Diodore de Sicile, IV, 22-24, Hercule en Sicile, v. 20 av. n-è

Parvenu au passage le plus étroit de la mer, Hercule fit passer ses vaches en Sicile. Quant à lui, saisissant les cornes d’un taureau, il traversa à la nage toute la largeur de ce détroit, qui, au rapport de Timée, est de 13stades.

23. Dans l’intention de faire ensuite le tour de la Sicile, il alla du cap Pélore jusqu’au mont Eryx. Pendant qu’il marchait le long des côtes de l’île, les Nymphes lui ouvrirent, dit-on, des bains d’eau chaude, afin de le délasser des fatigues de la route. Il y a 2 sources thermales, celle d’Himère et celle d’Egeste. En s’approchant des domaines d’Eryx, Hercule fut provoqué à la lutte par Eryx, fils de Vénus et d’un roi du pays, appelé Butas. Pour prix de la lutte, Eryx offrit son royaume, et Hercule ses vaches. Eryx se fâcha d’abord en soutenant que son royaume valait bien plus que les vaches d’Hercule. Mais Hercule lui avant montré que, s’il perdait ses vaches, il serait privé de l’immortalité, Eryx accepta les conditions de la lutte. Cependant il fut vaincu et perdit ses Etats ; Hercule les céda aux indigènes, et leur permit d’en recueillir les fruits, jusqu’à ce que quelqu’un de ses descendants viendrait en réclamer la possession. C’est ce qui arriva. Doriée le Lacédémonien, venu en Sicile plusieurs générations après Hercule, prit possession de ce pays, et y fonda la ville d’Héraclée. Cette ville prospéra, et les Carthaginois lui portèrent envie. Ils craignirent qu’elle ne devint plus puissante que Carthage, et qu’elle ne leur ôtât la suprématie. Ils vinrent donc l’attaquer avec de puissantes armées, la prirent d’assaut et la rasèrent. Mais nous parlerons de tout cela en détail en temps convenable.

Hercule fit le tour de la Sicile, et arriva enfin dans la ville qu’on appelle aujourd’hui Syracuse, où il apprit l’histoire de l’enlèvement de Proserpine. Il offrit aux déesses  un magnifique sacrifice. Il immola près de Cyané un des plus beaux taureaux, et enseigna aux habitants à faire tous les ans, en l’honneur de Proserpine, des fêtes et des sacrifices solennels. Ayant ensuite pénétré avec ses vaches dans l’intérieur du pays, les Sicaniens  vinrent à sa rencontre avec des troupes considérables ; mais il les vainquit dans un combat célèbre. Il tua un grand nombre d’ennemis, parmi lesquels on compte Leucaspis, Pédiacratès, Buphonas, Gaugatas, Cygéus et Crytidas, tous chefs célèbres auxquels on rend encore aujourd’hui les honneurs héroïques.

24. Après cela, Hercule entra dans la campagne de Léontium et admira la beauté du pays. Les habitants le reçurent avec des marques de respect ; il laissa chez eux des monuments éternels de son passage. Il lui arriva quelque chose de singulier ans la ville des Agyrinéens : les habitants l’honorèrent avec les mêmes fêtes et les mêmes sacrifices qu’on offre aux dieux de l’Olympe. Hercule n’avait jusqu’alors accepté l’offre d’aucun sacrifice ; le culte que lui rendirent les Agyrinéens fut le premier auquel il consentit comme un indice divin de son immortalité. Non loin de la ville est un chemin pierreux dans lequel les vaches d’Hercule imprimèrent leurs traces comme sur de la cire. Ce nouvel indice, joint à l’accomplissement de son dixième travail, lui fit croire qu’il était déjà immortel : et il accepta les sacrifices annuels que les habitants avaient institués en son honneur. Pour témoigner sa reconnaissance à ceux qui l’avaient tant honoré, il creusa devant leur ville un lac de quatre stades de tour, et il lui imposa son nom. Dans l’endroit où ses vaches avaient imprimé leurs traces, il consacra au héros Géryon une enceinte qui est encore aujourd’hui en vénération auprès des indigènes. Il consacra une autre enceinte à Iolaüs, son neveu et sou compagnon d’armes ; et il institua en son honneur des sacrifices annuels qu’on célèbre encore maintenant. Tous les habitants d’Agyre vouent dès la naissance leurs cheveux à Iolaüs, et les font croître jusqu’au moment où ils les offrent à ce dieu avec de magnifiques sacrifices. Le temple de Iolaüs est si saint et si vénéré que les enfants qui manquent d’y faire ces offrandes accoutumées deviennent muets et semblables à des morts. Cependant ils sont, dit-on, guéris de leur maladie dès qu’ils ont fait voeu de satisfaire à ce sacrifice, et qu’ils en ont donné le gage. 286 Les habitants ont nommé Herculéenne la porte devant laquelle ils font leurs offrandes à ce dieu. Ils célèbrent joyeusement cette solennité tous les ans, par des exercices de lutte et des courses de chevaux ; les maîtres se confondent alors avec les esclaves, et tous ensemble honorent le dieu par des danses, par des festins et des sacrifices.

Hercule repassa avec ses vaches en Italie et se dirigea le long des bords de la mer. Il assomma Lacinius qui voulait lui dérober ses vaches, il tua involontairement Croton, lui fit des obsèques magnifiques et lui éleva un tombeau. Il prédit aux indigènes qu’un jour s’élèverait dans cet endroit une ville célèbre qui porterait le même nom que le mort