IBN HAWQAL : Sûrat-al-Ard : v. 950 n-è : Région de Transoxiane

Géographie et introduction :

La Transoxiane est bornée :

à l’E par le Famir, le Rasht et les régions de l’Hindustan qui sur une ligne droite, confinent au Khuttal ;

à l’W, par les territoires des Ghuzz et des Kharlûkh, s’étendent en courbe depuis Taraz jusqu’à Barab, Sut-Qand, le Sughd, Samar-Qand, le pays de Bukhara jusqu’au Khârizm et au Lac Aral ;

au N, par les Turk Kharlûkh, en ligne droite depuis la partie la plus lointaine du Firghana jusqu’à Taraz ;

et au S par le Jayhûn, depuis le Badakhshan jusqu’au Lac Aral en ligne droite. Le Kharizm […fait] partie de la Transoxiane […] la cité de Khârizm, située de outre le fleuve est plus proche des cités de Transoxiane que de celles du Khurâsân.

La Transoxiane est par sa position une des régions les plus fertiles de la terre, la plus plaisante, la plus productrice de récoltes. Ses habitants sont animés du désir de pratiquer le bien et de satisfaire ceux qui les y inviytent, avec le souci d’un idéal élevé, un état de paix communicatif, le besoin de donner ce qu’ils possèdent. Ce sont des êtres vigoureux et énergiques, forts et courageux, des héros fiers de leur nombre, de leur équipement, de leur armement et d eleur bétail. En somme, ils allient bravoure et amour des armes et culte de la science légale et de la piété.

[…]

Produits et commerce :

Lorsque les champs et ls récoltes y ont à souffrir du froid ou de la châleur, d’une calamité quelconque, on trouve toujours dans l’étendue de leur territoire des réserves pour pourvoir aux nécessités sans recourir aux importations étrangères. Nul endroit dans toutes la Transoxiane n’est dépourvu de cités et de bourgades, de champs irrigués ou arrosés par les pluies, de terres de pacage pour les bête.

On se procure sur place tout ce qui est nécessaire à l’homme en une telle abondance qu’il est possible d’en faire profiter les voisins […] les eaux y sont les plus douces qu’on puisse imaginer, les plus fraîches et les plus légères, et l’on en voit partout, dans les montagnes, les plaines, les cités… elles ont la faculté de geler dans toutes les provinces tandis que toutes les terres sont enneigées.

[…] On trouve chez les Kharlûkh et les Ghûzz chameaux, mulets, ânes et moutons bien au-delà des besoins. On observe sur place un élevage très fructueux des ovins et bovins.

[…] Dans l’industrie du vêtement, on produit surabondamment des tissus de laine, de soie, des cotonnades de prix et de la toile.

Il y a dans le pays des gisements de fer, dont l’exploitation excède la demande du commerce ; les mines d’or, d’argent, de mercure y sont d’une richesse inégalable dans aucune mine des pays d’Islam.  […] Je ne connais nulle province des Pays d’Islâm où l’on trouve le sel ammoniac (Nushâdir) hors de Transoxiane […] on y manufacture du papier (Khâghd) en grande quantité de qualité incomparable.

Lorsqu’on traverse les district de Sughd, Ushrusana, Firghana et de Shâsh, on voit des fruits dans une proportion qui n’est égalée nulle part ailleurs, on en nourrit même les bestiaux.

On recrute les esclaves parmi les Turcs des pourtours de la province, les habitants en ont plus qu’ils n’en désirent et les exportent dans d’autres contrées, ce sont les meilleurs esclaves, les plus agiles, beaux… et coûteux de tout le Mashriq.

Le Misk  du Tibet et du pays Khir-Khiz passe par la Transoxiane vers le monde entier, supérieur en prix et en qualité à toutes autres variétés.

La région entre Saghanyân et Wash-Jird produit du Za‘frân, des fourrures de zibeline, de renard… qu’on exporte en tous lieux, un rare peuplier blanc (Khadank), de la corne (Khutuw), des faucons à la robe Qirtasî, Dirhâmî ou Mugharnak et bien d’autres curiosité que les princes se disputent pour satisfaire leurs goûts ou se faire des cadeaux.

Des habitants :

En matière de générosité, on croirait que dans la majeure partie du Khurâsân, les habitants constituent une seule famille, qui occupe la même demeure. Un homme pénètre chez un autre avec la sensation qu’il entre chez lui, et le Mudâyif […] lui ouvre sans récriminer et se donne une peine infinie pour lui être utile, même s’il ne le connaissait pas auparavant et sans en attendre de profit, tellement il croit devoir dispenser généreusement ses richesses. Tout homme ets soucieux de faire le bien en proportion de sa fortune et mène une vie large pour sa personne comme pour l’étranger demandant hospitalité. On constate ce fait qu’aucun propriétaire foncier dont ses revenus confèrent une certaine indépendance n’a d’autre souci que d’acquérir un vaste pavillon et un logement spacieux pour ses hôtes […] Aussi les habitants d’une même cité se disputent-ils l’honneur de recevoir un voyageur. [[…] C’est un véritable objet de surenchère entre eux ce qui amène la disparition des fortunes et la ruine des propriétés […] j’ai moi-même remarqué dans le Sughd les ruines d’un logis, dont la porte était fermée par des poutres, mais ne semblait nullement avoir été closes pendant un siècle et qu’aucun passant n’avait été empêché de s’y installer : il arrivait que ce logement fut occupé à l’improviste par 100, 200 personnes ou plus, avec bêtes et valets ; ils trouvaient du fourrage pour leurs animaux, de la nourriture pour eux même et des […] couvertures[…] Un homme était désigné pour […] avoir sous la main en permanence tout ce qui était indispensable, si bien qu’il était inutile de prévoir le renouvellement en cas inopinée de voyageurs. Ainsi le propriétaire témoignait d’une telle gentillesse, d’un tel accueil empressé, d’un tel zèle envers ses hôtes que nul n’ignorait le plaisir  […] et la joie de se montrer hospitalier en toute circonstance.

Ajoutons que la majorité des Ahl-Al-Tarwa, à bien peu d’exception, dans les pays d’Islâm, ne font de dépenses que pour leurs amusements personnels ou des divertissements qui déplaisent à Dieu et se font concurrence dans des buts blâmables. Au contraire, on constate que les habitants de la Transoxiane consacrent leur fortune à édifier des Ribâtât, à réparer les routes, à constituer des Awqâf  pour la poursuite du Jihâd ou pour des œuvres de bienfaisance, à construire des ponts de pierre […]. Il n’y a pas de cité, d’aiguade fréquentée, de bourgade peuplée qui ne soit pourvue de Ribâtât de dimension supérieure au nombre des voyageurs qui y descendent. On m’a assuré qu’on comptait en Transoxiane plus de 10 000 Ribâtât et dans nombre d’entre eux, le voyageur trouve du fourrage pour ses bêtes et de la nourriture pour lui-même. J’ai eu rarement l’occasion de passer à Samarqand dans un Khân, ou à un coin de rue, ou sur une place ou au milieu d’une foule réunie près d’un mur sans qu’il y ait là un Musabbal d’approvisionnement en eau glacée. Un bon informateur m’a rapporté qu’à Samarqand, dans la cité et sur les murs des maisons, dans tout l’espace intra-muros, il se trouvaient plus de 2 000 Musabbal de distribution d’eau glacée, entretenus par des Awqâf, soit des Siqayât construites de manière indépendantes, soit des Hibâb (tuyaux) de cuivre fichés dans les murs, ou de cruches en terre fixés dans les murs.

