devers le roi de Castille, tels que le Postel de Gilbatas (Gibraltar) et Mansion Dalbatas et autres; et vinrent ceux-ci sauf-conduit au Valdolit parler au roi de Castille de par le roi de Grenade. On les vit et ouït volontiers parler, puisque ils ne vouloient que tout bien et affection, confort ou aide au roi de Castille de parle roi de Grenade, pour tant que leurs deux royaumes marchissent ensemble (sont frontaliers).

Le roi de Castille, avant que il leur fît nulle réponse, eut conseil quelle chose en étoit bonne à faire et ne vouloit rien passer ni accorder sans le su et avis des barons de France qui là étoient: lesquels chevaliers de France, considéré bien toutes les besognes de Castille, conseillèrent au roi que ces ambassadeur de Grenade fussent répondus sur la forme que je vous dirai : Ce fut que le roi de Grenade tînt les frontières de son pays closes et les ports de mer, et n’eut aux Portingalois ni Anglois nulles alliances ni nul n’en recueillât en son pays.

Ces ambassadeurs de Grenade qui étoient fort, et bien le montroient par lettres patentes de leur roi et de son conseil, de accorder et apporter outre tout ce que ils feroient pour le meilleur, sur la forme pourquoi ils étoient venus en Castille, l’accordèrent et scellèrent, et puis, tout ce fait, ils retournèrent arrière en Grenade.