G. Salmon et E. Michaux – Bellaire – Description de la Ville de Fès en 1906 – Archives Marocaines vol. 11

ARCHIVES MAROCAINES

L’ARRIVÉE A FÈS

Lorsqu’on arrive à Fès par la grand’ route du Makhzen,
on entre dans la plaine du Saïs et dans la vallée de l’Oued
Fès, au village de « Ed Douïat » (les petits étangs).
Après avoir passé ce village, la route de Tanger se con-
fond avec celle venant de Mequinès et les deux routes réu-
nies forment une seule voie très large, nullement entre-
tenue d’ailleurs, si ce n’est par le piétinement des hommes
et des animaux.

La route se dirige en ligne à peu près droite vers la
ville, allant de l’ouest à l’est. On laisse derrière soi, vers
le nord-ouest, les montagnes de El Qanoufa et de Zerhoun,
au sud-ouest les montagnes des Beni Mtir. La route est
sur la rive gauche de l’Oued Fès dont les sources (Ras El
Ma) restent un peu en arrière, à main droite. Du même
côté, les montagnes de Bhalil, au bas desquelles se trouve
Sefrou, et la citadelle de « El Qalaa », invisibles toutes
deux, les montagnes des Aït Goussi, et, au loin, les cimes
neigeuses des Beni Ouaraïn; à gauche, tout près de la
route, la montagne de « Tghat », au pied de laquelle se
trouve le dernier village avant Fès, la « nzala » 1 Far-
radji. Elle tire son nom du qaïd nègre Farradji, gouver-
neur de Fès Ed Djedid, sous Sidi Mohammed, qui avait
créé cette « nzala » pour protéger les voyageurs entre Fès
et Ed Douïat et permettre aux caravanes attardées d’y
passer la nuit sans se risquer, après le coucher du soleil,
dans les alentours directs de la ville, qui sont infestés de
maraudeurs.

1. « Nzala » de « nzal » JjJ descendre (de cheval), faire halle. –
Gites, nom donné au Maroc aux villages désignés par le Makhzen pour
y passer la nuit en cours de route.
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DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

C’est à la nzala Farradji que les ambassades européennes
passent leur dernière nuit avant d’entrer à Fès c’est là
que, le lendemain matin, viennent à leur rencontre les
grands officiers de la Cour, pour leur souhaiter la bien-
venue de la part du Sultan et les accompagner jusqu’au
palais de Bel Madani Bennis, en pompeux cortège. Au fond,
à gauche, le Djebel Zalagh, qui domine Fès au nord-est.
Cette montagne, d’après Es Salaouat El Anflas, s’appelait
autrefois Ed Djebel Dill, la montagne de l’ombre. Au fond
de la route, en face, les hauteurs de El Anq Ed Djemel, le
cou du chameau, sur la route droite du Sebou, derrière la
ville.