[…] Au sein des pays d’Islâm, il n’y a nulle région plus utile au Jihâd, en raison de ce que toutes les frontières de la Transoxiane sont très proches des territoires ennemis. La ligne du Khârizm à Isbijâb constitue une Marche contre les Turk Ghuzz, d’Isbijâb au Firghana, elle fait face aux Kharlûkh, puis les frontières de la Transoxiane côtoirent les régions du Shiqinân et de l’Hindustan, le pays des Turk d’au-delà du Khuttal et du Firghâna (Uyghur). Les musulmans contiennent ces T et les peuplades qui les voisinent, et il est bien connu que pour les musulmans il n’y a pas de Territoire de Guerre ou l’ennemi soit aussi vaillant que les T ! […] aussi les hommes de cette province s’attendent-ils, soir et matin, à une mobilisation générale.

[…]

Selon certain récits historiques, Mu‘tâsim écrivit à ‘Abd Allah b. Tâhir pour connaître le nombre des hommes susceptibles d’être levés dans le Khurâsân et en Transoxiane ; ce dernier transmit la Lettre du Lieutenant à Nûh b. Asad b. Samân qui lui fit savoir qu’on comptait 300 000 bourgades et si chacune devait fournir un cavalier et un fantassion, on ne s’apercevrait pas de leur absence. […]

Le Shâsh et le Firghâna possèderaient des ressources comme on n’en voit peu […] un simple sujet disposerait de 100 à 500 bêtes de sommes, sans qu’il s’agisse d’un officier gouvernemental. Les habitants de ces régions, malgré leur éloignement, sont les premiers à performer le Hajj, en emportant des richesses considérables, se faisant suivre d’un train de valets et de chameaux de race, l’île aux arabes ne voit nulle autre communauté aussi forte entrer dans ses terres. Cependant, ils sont les plus soumis à leurs notables, les plus attentifs à servir leurs Commandeurs et à s’entraider. Ces faits ont incités les Lieutenants Abbasides de faire venir des soldats de Transoxiane pour constituer leur Garde Personnelle de Turks, à cause de leur supériorité sur les autres groupes de l’armée, en effet, les troupes de cette région se distinguaient par leur énergie, leur témérité, leur bravoure, leur intrépidité, de leur aptitude à la vie militaire, de la qualité de leur obéissance, de leur prestige sous l’uniforme […] ; et leurs Dihqân devinrent officiers. […]

Le Khurâsân des Samanides :

Les princes de ce territoire et de tout le Khurâsân appartiennent à la famille de Samân, descendants de Bahrâm Jubîn qui s’était rendu fameux parmi les Perse par son énergie et sa force.

[… régularité des levées d’impôt, du traitement]

Sous le règne d’Abû Sâlih Mansûr b. Nûh et de son père, chaque administrateur, chaque fonctionnaire, […] ne furent pas payés autrement que sur le revenu du kharâj, en respectant les convenances et en faisant attention à la justice envers les sujets, à l’équité envers la masse, tout en restant exigeant vis-à-vis des biens des notables.

Grace à ces procédés, chaque district est plein de Qâdî, d’administrateurs capables de contrôleurs fiscal, de fonctionnaires politiques dont les traitements s’équivalent, et dont les obligations sont presque uniformes. C’est ainsi que le traitement d’un Qâdî est le même que celui d’un Mudîr al-Barîd, du fonctionnaire chargé de la recette et du contrôleur fiscal ou du préfet de police. J’ai observé que chacun d’eux est payé selon l’étendue de chaque canton, et l’importance de chaque circonscription, et les salaires de l’un n’augmentent ni ne diminuent par rapport à ceux de l’autre.  […]

[…

traitement des haut-fonctionnaires de chaque ‘amala, le 20è :

-Samarqand : 750 dr.

-Ushrusana : 600 dr.

-Khujanda : 300 dr.

-Jurjanya : 600

-Ilaq : 300 dr

-Shâsh : 700 dr.

-Firghâna : 1000 dr.

-Kish : 300 dr.

-Khârizm : 1000 dr.

-Amul-Fibrar : 400 dr.

-Zamm : 300 dr.

-Saghanyân : 300 dr.

-Tirmidh : 300 dr.

…]

 

[…]

Toutes les armées sont composées de soldats appartenant à des groupements composites, recrutés de façon hétéroclite dans diverses régions et contrées, ainsi qu’aux confins de l’empire. Lorsqu’une débandade a succédé à une défaite,  […] il est extrêmement délicat d’opérer un regroupement, on n’y arrive qu’après les pires difficultés en usant excessivement de gratifications et de menaces.

A l’inverse, les troupes de ces princes sont composés d’esclaves Turcs, achetés au frais du trésor, dont les ceinture sont semblables. On y compte également des hommes libres, de nobles propriétaires terriens, dont le domicile est connu, ainsi que leur patrie, famille te voisinage… Lorsqu’une partie a été tuée, on peut la remplacer parmi le grand nombre de ses congénères […]. Ces troupes n’ont aucune raison de s’éparpiller ou d’émigrer dans d’autres pays, comme agissent les soudards des autres armées ou les gardes de ville. Ces soldats profitent en effet d’une excellent organisation, ne serait-ce que par une politique qui veille sur leurs intérêts en cas d’absence, si bien que l’on prend soin également de celui qui est loin ou proche. Un action d’éclat n’est pas perdue et les actes de bravoures sont récompensés sans tarder, de même le coupable d’une faute ou d’un crime est-il puni et réprimandé. Si un parent ou un proche de la personne lésée a droit au Talion, on s’en remet aux Lois Divines. S’il s’agit d’un étranger pour lequel une poursuite judiciaire est nécessaire, on ne s’écarte pas des punitions légales ordonnées par Dieu.

Lorsqu’une discipline raisonnée est ainsi mise en pratique, l’intérêt général reste en ordre, c’est alors un concert de louange qui fait grandir l’influence, et on peut exiger un service ponctuel, et il est aisé de se faire obéir.

