Julien l’Apostat, A l’Aréopage d’Athènes (sur son enfance en Cappadoce), v. 355 n-è

A L’AREOPAGE et AU PEUPLE D’ATHENES

[…] son adolescence en Cappadoce

. Par mon père je suis de la même origine que Constance, c’est un fait notoire. Car son père et le mien étaient frères et issus du même père. Aussi avec quelle humanité cet empereur nous a-t-il traités, nous, ses proches parents! Mes six cousins, qui étaient également les siens, mon père son oncle, puis un autre oncle, et enfin mon frère aîné , il les fit tous mettre à mort sans jugement.

Il voulait me tuer aussi, avec mon autre Gallus: il se contenta de l’exil. J’en fus rappelé quelque temps après, mais mon frère perdit égorgé le titre de César. […] L’empereur se repentit, dit-on; […] et regarda comme un châtiment du Ciel de n’avoir point d’enfants et de faire aux Perses une guerre désastreuse. […] On lui donnait pour la première fois son véritable titre de César. Car, après l’avoir fait mourir au mépris des lois, l’empereur n’avait pas permis qu’il fût placé dans le tombeau de ses pères ni que l’on rendit hommage à sa mémoire.

Outre les propos que j’ai rapportés, on voulait nous faire croire que l’empereur avait agi par surprise : il aurait cédé à la […] pression turbulente d’une soldatesque remuante et indisciplinée. On ne cessait de nous tenir ce langage, lorsque nous étions confinés dans une campagne de la Cappadoce, où personne ne pouvait nous visiter.On nous y avait conduits tous deux, mon frère tiré de son exil, et moi, tout jeune encore, arraché aux premières leçons de l’enfance. Que n’aurais-je point à dire de ces six années où nous fûmes détenus dans une propriété étrangère, ou plutôt gardés à vue comme dans une prison, […] sans aucune communication avec les gens du dehors ou avec ceux qui nous étaient depuis longtemps connus, vivant sevrés de toute étude sérieuse, de tout libre entretien, nourris parmi un grand nombre de domestiques et contraints de nous exercer avec nos esclaves comme avec des amis : car on ne laissait approcher de nous aucun compagnon de notre âge.