Après avoir dépassé un peu la nzala Farradji, et franchi
une petite ondulation de terrain, on aperçoit Fès devant
soi. L’arrivée à Fès par la route de la nzala Farradji a été
si souvent décrite, qu’il est inutile de recommencer cette
description. Cependant, on peut redire encore que l’ap-
parition, pour ainsi dire soudaine, des vieux murs créne-
lés qui coupent l’horizon de leur haute bande grise et
d’où se détachent, plus hautes encore, quelques tours
avec les silhouettes de quelques minarets, est d’un effet
grandiose donnant bien l’impression de quelque chose de
mystérieux et de fermé qui ne se livrera pas sans efl’orts.
A droite, à quelques kilomètres sur la rive droite de
l’Oued Fès, s’étendent les jardins de Ed Dar Ed Debibagh,
maison d’été du Sultan, où il se rend d’ailleurs rarement.
Ce domaine, de médiocre étendue, ne comprend pas de
bâtiments suffisants pour l’installation complète de la Cour.
Ed Dar Ed Debibagh, dont la traduction est: « la mai-
son du petit tanneur », était connu sous ce nom au dixième
siècle de l’hégire. Léon l’appelle « Dar Dubag »
1. Ed Dar Ed Debibagh. On dit que ce nom proviendrait de celui des
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A la mort (le Moulay Isinaïl bel Chérif El Alaouï El Filali,
ses fils se disputèrent sa succession et l’un d’eux, Moulay
Abdallah, généralement considéré comme ayant succédé
à son père, quoique cette succession lui ait été disputée
jusqu’à sa mort, avait installé son camp à l’endroit dit
Ed Dar Ed Debibagh, en 1154 de l’hégire. Il occupa Fès
Ed Djedid, mais ne parvint jamais à occuper Fès El Bali. En
1159, après un soulèvement de la ville de Fès appuyé par
les Berbères commandés par Mohammed Ou Aziz, et par
les Arabes du Gharb commandés par El Habib El Mal Ici,
Moulay Abdallah ayant su semer la division entre les Ber-
bères et les Arabes et se débarrasser de cette coalition,
les gens de Fès lui demandèrent la paix, qu’il leur accorda
à certaines conditions, entre autres qu’ils lui remettraient
toutes les céréales emmagasinées par les Arabes dans la
ville et qu’ils démoliraient les maisons appartenant à ces
Arabes dans la ville pour reconstruire une ville à Ed Dar
Ed Debibagh avec les matériaux provenant de ces démoli-
tions.

Les députés de Fès demandèrent à consulter avec ceux
qui les avaient envoyés, rentrèrent dans la ville et en fer-
mèrent les portes. Les désirs du Sultan ne furent donc
pas exécutés et la ville qu’il voulait élever à Ed Dar Ed De-
bibagh ne fut pas bâtie. Moulay Abdallah mourut à Ed Dar
Ed Debibagh le 27 safar de l’année 1471 et fut enterré à Fès
Ed Djedid, dans la mosquée qu’il avait fait bâtir et qui
porte son nom.

Les successeurs de Moulay Abdallah négligèrent Ed Dar
anciens propriétaires de cet endroit, qui étaient des Chorfa Idrisites de
la branche des Debbaghyin, descendants d’Isa ben Idris. Ces Chorfa, qui
habitaient Salé, revinrent à Fès au commencement du neuvième siècie
de l’hégire (Salmon, Arch. mar., v. I, p. 445). Le diminutif « Ed Debibagh»
tirerait son origine de ce que cette propriété était entre les mains d’un
jeune chérif « Debbaghyin », que l’on appelait « Debibagh au moment
où elle a été occupée par Moulay Abdallah pour la première fois.
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DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

Ed Debibagh, qui fut restaurée par Moulay El Hasan, qui
y allait quelquefois pendant ses séjours à Fès. Son fils,
Moulay Abd El Aziz, le sultan actuel, avait voulu, en 1902,
à son retour de Marrakech, relier Ed Dar Ed Debibagh au
palais de Fès Ed Djedid par un petit chemin de fer à voie
étroite. La voie fut établie par les soins d’un ingénieur
français, les deux ou trois voitures et la petite machine
apportées à grands frais de Larache, mais le jeune sultan
dut renoncer au plaisir qu’il se promettait de voyager en
chemin de fer pendant 3 kilomètres, devant l’intolérance
de son peuple, qui considérait cette innovation comme
le premier pas vers une civilisation qui lui est représen-
tée comme l’ennemie de l’Islam.