[…]

Dans l’ensemble des pays d’Islam, il n’y a pas de prince comme eux, rendus célèbre sur un trône transmi de père en fils depuis les Perses, car ils appartiennent alors à la plus haute noblesse. C’est ainsi qu’Abû Salih Mansur est Ibn Nûh b. Nâçr b. Ahmad b. Abû Ibrâhîm Ismâ‘îl, ce prince considérable, et puissant, dont la conduite fut exemplaire, les qualités inombrables, les vertus et les gestes de noble inspîration, les faits et actions extraordinaires et stupéfiants, il fut Ibn Ahmad b. Asad b. Saman-Khuda b. Jaythamân b. Taghmath b. Nusard b. Bahrâm Shubîn b. Bahrâm Janash. C’est le plus équitable des princes de son temps, dont la conduite est remarquable malgré une faible constitution et la débilité de son corps ; le plus perspicace dans sa vision, un esprit hors pair pour la solution des affaires, le plus sincère dans ses conceptions, le plus attaché à l’amour de Dieu dans ses intentions, le plus préoccupé du jour et du lendemain, ainsi, ses actes ont des conséquences heureuses et son règne est plein de bénédictions.

 

Sughd de Samarqand, du Bûkhara au Shâsh :

 

Je n’ai jamais vu ni entendu vanter, dans la Terre de l’Islâm, pour sa beauté, une banlieue de cité comme celle de Bukhâra. Du haut de son Kuhandiz, que qq côté que tombe le regard, il n’aperçoit que de la verdure, qui se relie au bleu du ciel, comme si le firmament était un couvercle azuré déposé sur un vert tapis. Sur l’ensemble se détachent des palais brillants, tels des […] astres d’éther par leur blancheur et leur lumière au milieu des terres labourées, alignées au cordeau, et qui parraissent polies comme des miroirs par une technique impeccable. Aucune contrée […] ne présente par ses champs disposés une plus nette disposition à la fertilité, avec d’immenses étendues de paysages riants, qui s’étalent au milieu de vastes terrains […].

 

 

On sait que les plus beaux sites du monde sont le Sughd de Samarqand, l’esturaire Al-‘Ubulla et la Ghûta de Dimashq […mais] le paysage le plus plaisant est celui qui remplit le regard, et bouche l’horizon, offrant ainsi le maximum d’agrégent […et] on ne saurait comparer un paysage dans lequel un emplacement retiré ne permet pas de voir aussi loin qu’un endroit qui n’est pas obstrué, à un site où le regard bénéficie d’un champ visuel étendu et d’une netteté de vue, ainsi que du plaisir que l’âme en recueille !

Dans le Sughd de Samarqand, nous ne connaissons aucun point, aucune localité, où le spectateur monté en haut du Kuhandiz ne voit autre chose, aussi loin que porte son regard que de smontagnes dépourvues d’arbres ou des plaines grisatres, car leurs terres cultivées sont bordée d’arbres et pleines de verdure !

Selon Abû ‘Uthmân, la couleur terne des champs au milieu d’une vaste végétation offre un tableau charmant. Mais lorsque la terre grise se disperse sur le sol sans l’alignement visible de la végétation, elle perd de sa délicieuse splendeur, de son charme brillant, de sa douceur joyeuse, et prive le spectateur de tout agrément.

De ce point de vue, la Transoxiane possède une chance incomensurable et est éminemment favorisée. Bukhâra, ses bourgades et ses terrains cultivés sont environnés par une muraille d’un diamètre de 12 frs. Et cet ensemble est florissant, brillant et verdoyant.

[…]

Le long du fleuve du Sughd, à droite comme à gauche, s’étalent des champs cultivés jusqu’aux monts de Buttam, la verdure est ininterrompue, et cet aspect enchanteur ne cesse pas sur un parcours d’une semaine ; les vergers se touchent, avec une végétation verdoyante, des jardins, des pelouses, sillonnées de cours d’eau coulant en permanence ; des bassins sont creusés au milieu des jardins et des pelouses et ainsi arbres et fraîches cultures s’étendent sur les deux rives du fleuve.

Au-delà ce sont des champs cultiuvés de part et d’autre, bordés de prairies où paissent les bestiaux, d’où émergent palais, kuhadinz de chaques ville et bourg, brillant au sein de la verdure ; on croirait un brocard vert, rayé par l’eau des ruisseaux et ponctué par l’alignement des palais.

C’est le plus magnifique des pays de Dieu, où les arbres sont les plus beaux, et où poussent à l’envi des fruits excellents. Les demeures sont encadrées de vergers de bassins, d’eaux courantes, si bien qu’aucune ruelle, aucun quartier, aucune lcoalité, aucune maison, aucune agglomération, ne manque d’un ruisseau d’eau courante ou de bassins d’eau calme.

 

Au Firghâna, au Shâsh, à Ushrusana et dans tout le reste de la Transoxiane, ce ne sont que fourrés d’arbres, fruits abondants, jardins continus, tels qu’on ne les trouve nulle part ailleurs […].

 

Tian-Shan :

Dans la chaîne de montagnes qui s’étend du Firghâna au pays des Turks, on récolte des raisins, des noix, des pommes, et bien d’autres fruits, qui voisinent avec des roses, des violettes, et toutes sortes de fleurs odoriférantes, dont la cueillette est permise à tous, car elles n’ont pas de propriétaires et personne ne l’interdit.

Dans les montagnes de la Transoxiane, on trouve des pistaches comme on n’en voit nulle part et chacun peut en cueillir, les roses et autres fleures odorantes vivent à Ushrusana jusqu’à la fin automne, et il en est de même à Jurzuwân, dans le Jurzajân.

[…]

 

Description :

 

Le bras principal du Jayhûn est le fleuve Jary-Ab, qui prend sa source dans le pays de Wakhkhân aux frontières du Badkhshân, d’autres cours d’eau se réunissent à lui aux limites du Khuttal et du Wakhsh, ce qui aboutit à la formation de ce grand fleuve.

Un de ces cours d’eau, après le Jary-Ab, se nomme Akhshu ou Hulbuk, puis c’est le fleuve Barbân, puis le fleuve Farghâr, le fleuve Andijarâgh, et enfin le Wakhsh-Ab qui a le plus fort débit. Ces 4 rivières confluent avant Arhân, puis se réunissent au Wakhsh-Ab avant Quwâdyân. Le fleuve reçoit alors […] les rivières de Saghanyân et de Quwâdyân, qui ne forment alors qu’un seul cours.

Le Wakhsh-Ab prend sa source dans le pays des Turk et apparaît dans la région de Wakhsh, passe à travers une montagne, puis sous un pont de pierre, qui marque la frontière entre le Khuttal et le Wash-Jird.

Le Jayhûn coule alors en direction de Tirmidh, dans les parages de Balkh, arrose Amûl, Kilif, Zamm et Firabr, et se termine au Khârizm, dans le Lac Aral ; l’eau du fleuve ne sert pas aux habitants dans le Khuttal et à Tirmidh, mais à partir de Zamm, ils l’utilisent et dès son arrivée au Khârizm, la population la population le met à profit pour irriguer les terres.

