Marmol y Carvajal, Description de la Barbarie, v. 1550 : Arzila/Açila

C’est une cité très ancienne, à 47 lieues de Fàs et à 7 du détroit de Gibraltar, vers l’ouest, Ptolémée la situe à 6°30’ 35°10’ sous le nom de Zilis. Dans les nouvelles cartes elle est au nombre de celles qui sont à l’intérieur du pays, parce que l’Océan fait un grand banc de sable à cet endroit et entre très avant dans les terres. Les auteurs africains la nomment Azeylla et disent qu’elle a été bâtie par les Romains, et qu’elle faisait partie des dépendances de Ceuta. Les Goths l’ont ensuite détenue et y ont eu une garnison jusqu’en 94 de l’hégire lorsque les arabes s’en rendirent maîtres, deux ans après la conquête de l’Espagne […] Elle fut donc au pouvoir des Goths deux ans après la prise de Ceuta, après quoi, démunie de tout secours, elle fut contrainte de se rendre.
Les Arabes l’embellir grandement, et elle devint très illustre, tant par la marchandise que par les lettres et les armes ; mais au bout de 200 ans, les Anglais pour se venger des Arabes qui rodaient sur les côtes écossaises et anglaises la vinrent attaquer avec une puissante armée, et l’emportèrent d’assaut. Ils y perdirent toutefois bcp de gens, de sorte que fâchés de leur perte, ils mirent tout à feu et à sang. Elle demeura abandonnée jusqu’à ce qu’un Roi de Cordoue, 20 ans après, y mit des marchands et des gens de guerre et la fortifia. On équipait de là des navires dont on ravageait les côtes de la Chrétienté, ce qui causa sa ruine une seconde fois.
Elle est bien située, et a de bonnes murailles garnies de tours avec un château fort, mais sa principale force vient de la difficulté de l’entrée du port, en raison du banc de sable qui s’y trouve, ce qui la fit abandonnér par les Portugais, comme ils ne pouvaient la secourir par mer. Le pays alentour est très bon pour les blés et pour les troupeaux, et pour toute sorte de fruits, et serait d’un grand profit, sans les courses des chrétiens de Tanger, qui la ravageaient à toute heure.