Jean de Nikiu, 112 : Bataille d’Heliopolis et chute de Babylon-Fustat, v. 700 n-è

Or il régnait, à cause du mécontentement manifesté par l’empereur, une grande hostilité entre Théodore le général en chef et les gouverneurs. Théodose et Anastase, à cheval, se rendirent ensemble à Aoun avec un grand nombre de fantassins, pour livrer bataille à ‘Amr b. Al-‘Âs. Les musulmans ne connaissaient pas auparavant la ville de Misr. Laissant de côté les villes fortifiées, ils s’étaient dirigés vers une localité nommée Tendoûnyas[329] et s’étaient embarqués sur le fleuve. ‘Amr faisait preuve, dans la prise de Misr, d’une grande énergie et d’une perspicacité extraordinaire. Il était inquiet d’être séparé de l’armée musulmane qui, divisée en deux corps, se dirigeait, sur la rive orientale du fleuve, vers une ville, située sur une hauteur, appelée ‘Aïn-Shams ou ‘Awun. ‘Amr, fils d’Al-‘Âs, écrivit à ‘Umar b. Al-Khattâb, qui était en Palestine, une lettre dans laquelle il lui disait :
« Si tu n’envoies pas des renforts musulmans, je ne pourrai pas me rendre maître de Misr. »
‘Umar lui envoya 4000 guerriers musulmans, commandés par un général nommé Walwâryâ ?, qui était de race barbare. Alors il divisa ces troupes en 3 corps : il plaça l’un d’eux près de Tendûnyas, un autre au nord de Babylone d’Egypte, et il prit position lui-même, avec le troisième corps, près de la ville de ‘Awn. Il donna aux 2 autres corps l’ordre suivant :
« Faites attention, lorsque l’armée romaine sortira pour nous attaquer, tombez sur elle par derrière, tandis que nous serons devant elle ; nous l’entourerons et l’exterminerons. »
Lorsque l’armée romaine, ignorante, sortit de la forteresse pour attaquer les musulmans, ceux-ci tombèrent sur ses derrières, comme ils l’avaient concerté, et une bataille terrible s’engagea. Ecrasées par les musulmans, les troupes romaines s’enfuirent sur des bateaux. L’armée musulmane occupa la ville de Tendûnyâs, dont la garnison avait péri et dont il n’était resté que 300 hommes qui s’étaient retirés dans la forteresse et avaient fermé les portes ; puis, terrifiés par le grand massacre qui venait d’avoir lieu, ils s’enfuirent, et, pleins de découragement et de tristesse, ils se rendirent, par bateaux, à Nikiu.

En apprenant ces événements, Domentianus, de la ville de Faiyoûm, partit pendant la nuit, sans avertir les gens d’Abôït qu’il allait abandonner la ville aux musulmans, et se rendit par bateau, à Nikiu. Les musulmans, informés de la fuite de Domentianus, accoururent allègrement, s’emparèrent du canton de Faiyûm et d’Abôït et y firent un grand massacre.