 

[…]

 

Khawârizm :

 

Khârizm est le nom d’un territoire, lequel est nettement séparé du Khurâsân et de la Transoxiane, il est entièrement entouré par le désert ; au N et à l’W, sa frontière touche au pays des Ghuzz […] c’est une vaste contrée, avec des cantons étendus, de nombreuses cités. C’est la fin des cultures en bordure du Jayhûn ; au-delà, les terres sont incultes jusqu’à l’embouchure du fleuve dans le Lac Aral. Il s’agit donc d’une région qui s’étale sur les 2 rives du Jayhûn. La capitale est situé sur la rive N, mais sur la rive S se trouve une ville importante, appelée Jurjânya, la plus grande après sa capitale. C’est le centre commercial des Ghûzz et le point de départ des caravanes vers le Jurjân ; autrefois, celles-ci partaient régulièrement vers le Khâzâr et le Khurâsân.

Les villes du Khârizm, en outre, sont :

-Darghân

-Hazarasp

-Khiwa

-Ardakh-u-Shmitân

-Safardîz

-Nuzwâr

-Kardurân-Khâsh

-Kurdur

-Bourg Faratakin

-Madminya

-Mazdak-Khân

 

[…]

 

Le fleuve se jette dans le Lac Aral en un point fréquenté par des pêcheurs, sans qu’il y ait là une bourgade ni même de maisons, ce lieu est appelé Khalijân. Sur les bords de cette mer, en face de Khalijân, se développent les territoires des Ghûzz ; dans les périodes de paix et de trève, ils circulent d’un côté jusqu’à Bourg Faratakin, et de l’autre jusqu’à Jurjânya. Toute la contrée constitue une marche frontière. […] Entre l’embouchure du Jayhûn et l’embouchure dans la même mer du fleuve de Shâsh, il y a 10 j.

 

Les eaux du Jayhûn gèlent souvent pendant l’hiver, et sur la glace, on peut faire passer des mulets porteurs de fardeaux et des chameaux lourdement chargés. Les gelées commencent dans la région du Khârizm et remontent le cours du fleuve pour cesser en un certain point.

[…]

Il y a sur le rivage du Lac Aral une montagne appelée Jaghir-Ughuz, près de laquelle l’eau reste gelée tout l’été, on y voit fourrés et roseaux.

Le Lac Aral mesure environ 100 frs. de circonférence […]  son eau est salée […] on pourrait supposer, mais Dieu seul le saît, qu’il y a communication entre ce lac et la mer des Khazar et que leurs eaux sont mêlées ; toutefois, […] je n’ai pu le vérifier. […]

 

Le Khârizm est une contrée fertile qui produit en abondance vivres céréales et fruits, à l’exception des noix. On s’y procure des tissus de coton et de laine, et des quantités d’effets sont exportés dans tous les pays du monde. Les habitants sont particulièrement riches et font ostensiblement preuve de vertus chevaleresques.

Au sein des Khurâsâniens ce sont eux qui émigrèrent le plus et voyagent toujours un peu partout, il n’y a guerre de ville au Khûrâsân dans laquelle une forte proportion de Khârizmi n’y soient installés.

 

Leur langage est un parler à part et aucune des langues du Khurâsân ne lui ressemble. Les habitants se vêtent de tuniques courtes et se coiffent de bonnets dont les enroulements sont exécutés d’après des gabarits traditionnels.

Leur caractère est original parmi les Khurâsânî, pour lutter contre les Ghûzz, ils font montre d’un grand courage.

 

Il n’y a dans le pays ni mine d’or, ni d’argent, ni d’aucune minerai précieux. La fortune de ses habitants vient de leur commerce avec les Turk et de l’élevage du bétail. C’est chez eux qu’arrivent les esclaves du Pays des Sqlab, des Khazâr et des régions voisines, ainsi que ceux des Turk, des fourrures, comme le fennec, la zibeline, le renard, la fouine et autre… entreposées chez eux avec les esclaves. Leurs négociants pénètrent jusqu’au pays de Jûj wa Majûj pour s’y procurer des castors et fourrures ; il est très rare qu’un homme barbu se hasarde chez ces derniers […] le prince de la lignée de Jûj wa Majûj, sur le territoire duquel il est venu lui fait arracher les poils, ce qui ne l’empêche pas, après cette opération, de le traiter avec bcp d’égards et de lui permettre de faire des affaires.

 

Bûkhara :

 

Bûkhara est le siège du gouvernement sur l’ensemble du Khurâsân ; la province s’étale en ligne droite sur la voie qui mène aux districts de Transoxiane. […] Le nom de la cité est Numij-Kat, ville située en plaine ; ses maisons sont construites en lattis disposés en treillage (Mushabbak) ; les constructions sont serrées les unes contre les autres ; la cité comprend des palais, des vergers, des quartiers, des rues pavées, des agglomérations continues sur une longueur de 12 frs. et une largeur égale !

Tout cet ensemble est contenu à l’intérieur d’un rempart qui entoure ces palais, ces bâtiments, ces bourgs et la cité centrale. Dans toute cette surface on ne distingue ni désert, ni espace délabré ou inculte. Ce rempart environne spécialement la cité, ainsi que les palais, les demeures et quartiers qui en font réellement parti et où sont domiciliés en permanence, hiver comme été, les véritables citoyens.

Il y a, à l’intérieur de ce rempart un autre, d’1 frs. sur 1 frs., cette muraille puissante englobe à son tour une ville. Le Kuhandiz est situé en dehors de la cité, mais contigue à celle-ci ; c’est comme une petite ville, pourvue d’une forteresse ; on voit dans ce Kuhandiz les demeures des seigneurs Samanides du Khurâsân. Il y a un faubourg long et large.

Il n’y a dans tout le Khurâsân nulle cité si dense et si peuplée que Bukhâra […].

 

Le Jâmi‘ s’élève dans la ville à la porte du Kuhandiz, la prison est dans le Kuhandiz et les marchés sont situés dans le faubourg. […]

Ils sont traversés par le fleuve du Sughd dont c’est l’extrémité : il fait marcher des moulins, arrose les domaines et les terrains de culture et l’excédent des eaux se déverse dans un bassin qui avoisinne Bay-Qand, non loin de Firabr et qui se nomme Sam-Khâsh.

 

Bukhâra a 7 portes en fer :

-Porte de la Cité

-Porte de Nûr

-Porte de Haqq-Râ

-Porte de Fer

-Porte du Kuhandiz

-Porte des B. Asad ou du Muhr

-Porte des B. Sa‘d

La citadelle a 2 portes :

-Porte du Rigistân

-Porte du Jâmi

Le faubourg a prs issues :

-Darb al-Maydân : v. Khurâsân (S-W)

-Darb Ibrâhîm : (S ?)