Sur la droite également de la route, on aperçoit les
murs du Palais du Sultan dépassés par le minaret de la
mosquée de Lalla Amina. A gauche se trouve la meçalla de
Fès Ed Djedid. Une meçalla est un oratoire en plein vent,
̃qui se compose d’un mur dans lequel se trouve pratiqué,
du côté de l’est, un «mihrab» comme celui des mosquées,
à côté duquel, sur la droite, se trouve une petite chaire
composée simplement d’un escalier et d’une plate-forme,
et qui sert de « menbar », endroit élevé où se dit « El
Khotba ». La prière des deux fêtes de FAïcl Eç Çghir, à la
fin du Ramadan et de l’Aïd El Kbir(fête du mouton) se fait
le matin à la meçalla c’est là qu’à l’Aïd El Kbir est égorgé
le premier mouton sacrifié pour la fête. C’est à la meçalla
de Fès Ed Djedid que se rend le Sultan aux deux fêtes
précitées. Il s’y rend également à la fête du Mouloud
(naissance du Prophète)2, dans la matinée, mais il n’y a
1. _ i-i>) et les
verdiers, dont les mâles s’appellent açfoar jyj^as- et les
femelles semris (j-j.» sont pris à la glue dans les jar-
dins de la ville et des environs; ces oiseaux valent, suivant
leur talent de chanteur, de 2 à 10 pesetas.

En dehors du vendredi, où se tient le marché aux oiseaux
à Bab El Guisa, les oiseleurs se promènent dans la ville
avec leurs petites cages, offrant leur marchandise aux
portes des maisons.

DIVISION DE LA VILLE DE FÈS EN QUARTIERS

Avant d’entrer dans la ville, il est nécessaire d’indiquer
sa division en quartiers.

Dans l’origine, c’est-à-dire au moment même de sa cons-
truction, Fès se divisait en deux fractions El Bled ou El
Blida (la petite ville), sur la rive droite de l’Oued Fès; Aïn
Alloun, sur la rive gauche. Peu de temps après, la fraction
de la rive droite prenait le nom de Adouat El Andalous,
celle de la rive gauche celui de Adouat El Qaraouyin. Ces
deux fractions étaient, pour ainsi dire, deux villes dis-
tinctes, avec chacune leur enceinte de murailles elles
étaient même souvent en guerre l’une contre l’autre. Les
murailles qui séparaient les deux Adouas furent abattues
par Yousef ben Tachefin en 462 (1069 de J.-C.) et la ville
de Fès ne forma plus qu’une seule et même ville.
C’est cette ville que l’on appelle aujourd’hui Fès El Bali,
par opposition à Fès Ed Djedid, bâtie en 674 de l’hégire
(1276 de J.-C.) par Yaqoub ben Ahd El Haqq El Merini.
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DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

Fès El Bali se partage en trois grandes fractions, subdi-
visées en six quartiers, de sorte que la ville forme dix-
huit quartiers; mais chacun d’eux comprenant plusieurs
sections et portant le nom de l’une d’elles, le fractionne-
ment exact est difficile à saisir pour un étranger.
Les trois grandes’ divisions sont

1° El Lemtgin, qui s’étend de Bab El Mahrouq à Bab El
Guisa et à la rivière, séparée de la fraction « El Andalous »
par la grande voie qui s’étend de Bab El Mahrouq aux
Qaraouyin, dont un côté est « Lemtyia et l’autre « Anda-
lousia », puis par la mosquée des Qaraouyin et par la rue
« Seba El Louyat »

2° El Andalous, qui ne correspond pas à Adouat El
Andalous, mais qui désigne une partie de 1′ ‘Adouat El
Qaraouyin;

3° El Adoua, qui est l’ancienne Adouat El Andalous.
1° El Lemtyin comprend les six quartiers suivants
I. Zoqaq Er Romman, anc. Aïn El Khil, Aïn Alloun,
Bou Oqda.

II. Fondaq El Yhoudi, anc. El Hafl’arin Beïn Sonari,
Sidi Ahmed ben Yahya.

III. Çagha, anc. Ed Diouan, Rhabet El Qaïs, Seba
El Louyat, Es Seffarin, Bab En Noqba.

IV. El Blida, anc. Ed Derb, Et Touil et Djiaf.

V. Cherablyin, anc. Aïn Asliten El Menia, Ech Cher-
chour.

VI. Et Talaa El Lemtya.

2° El Andalous comprend

VII. El Qalqlyin, anc. Raj Ed Djenan et Rhabet Ez
Zbib, la moitié de Ras Ech Cheratin.
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VIII. ElAïoun, anc. Ed Douh Ed Djorf Oued Çouafiu,
Aqbat El Firan.

