St Willibald, évèque anglo-breton, Pélerinage en Syrie et au Jourdain, v. 720 :

Ils mirent pied à terre et atteignirent la cité d’Antarados, qui se trouve près de la mer sur le territoire des Sarracènes. Puis ils se rendirent à pied sur environ 9 ou 12 miles jusqu’à un fort appelé Arche, où se trouvait un évêque grec. Ils y chantèrent une litanie selon le rite grec. De là ils se rendirent à une citée nommée Emesa, à environ 12 miles de distance, où il se trouve une grande église construite par Sainte-Hélène en l’honneur de Saint-Jean-Baptiste et où sa tête fut longtemps préservée. C’est maintenant en Syrie.

À cette époque, Willibald avait 7 compagnons et était le huitième. Presque aussitôt, ils furent arrêtés par des Sarracènes païens, et parce qu’étrangers et a sauf conduit d’identité, ils furent faits prisonniers et retenus comme captifs. Ils ne savaient pas à quelle nation ils appartenaient, et, pensant qu’ils étaient des espions, prirent avis auprès d’un vieil homme riche pour savoir d’où ils venaient. Le vieil homme les questionna sur leur provenance et l’affaire à laquelle ils s’employaient. Puis il leur rapporta tout ceci et leur fit connaître le motif de leur voyage. Et le vieil homme dit: «J’ai souvent vu des hommes en provenance de ces régions du monde, ils ne causent aucun mal et ne sont soucieux que de se soumettre au droit” Puis ils le laissèrent et se rendirent à la cour, demandèrent la permission de passer à Jérusalem. Mais quand ils y arrivèrent, le gouverneur déclara qu’ils étaient des espions et ordonna qu’on les jeta en prison jusqu’à ce qu’il entende du roi ce qu’il devait faire d’eux. Pendant qu’ils étaient en prison, ils eurent une expérience inattendue des prodigues merveilleux du Dieu Tout-Puissant, qui daigne heureusement protéger ses serviteurs partout, au milieu des armes de guerre et des tortures, des barbares, et des soldats, des prisons et des bandes d’agresseurs, les conserve et les protège contre tous les dommages. Un homme était là, un commerçant, qui voulait les racheter et les libérer de la captivité, de sorte qu’ils soient libres de poursuivre leur voyage comme ils le souhaitaient. Il le fit comme aumône et pour le salut de son âme. Mais il fut incapable de les libérer. Chaque jour, donc, il leur envoyait le dîner et le souper, et le mercredi et le samedi, il envoyait son fils à la prison et les menait aux bains, puis ramenait à nouveau. Chaque dimanche, il les conduisait à l’église par la place du marché, de sorte que s’il voyait quoi que ce soit en vente qui attirerait leur intérêt, il pourrait le leur acheter et ainsi leur faire plaisir. Les citoyens de la ville, qui sont gente curieuse, ont coutume de venir régulièrement les regarder, parce qu’ils étaient jeunes et beaux, et revêtus de belles tuniques. Ensuite, alors qu’ils croupissait toujours en prison, un homme de l’Hispanie vint leur parler au sein même de la prison et pour les questionner quant à leur identité et leur patrie. Et ils lui contèrent tout au sujet de leur voyage du début à la fin. Cet Hispanique avait un frère à la cour du roi, qui était chambellan du roi des Sarracènes. Et quand le gouverneur qui les avait envoyés à la prison vint à la cour, l’Espagnol, qui leur avait parlé en prison et le capitaine du navire où ils avaient appareillé de Chypre se réunirent en présence du Roi des Sarracènes, dont le nom est EmiralMummenin. Et lorsque la conversation échoua sur leur cas, l’Hispanique dit à son frère tout ce qu’il avait appris d’eux tout en lui parlant de la prison, et il supplia son frère de transmettre cette information au roi et de les aider. Alors, quand, plus tard, ces trois vinrent vers le roi et présentèrent cette cause, en lui donnant chaque détail, le roi demanda d’où ils venaient et ils répondirent: « Ces hommes viennent de l’Occident, là où se couche le soleil, nous ne savons rien de leur pays, sauf qu’au-delà ne se trouve rien d’autre que de l’eau. “

Alors le roi leur demanda : “Pourquoi devrions-nous les punir ? Ils ne nous ont fait aucun mal, laissons les partir et continuer leur chemin?..” Les autres prisonniers qui étaient en captivité durent payer une amende de trois modii de blé, mais furent relâchés, sans épice. »

Avec cette permission, ils parcoururent une centaine de miles jusqu’à Damas, en Syrie, où repose le corps de saint Ananie. Ils y restèrent une semaine. A environ deux miles distance se trouve une église où saint Paul fut converti lorsque Notre Seigneur lui dit: « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? ». Après avoir prié dans l’église, ils allèrent à pied en Galilée, à l’endroit où Gabriel vint à Notre Dame et dit: “Je vous salue Marie». Il y a une église là maintenant, et le village où se trouve l’Église est appelé Nazareth. Les chrétiens eurent souvent à composer avec les Sarracènes païens pour conserver cette église, parce qu’ils voulaient la détruire. Après avoir glorifié le Seigneur, ils marchèrent jusqu’à la cité de Chana, où notre Seigneur changea l’eau en vin. Une vaste église est là, et dans l’Eglise un des autels porte les 6 vases d’eau que Notre Seigneur a ordonné, avant de les changer en vin, et dont ils burent le vin.. Ils y restèrent une journée. De là, ils atteignirent le Mont Thabor où notre Seigneur fut transfiguré. À l’heure actuelle il y a un monastère, et l’église est dédiée à Notre-Seigneur, à Moïse et à Elie, et l’endroit est appelé par ceux qui y vivent, le Mont Saint. Là, ils prièrent.

[…]

Après quelques temps de repos, ils reprirent leur route vers le monastère de Saint-Jean-Baptiste où il y avait environ 20 moines. Il y passèrent la nuit et, de là, ils firent encore un mille pour atteindre le Jourdain au lieu du baptême du Seigneur. On y voit maintenant une église avec des colonnes de pierre et, au-dessous, la terre nue. C’est le lieu précis du baptême du Seigneur. À l’endroit où l’on baptise maintenant, une croix de bois est dressée au milieu de d’une petite dérivation du courant et une corde est tendue solidement d’un bord à l’autre du Jourdain. Le jour de l’Épiphanie, les malades et les infirmes se tiennent à cette corde pour se plonger dans l’eau. Les femmes stériles qui viennent ici sont aussi favorisées de la grâce du Seigneur. Notre évêque Willibald s’est baigné là, dans le Jourdain. Ils sont restés en ce lieu un jour.