-Darb Rabw : (S ?)

-Darb Mard-Khushân : v. Nasâf et Balkh (S-E)

-Darb Kalabadh : « « « «  (S-E)

-Porte de Samarqand (N-E)

-Porte de Baghshkûr : (N ?)

-Porte de Ramithâna : (N-W ?)

-Porte de Jadasarûn : v. Khârizm (W-N-W)

-Porte Ghashâj : (W ?)

 

Au centre du faubourg se trouvent encore la

-Porte de Fer

-Portes du Pont Hasân

-2 Portes près du Jâmi‘ de Makh

-Porte de Rukhna : proche du palais d’Abû Hishâm Kinânî

-Porte du Pont du Petit Sûq

-Porte de Farjak

-Porte de Darwazja

-Porte de Sikkat Mughân

-Porte Intérieure de Samarqand

 

Ni dans la cité ni dans le kuhandiz il n’y a l’eau courante en raison de leur élévation ; les eaux de la populations viennent du grand fleuve de Samarqand, lequel se ramifie dans la cité en de multiples branches :

[description]

 

De Bûkhara dépendent de nombreux cantons ruraux, des districts riches et florissants, d’importants terrains et domaines fructueux, qui n’ont rien de comparable à ce dont profitent les habitants d’une autre région de la terre […] loin de l’abondance et de la productivité de la province de Bûkhara :

 

-en dedans du mur entourant la province comme un rempart :

Dâr ; Barghî-Dâr ; Satijân ; Tawâwîs ; Bardâq ; Kharghana bas ; Naqrina ; Najjâr-Khitfâr ; Kakhashtuwân ; Wandya ; Kandyân ; Samjân ; Farâwîz ; Arwân

-en dehors de ce mur :

Khudha ; Shabakhash ; Nashr (Karminya) ; Kharghana haut ; Ghâr-Qand ; Bay-Qand ; Firâbr

 

Zarafshân :

 

Le fleuve qui atteint Bûkhâra en provenance des régions de Samarqand prend sa source dans les montagnes du Buttâm ; il se nomme le fleuve de Sûghd tandis que dans le Sûghd et à Samarqand on l’appelle le fleuve de Bûkhâra. Il se divise en prs branches dans le territoire de Bûkhâra, hors de la cité, avant la muraille extérieure, vers le Tawâwîs et jusqu’à l’entrée de la ville. Ces cours d’eau se répandent dans les villages et terres cultivées  à l’intérieur de la muraille et dont ils dépendent pour la fertilité.

 

[Canaux : ]

 

Bâtiments :

 

Tous les édifices de Bûkhâra ont été fait selon le type des constructions serrées les unes contre les autres, bien ordonnées et disposées, selon la surélévation des terrains à bâtir ; l’ensemble ets ainsi fortifié par des citadelles et par la densité du bâtis.

 

Agriculture :

 

A l’intérieur de la muraile, il n’y a ni terrain vague, désert ou en friche ; la montagne la plus proche est le Mt Warka d’où l’on extrait les pierres pour paver les rues et construire les édifices, on en tire également de l’argile à potier et de la chaux et du plâtre. Les Salines se trouvent hors la muraille ; le bois à brûler vient des jardins et de diverses variétés de tamaris que l’on recueille dans la steppe.

Toutes les terres de la région de Bûkhâra sont voisines de l’eau, parce que c’est là le déversoir du fleuve du Sûghd et c’est la raison pour laquelle les grands arbres du même genre que platanes et noyers n’y poussent pas.

Les fruits de Bûkhâra sont les meilleurs et les plus savoureux de toute la Transoxiane.

 

Une redoutable preuve de la fertilité de B, c’est qu’un homme peut subsister de la récolte d’un seul Jarîb de terre, dont les vivres servent aussi à ceux qui l’aident et à quelques membres de sa famille. Mais vu la densité des habitants et l’ampleur de leurs dépenses, les produits de leur sol sont inférieurs à leurs besoins […] leur grand nombre étant le double de ce que pourraient  nourrir leurs récoltes, et ils se trouvent obligés d’importer du reste de la Transoxiane vivres et biens indispensables.

 

Tiân-Shân :

 

La montagne dont les pentes comment au village de Warka se prolonge au-delà de Samarqand, entre elle et Kîsh, jusqu’aux Mts Buttâm, puis s’incline en direction d’Ushrusâna, et, traversant le Farghâna dans sa largeur s’étendent vers la région de Shilji et Taraz ; cette chaîne se poursuit ainsi jusqu’à la mer de Chine […].

 

Les gisements  […] se trouvent tous dans la chaîne principale de ces montagnes et celles qui la joignent : c’est le cas du sel ammoniac du Buttâm, du verre, du fer, du mercure, du cuivre, du plomb, de l’argent, du naphte, du goudron, des turquoises et du sel ammoniac au Farghâna ; des pierres qu’on brûle comme du charbon […].

[…]

Dans le Buttâm et dans les Mts Zabaj, dans les parages de Samarqand, il ya des sources d’eau chaude et d’eau gelée […].

 

Cités du Bukhâra :

 

Un certain nombre de cités dépendant de Bukhâra se trouvent à l’intérieur et à l’extérieur de la muraille.

 

Au-dedans :

-Tawâwîs, la plus grande cité pourvue d’un Jâmi‘, où les habitants tenaient autrefois une foire, qui rassemblait une affluence considérable de monde venant de tous les points du Khurâsân, à une date fixe de l’année. On s’y procure des étoffes de coton avec une telle proffusion qu’on en exporte en Iraq. C’est une cité où les vergers sont nombreux, et les eaux courantes rendent la cité fertile ; elle possède une citadelle, et la cité elle-même est entourée de fortifications ; le Jâmi‘ est en ville.

-Numijkat ; Zandana ; Mughkân ; Khujâda

 

Au dehors :

-Karminya est plus grande que Tâwâwîs, plus florissante, plus peuplée et plus fertile

-Khudi-Mankan fait partie de son territoire

-Kharghan-kat et Madyamja-Kat en sont limitrophes […]

D’ailleurs chacune de ces cités qui possède un Jâmi‘ est responsable de bourgades et de champs cultivés, à l’exception de :

-Bay-Qand, seule cité autonome, libre de toute administration cantonale. On y décompte plus de Ribâtât  qu’en aucune cité de la Transoxiane ; on en a dénombré un millier. La ville est entourée d’une solide muraille, possède un Jâmi‘ construite avec le plus grand soin et dont le Mihrâb est décoré d’une manière originale, avec des dessins d’une beauté qu’on ne voit pas ailleurs en Transoxiane.

-Firâbr est une cité proche du Jayhûn, dont dépendent des villages fertiles ; la cité elle-même est florissante, on y vient à cause de sa cuisine réputée, car la nourriture y est excellente et délicieuse.