IX. Guerniz, anc. Sidi Mousa, En Nejjarin.

X. El Qaltanin, anc. Zoqaq El Biel, El Maady, Aqbat
Ez Zerba, l’autre moitié de Ras Ech Cherratin, Ech Cher–
naïn, Es Sbitryin.

XI. Souïqel Ben Safi, anc. Zoqaq El Hajar, Zoqaq
Er Roua, Zoqaq Elma.

XII. Et Talaa El Andalousie.

3° El’Adoua comprend

XIII. El Keddan, anc. Chibouba, Derb El Lemty Cefaa,
Djama El Andalous, Er Remila.

XIV. El Qouas, Sidi Mgbit, Bejaqaïnou, Sidi Hanin.
XV. Ed Djezira.

XVI. El Adouat EçÇar’ira, Derb Mechmacha, Derb Et 1
Khattar, Derb Ed Drouj, Derb Ech Cheikh.

XVII. El Mokhfia, anc. Jza Berqouqa.

XVIII. Sidi El Aoued, Jza Ben Zekoum.

Chacun de ces quartiers est pourvu d’un « moqaddem
el hauma », sorte de fonctionnaire subalterne, sans appoin-
tements, chargé de la police du quartier. Il est nommé
par le gouverneur de Fès El Bali, dont il relève seul.
L’autorité de ce fonctionnaire est assez médiocre et sa
principale source de revenus consiste à exploiter les
ribaudes et les femmes de moeurs douteuses. C’est un
emploi peu considéré.

Dans les cérémonies officielles, par exemple, une entrée
du Sultan à Fès, chaque moqaddem marche en tête des
gens de son quartier pour aller au devant du souverain. Il
n’y a pas de chef administratif aux trois grandes fractions
de la ville, ni de hiérarchie entre les différents « moqad-
dem el hauma » qui relèvent tous, directement et au
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DESCRIPTION Uli LA Vll.LK ME l’ISS

même litre, du gouverneur de Fès El Bali, mais traitent
généralement avec son khalifa.

Quartier de Zoqaq Er Romman j\-»J>\ <_s^j> î*y>
Comme la plupart des portes des anciennes enceintes
fortifiées, Bab El Guisa L-pJJ ^>\ fait un coude afin d’em-
pêcher que l’assaillant ne puisse entrer directement dans
la ville. Après avoir passé sous la grande porte en ogive
qui regarde sur la campagne, on trouve en face de soi,
sous la voûte de la porte, assis sur un banc -maçonné, dans
une large niche, les percepteurs du droit des portes t (El
Hafer), un agent du Fondaq EnNejjarin, chargé de recueil-
lir les petits bulletins (nechira, au pl. nechaïr) attestant
que les marchandises quelconques qui sortent de la ville
ont acquitté le droit de 10 p. 100 (achour), qui se paye à
ce fondaq 2 et un préposé chargé d’empêcher les gens du
dehors d’entrer dans la ville avec leurs fusils. Ce préposé
donne un reçu des armes qui lui sont remises et qu’il
rend à leurs propriétaires lorsqu’ils sortent; un petit poste
d’askar se trouve également sous la voûte, pour prêter, au
cas échéant, main-forte à ces différents fonctionnaires.
Sur la gauche, une autre grande porte en ogive donne
accès dans la ville. Après l’avoir franchie, on tourne sur
la droite et on arrive, quelques mètres plus loin, à une fon-
taine, puis à une impasse en pente très raide où se trou-
vent la « rauda » et au sommet le tombeau de Sidi Ali El
Mzaly ou El Mçali. Cette impasse et cette « rauda » sont
1. Droit des Portes. Voir Archives Marocaines, Ie’ vol., n° 1, « Les Impôts
marocains ».

2. Au sujet de ce Fondaq En Ncjjarin, cf. ibid.
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ARCHIVES MAROCAINES

comprises entre le mur d’enceinte et la mosquée de liab
El Guisa.

D’après les renseignements recueillis et l’opinion popu-
laire, Sidi Ali El Mzali serait de la famille des Oulad
Er Rommani, qui seraient eux-mêmes Chorfa Idrisites et
dont plusieurs membres seraient enterrés dans cette
« rauda ». De là viendrait le nom de « Zoqaq Er Romman »
donné à ce quartier.

D’autre part, El Killani, dans Es SalaouatElAnfas, dit
que Sidi Ali El Mcali, vulgairement appelé El Mzali, était
un « Ouali Çalih», c’est-à-dire un saint homme, qu’il était
ouvrier tisserand et qu’il ne travaillait que du lever du
soleil jusqu’au « dohour » (1 heure et demie), mais que,
pendant ce peu de temps, il faisait plus de travail qu’un
autre ouvrier pendant toute la journée. Il ne parle pas de
son origine, ni de l’époque où il vivait. Il ajoute que l’on
vient en pèlerinage à son tombeau le samedi matin, avant
le lever du soleil, pour obtenir la guérison de la toux. Sur
la pente de Sidi Ali El Mzali se trouve un grand nombre
de tombes parmi lesquelles celle de Sidi Hosein Ez Ze-
rouïli, fqih et alem, qui habitait la medersa El Meçbahia,
mort le 22 safar 1031 de l’hégire. Sur la droite de cette
même pente, en montant, on voit le tombeau de Sidi Khalf
Allah El Mejjaci El Malki; il s’appelait de son nom Abou
Saïd, surnommé selon les uns Khalf Allah, selon d’autres
Khalq Allah. Il était professeur à l’Université et élève de
Sidi Souleïman El Ouancharisi. Il est mort en 732 de
l’hégire. L’impasse appelée aujourd’hui Derb Sidi Djelloul
s’appelait autrefois Derb Khalq Allah, du nom de ce savant
qui l’habitait (Es Salaoaat El An fas, Djedoaal El Iqlibas).
Après l’impasse (Ed Drib) de Sidi Ali El Mzali, la mos-
quée de Bab El Guisa.

Cette mosquée a été construite, ainsi que la medersa
qui y est contiguë, par Sidi Mohammed ben Abdallah,
c’est-à-dire entre 1171 et 120A de l’hégire (1757-1790).
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DESCRIPTION DE LA VILLE DE FliS

La mosquée de Bab El Guisa, qui a été en partie recons-
truite, ainsi que son minaret, sous Moulay El Hasan, est
une mosquée de « Khotba », c’est-à-dire qu’on y dit la
prière du vendredi. Elle fait un tout avec la medersa qui
lui est contiguë et communique avec elle par une porte.
Outre cette porte de communication avec la medersa, la
mosquée en a quatre et comme la medersa a elle-même
son entrée spéciale, l’on peut y pénétrer sans passer par
la mosquée.

La medersa de Bab El Guisa 1 se compose d’une cer-
taine quantité de chambres habitées par des « tolba »
(étudiants) en majorité « Djebala » (de la montagne). Ces
étudiants suivent les mêmes cours que ceux des autres
medersas, et des cours sont faits également dans la mos-
quée de Bab El Guisa par les professeurs des Qaraouyin; ils
sont suivis par les tolba de la medersa de Bab El Guisa
et par ceux des autres medersas qui veulent y venir.
Sur la petite place, devant la mosquée, un grand nombre
de boutiques appartenant aux habous, où se vendent des
légumes, des olives, du pain, du « na’na’ » (sorte de
menthe que l’on met avec le thé).