 

Langue :

 

La langue de Bukhâra est celle du Sughd, à quelques différences de détail, et la population utilise aussi un langage Dârî.

 

Caractère :

 

Les habitants de Bukhâra se distinguent de tous les autres Khurâsâniens par leur culture, leur science légale, leur savoir juridique, leur esprit religieux, leur loyauté, leurs bonnes mœurs, la perfection de leurs rapports sociaux, l’absence de mauvais instincts, leur propension au bien, leur zèle pour les bonnes œuvres, la pureté de leurs intentions et la netteté de leurs sentiments.

 

Monnaie :

 

Les monnaies sont les drachmes, alors que les deniers servent uniquement de monnaie de compte. On utilise des drachmes appelées Ghitrifi se composant d’un alliage de fer, de cuivre, de plomb etc… ils n’ont cours qu’à Bukhâra et dans certaines localités au-delà du Jayhûn. On se sert également des Drachmes Muhammadî, on y voit des figures accompagnées de caractères illisibles, mais avec des signes bien reconnaissables. Ce sont des monnaies de frappe islamique, dont la création revient à la génération qui a précédé la famille Samanide. De même pour la monnaie Musayabî dont on se sert pour l’épargne, préférée aux drachmes Ismâîlî. Abû Ibrâhîm estima que l’argent pur valait mieux que ces drachmes et ce fut lui qui inaugura la frappe de cette monnaie en Transoxiane. Les transactions utilisent des divisionnaires de cuivre.

 

Vêtements :

La majeure partie de la population revêt des tuniques et se coiffe de bonnets : c’est la seule particularité vestimentaire en Transoxiane.

 

Marchés et Industrie :

En deçà comme au-delà de la muraille, des Sûq s’étendent en continu, avec des foire qui se tiennent mensuellement, où l’affluence des chalans est considérable ; on y met en vente du bétail, des étoffes, des esclaves, toutes sortes de dinanderies jaune et rouge, des vases et des ustensiles, des vases et autres ustensiles à l’usage de la population.

 

Bukhâra et ses environs manufacturent des produits variés qu’on exporte en Iraq etc… des tissus « Bukhârî », de lourdes étoffes de coton en fils épais, tissés solidement, très prisés par les Arabes ; des tapis, de magnifiques tentures de laine pour l’ameublement, des coussins, des tapis de prière pourvus de dessins de Mihrâb.

 

Anecdotes :

 

Les habitants de Bukhâra se transmettent depuis les temps les plus reculés des histoires assez curieuses :

-Ils sont tous d’accord, sans discussion, pour affirmer la bénédiction attachée à leurs fortifications et à leur Kuhandiz. Jamais l’on n’en vit sortir le cortège funèbre d’un Wâlî, jamais aucun Sanjâk al-Imâra n’y fut confié à une armée sortant en campagne qui en revint battue. C’est un véritable concours de circonstance extraordinaire.

-On assure que la population de Bukhâra fut à l’origine, en des temps très anciens, composée d’émigrés d’Istakhr.

 

Capitale du Khurâsân :

 

La résidence des seigneurs de la dynastie Samanide y fut établie parce que c’était la cité de Transoxiane la plus proche du Khurâsân […]. Les habitants sont loyaux et manifestent peu d’opposition à leurs maîtres, et le. L fait qu’ils s’attachent aux entreprises de leurs chefs pousse ces derniers à vivre au milieu d’eux, […] Le premier qui la choisit comme capitale et y fixa sa résidence fut Abû Ibrâhîm Ismâ‘îl b. Ahmad, que Dieu le pardonne ! Il s’y trouvait au moment où il apprit lui être dévolu la Régie du Khurâsân : il attribua donc à ce territoire une bonne influence et se décida à en faire le siège permanent de sa principauté, en apréciant à sa valeur l’agrément et la salubrité de son sol. Ses descendants l’on gardée comme capitale, alors qu’auparavant, les Wâlî de ma Transoxiane siégeaient à Samarqand, ou à Shâsh, ou à Farghâna ; tandis que les ‘Umâl de Bukhâra étaient envoyé du Khurâsân pour gouverner exclusivement son territoire, situation qui dura jusqu’à la chute des Tâhirides.

 

 

Le territoire du Bukhâra est, à l’E, limitrophe du Sughd, qui commence dès qu’on a franchit Karminya, à Dabusya, et on passe ensuite par Arbinjân, Kushanya et Samarqand.

Il faut noter que selon certain, B, Kish et Nasaf font partie du Sughd, pourtant, ces cités constituent une ‘Amala indépendante.

 

Samarqand :

 

La capitale du Sughd est Samarqand, situé au S du fleuve sur une hauteur :

L’agglomération se compose d’un Kuhandiz, d’un faubourg et d’une cité.

 

-La prison est de nos jours dans le Kuhandiz ; le Dâr al-Imâra s’y trouvait jadis, mais est actuellement ruiné. Du haut de cette citadelle, on jouuit du plus beau spectacle imaginable, tel qu’un amateur peut le rêver : des arbres verdoyants, des châteaux resplendissants, des ruisseaux au cours rapide et de brillantes cultures. Il n’y nul espace dont l’œil ne soit rassasié, pas de jardin dont la beauté ne réjouisse la vue : l’ensemble est divisé en carrés bien délimités et la splendeur en est infinie. Les cyprès y ont été taillés afin d’y former les figures les plus curieuses : des animaux comme des éléphants, chameaux, bœufs, bêtes sauvages, affrontés les uns aux autres comme pour un dialogue, ou se mesurant en vue d’une lutte. Quel coup d’œil ! […] Quel spectacle propre à subjuguer l’âme humaine ! Ajoutons-y les rapides cours d’eau, les étangs dont l’eau frissonne perpetuellement, d’exquis lieux de repos, des pavillons, des Mustashrîfât splendidement bâtis et alignés : demeures  magnifiques, superbes salles de réunion, témoignant de la hauteur de vue de princes illustres.

 

Samarqand est enceinte dans une muraille fortifiée percée de 4 portes :

-Porte de Chine : à l’E, surélevée par rapport au sol, on y accède par de nombreuses marches, elle donne sur le fleuve même du Sughd

-Porte de Nawbahar, à l’W, également élevée

-Porte de Bukhâra, au N

-Porte de Kish, au S.

 

C’est une cité pourvue de grands marchés, et comme toutes les métropoles, elle possède des quartiers, des bains, des Khâns, des habitations.

 

Les eaux pénètrent en ville par des « fleuves » en partie en plomb, surélevés, et on a construit à cet effet une digue assezhaute au dessus du sol et qui en certains endroits, forme une véritable colline de pierre, au centre du marché, à partir de l’emplacement des changeurs : l’eau s’écoule depuis le marché des dinandiers jusqu’à l’entrée en ville par la Porte de Kish.

 

Les environs de la ville sont en contrabas, parce qu’on a utilisé la terre pour la construction de la muraille, de sorte qu’un profond fossé s’est formé par suite de l’extraction de la terre et de l’argile. Un aqueduc a donc été nécessaire pour amener l’eau à travers ce fossé à l’intérieur de la cité. C’est un canal antique, antérieur à l’Islam, établi au cpeur des marchés peuplés de Samarqand. Des deux côtés de ce canal, il y a des terrains de valeur, constitués en Awqâf pour leurs réparations et leurs entretiens ; des gardes mazdéens en assurent la protection, hiver comme été ; c’est une prestation obligatoire et pour cette raison, ils sont dispensés de Jizya. La ville est alimentée par les eaux de ce canal et on y voit des vergers.

 

Le Jâmi‘ est en ville, sous le Kuhandiz, dont elle est séparée par la largeur d’une rue. En ville également, il y a prs bureaux administratifs, dans un lieu appelé Asfizâr, ces bâtiments appartiennent aux Samanides, mais le Dâr al-Imâra est bien dans le Kuhandiz.

 

La ville est bordée par le faubourg et en est séparée par le fleuve du Sughd qu’elle domine. Le Sûq et le faubourg s’étendent derrière le fleuve depuis un endroit nommé Afshina à la Porte de Kuhak, puis il forme un circuit par Warsanin, la Porte de Fanak, la Porte de Riwdâd, la Porte de Qasr Asad, la Porte de Ghadawad et s’achève au fleuve, si bien que ce cours d’eau sert de fossé au faubourg dans la région du N. Le diamètre de l’espace circonscrit par le mur qui entoure le faubourg est de 2 frs. Le pt central, avec le regroupement des marchés, est à Râs Al-Tâq, c’ets bien l’emplacement d’où partent les marchés, les rues, et les avenues.

 

A l’intérieur de ce périmètre se trouvent des quartiers très dispersés, des palais, des vergers : presque toutes les rues et les maisons disposent d’eaux courantes, et bien peu de demeures sont dépourvues de vergers, si bien que si d’un point quelconque du Kuhandiz on observe la cité, on ne peut l’apercevoir car elle est cachée par les vergers et les arbres au milieu des habitations et qui bordent cours d’eaux et marchés. Les Khâns et le siège des corporations de marchands sont placés dans le faubourg ; sauf quelques rares qui sont en ville.

 

tout un khān avec les chambres, les écuries, les granges, les étables, les salles et quatre galeries, trois du côté gauche de la partie intérieure du khān et une à droite,khān connu sous le nom d’Hôtellerie de Palas, dans le souk du Sughd de Samarkand, au quartier des orfèvres, au lieu dit ruelle des Miséreux;
– un khān tout entier comprenant cinq chambres, trois salles, trois galeries, cinq chambres d’aération, et trois boutiques contiguës à sa droite, dans le souk du Sughd de Samarkand, au quartier de la Tête de l’Aqueduc, dans la ruelle connue comme la ruelle des Laitiers […];
– toute une grande annexe, le bas et le haut, au khān dit du Grand Samanide, dans le souk du Sughd de Samarkand, au quartier de la Tête de l’Aqueduc, rue du Minaret, et cette annexe est juste au coin de l’entrée du khān; et toutes les chambres en haut, et cinq chambres bakdariyya contiguës à ce khān, et toute la grande chambre bakdariyyasituée dans ce khān à gauche quand on monte;
– tout le hammam connu comme le hammam des Hommes, au souk du Sughd de Samarkand, au quartier de la Tête du Pont de Gātfar, rue Hammād;
– toutes les maisons des paysans akari, la maison du répartiteur d’eau, les vignobles, les champs emblavés, les granges, les aires à battre, lesquels sont tous dans le village de G˘ armā ad, l’un des villages d’Anbarkar du canton de Samarkand

 

C’est le comptoir commercial de la Transoxiane et c’était la capitale gouvernementale jusque sous le règne d’Ismâ‘îl b. Ahmad, que Dieu ait pitié de lui !

Les issues percées dans le mur du faubourg ne sont plus closes par des portes en bois ou en fer, depuis des émeutes qui avaient éclaté : les pouvoirs publics ordonnèrent d’arracher les vantaux et ces issues demeurèrent béantes, c’est le cas des Portes de Ghadawad, Isbishk, Sukhashin, Afshina, Warsanin, Kuhak, Riwdad et Farrukhshidh.

 

Certains prétendent que la cité a été fondée par un Tubba (Yemenite) et que Dhû al-Qarnayn complèta une partie de ses édifices. […]

 

Le sol de Samarqand est des plus salubres et des plus secs […]

 

Les maisons sont construites en terre et en bois.

 

Les habitants sont doués de belles qualités : autrefois ils se piquaient d’étaler leurs vertus chevaleresques, ne reculaient devant aucune dépense et s’engageaient dans des entreprises plus que la plupart des autres Khurasaniens, si bien que les fortunes ont décrues. Samarqand est le point de concentration des esclaves de la Transoxiane et les meilleurs esclaves sont ceux qui ont été éduqués ici.

 

Une courte j. sépare la cité des montagnes les plus proches, mais une eptite colline nommée Kuhak est voisine et ses premières pentes touchent les murailles, sur ½ m. de long, les habitants en tirent des pierres de construction et de l’argile pour confectionner les ustensiles, de la chaux, du verre, il y aurait même des filons d’or et d’argent, mais l’extraction en serait difficile.

 

Presque toutes les avenues, les ruelles, et les marchés de la cité sont pavés de pierres.

 

[Sughd et canaux]

[…]

L’étendue du fleuve, depuis Waraghsar jusqu’à l’endroit du Bukhâra d’où partent les canaux de dérivations internes est de 6 j., au milieu d’un enchevêtrement de villages, de vergers et de petits canaux.

En se plaçant sur une montagne au dessus du fleuve du Sughd, on aperçoit des hcamps continus verdoyants, au sein desquels on voit poindre plus d’une citadelle blanche, plus d’un palais aux murs d’une telle hauteur, mais dans la structure de cet ensemble, il ets rare qu’apparaisse un vide dans la verdure, ou une terre en friche ou déserte !

 

La répartition de ces eaux est entre le smain d’un officier imortant résidant à Samarqand et qui commande à des employés assumant les responsabilités de boucher les fissures, de régler le cours des eaux et le régime des digues.

 

Waraghsar possède des vignobles et des domaines : c’est un canton dispensé de Kharâj, précisémment parce que la population doit en remplacement les réparations éventuelles des digues.

 

Après que les canaux ont drainé l’eau du fleuve, celui-ci passe sous le pont du Jird à la porte de Samarqand et, en période de crue, l’eau monte tellement que son niveau atteint presque le tablier du pont, dont la hauteur au dessus du sol dépasse pourtant 3 hauteurs d’homme ; sa largeur est égale à sa hauteur ! Cette crue en été résulte de la fonte des neiges des Mts Buttam, Ushrusana et Samarqand, elle ets parfois si forte qu’elle brise la digue qui protège le pont du Jird, et la population de Samarqand éprouve les pires difficultés à réparer cette dernière vu le débit et la force de l’eau.

 

C’est sur ce fleuve que le bois du Sughd ets transporté vers Samarqand.

 

[cantons]

 

Shawdar est le nom d’une montagne qui se dresse au S de Samarqand ; il n’ya dans tous ses environs aucun canton dont le climat soit plus salubre, les cultures d’une qualité aussi excellente et les fruits plus savoureux ; de toute la région, les habitants ont le corps le plus vigoureux, le teint le plus flatteur.

La longueur de ce canton dépasse 10 frs ; il y a là les montagnes les plus agréables à voir, les plus belles cultures, avec des récoltes qui ne cessent pas, sans la moindre interruption, et sans que els efforts soient pénibles.

On voit à Shawdar un Dayr d’une communauté chrétienne, comprenant cellules et habitations confortables et plaisantes ; j’y ai rencontré des chrétiens iraqiens qui y avaient élu domicile à cause de la bonne situation et choisi à cause de son isolement et de sa tranquilité.

Des Awqâf le font vivre et des fidèles viennent y faire retraiote, car l’endroit est vénéré plus que les autres lieux du Sughd : il se nomme Wazkarda.

 

Shawdar renferme un certain nombre de vallées et chacune d’elles donne passage à des cours d’eau qui arrosent des domaines ; toute cette région est jolie et séduisante, avec des chasses d’une étonnante variété de gibier ; la fertilité engendre une abondance de récoltes qui satisfont à tous les besoins de la vie et invitent à en profiter.

 

Kish :

 

Kish est une ville fortifiée, munie d’une citadelle, avec un faubourg, et une autre cité est contigue au faubourg. La ville intérieure et la citadelle sont en ruines, tandis que la cité extérieure est en pleine activité. Le Dâr al-Imâra est en dehors de la ville et du faubourg en un endroit appelé alMuçalla. La prison et le Jâmi‘ sont situés dans la cité intérieure, ruinée, les marchés dans le faubourg.

C’est une ville d’1/3 frs. dans les 2 sens. Les maisons sont bâties en terre et en bois. C’est une ville d’un bon rapport avec un climat chaud ; les fruits y murissent plus rapidement que dans toute autre partie de la Transoxiane, les plus précoces sont dirigés sur Bukhâra, mais leur qualité est médiocre.

La ville intérieure est percée de 4 portes :

-Porte de Fer

-Porte de ‘Ubayd Allah

-Porte des Foulons

-Porte de la Ville Intérieure

Il y a 2 portes pour la ville extérieure :

-Porte de la Ville Intérieure

-Porte de Barkaman

Deux grosses rivières l’arrosent en passant par les portes de la cité :

-La rivière des foulons, qui prend sa source au Mt Syâm et coule vers le S de la cité

-Le Fleuve Asrud, vient du canton de Khaskrud vers le N de la cité

 

Shâsh-Ilâq :

 

Le Shâsh et l’Ilâq ont une superficie de 2 j. sur 3 j. ; dans le Khurâsân et la Transoxiane, il n’existe nul district qui possède autant de Jawâmi‘, de villages riches et florissants, d’aussi vastes cultures, ce à quoi on doit ajouter la force et la vigueur de son peuple.

La région est limitée d’un côté par le Sayhûn qui se jette dans le lac Aral, de l’autre par la porte de Fer, dans la plaine déserte qui sépare ce pays d’Isbij-Ab ; qu’on appelle Qalas et où se trouvent d’amples paturages. La dernière  limite est constituée par des montagnes incluses dans le territoire du Shâsh, avec des terres cultivées sans interruption jusqu’à la montagne, tandis que le reste n’est mis en culture que Muftarîq’ân. Cette bordure se prolonge jusqu’au bourg chrétien de Winkard.

Le Shâsh s’étend en plaine et, au milieu de culture continues ne se dresse aucune montagne, ni même aucun accident de terrain tant soit peu élevé : il constitue la plus allongée des Hudûd face à l’ennemi Turk.

 

Les maisons sont larges et construites de terre ; elles possèdent toutes des eaux courantes ; la capitale ets entourée et couverte par la verdure […] la province renferme de nbrses cités proches les unes des autres :

 

-Bin-Kat : le chef lieu du Shâsh se divise en un Kuhandiz et un Cité, le Kuhandiz est hors de la cité, mais un rempart unique les entoure toutes deux. La cité possède un faubourg, lui-même ceint d’un mur, au-delà duquel se trouve un dernier faubourg, des vergers et des demeures, encore une fois entouré d’une muraille.

 

Le Kuhandiz a deux portes, l’une sur le faubourg, l’autre sur la cité ; le rempart de la cité est percé de 3 portes :

-Porte Abû al-‘Abbâs

-Porte de Kuthayr

-Porte de la Qubba :

 

Le premier faubourg est percé de 10 portes :

-Porte du Ribat Hamdin

-Porte de Fer Intérieure

-Porte du Commandeur

-Porte de Farkhân

-Porte de Sur-Kada

-Porte de Kazmanij

-Porte de Sikkat Sahl

-Porte de Rashîd-Ijâq

-Porte de Sikkat Khâqân

-Porte du Palais du Dihqân

 

Le faubourg extérieur a également 7 portes :

-Porte de Farghâd

-Porte de Khâsh-Kât

-Porte de Sakand-Ijâq

-Porte de Fer

-Porte de Bakird-Ijâq

-Porte de Sakrak

-Porte de Dâr-i-Faryâd

 

La Dâr al-Imâra et la Prison sont situés dans le Kuhandiz, le Jâmi‘ est tout contre le mur du Kuhandiz, dans la cité interne on trouve quelques marchés, mais la plupart se trouvent dans le faubourg. La longueur de l’agglomération au IIIè rempart est d’1 frs. La cité interne et le faubourg sont tous 2 arrosés de ruisseaux, le second compte de nbreux vergers […] les maisons sont dispersées.

 

Une muraille s’étend en travers de Qalas depuis le Mt Saflagh jusqu’au val de Sayhûn, vraisemblablement fondée et élevée pour contenir les Turk et leur interdire l’entrée du Dâr al-Islâm, ce fut l’œuvre de ‘Abd-Allah b. Humayd b. Thawr. A environ 1 frs. de cette barrirèe un fossé relie la montagne au fleuve.

 

Dans le Shâsh coule une autre rivièe, appelée Nahr Baraq, qui se jette dans le Sayhûn à hauteur de Nuj-Kât, avec 2 sources, ‘lune à Biskâm et l’autre à Jid-Ghîl, dans le pays des Turk Kharlûkh […].