Laissant à main gauche la rue qui descend droit dans la
ville et qui appartient au quartier du « Fondaq El Yhoudi »,
il faut, pour entrer dans « Zoqaq Er Romman », tourner à
droite, presque à angle droit, en longeant plusieurs
« zeraïb » (pluriel de zriba, parc à bétail) où habitent,
dans des huttes de roseaux (nouaïl), des Arabes Douï
Menia, qui gardent des troupeaux de vaches qui leur sont
confiés par des gens de Fès, les font paître dans la jour-
née, ou les envoient à la « doula » » selon la quantité de
1. Les medersas et l’instruction publique à Fès seront l’objet d’une
étude spéciale.

2. « Doula » le troupeau. Dans toutes les villes, le bétail appar-
tenant aux habitants est réuni en un ou plusieurs troupeaux, chacun sous
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ARCHIVES MAROCAINES

bétail qui leur est confiée. Il y a là six « zeraïb » dans
chaque « zeriba », environ trois ou quatre familles de Douï
Menia. Tous ces parcs à bétail sont à main droite, le côté
gauche est occupé par le derrière des maisons de la
« hauma » du Fondaq El Yhoudy. Après les « zeraïb »,
toujours à main droite, se trouve un pressoir à huile
(Ma’çral Ez Zit) appartenant aux Chorfa « Iraqyin », puis
une impasse avec une « zriba ».

On trouve ensuite une « rauda » où sont enterrés plu-
sieurs Chorfa Çqallyin et que l’on appelle zaouya, bien
qu’il n’y ait qu’un mur d’enceinte entourant le terrain où
sont les tombes. Deux personnages illustres sont enterrés
dans cette rauda

El Hadj Mohammed ben Abd Er Rahman El FilaliEl Mda-
ghri El Hasani El Alaouï, qui fut nommé qadi ed djemaa,
c’est-à-dire qadi des qadis, à Fès, le 7 safer 1274. Après
avoir été à la Mecque, il revint à Fès reprendre ses fonc-
tions et mourut le 27 ramadan 1299 (1881 de J.-C.). C’estle
dernier qadi portant le titre de qadi ed djemaa.
Moulay Ahmed ben Ahmed El Abbas ben Ahmed
ben Mohammed Eç Çqalli El Hoseïni, professeur aux
Qaraouyin était devenu fou pour avoir trop étudié, et des
choses qui dépassaient son intelligence il est resté
enfermé pendant sept ans avec une chaîne au cou. Revenu
à la raison, il est mort plusieurs années après, le 14 djou-
mada et tani 1304 (1886 de J.-C.).

Toujours à main droite, se trouve ensuite une rauda
d’une branche des Oulad Tazi, qui n’ont de commun que
la conduite d’un pâtre qui, moyennant une petite rétribution mensuelle
par tête de bétail, conduit ces animaux au pâturage, c’est ce que l’on
appelle « Ed Doula ». Seuls les propriétaires d’un grand nombre de bœufs
ou de vaches ont un pâtre particulier. Dans les « zeraïb » il n’y a guère que
des vaches dont le lait est partagé entre le propriétaire de ces animaux
et leurs gardiens.
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DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

ARCH. MAROC. 19

le nom et peut-être une parenté lointaine avec les «’l’ouaza»
dont l’un, Mohammed Cheikh est ministre des Finances; un
autre, Mohammed, estMohtaseb de Fès, et un autre enfin,
le fameux Hadj Omar, est Amin El Moustafad, Amin des
bâtiments et favori du Sultan. Ce sont de simples com-
merçants de Fès. Jusqu’à cet endroit, le côté gauche de
Zoqaq Er Romman est occupé par le derrière des maisons
du quartier du Fondaq El Yhoudi à partir d’ici, le côté gau-
che de la rue fait également partie de Zoqaq Er Romman.
Après la rauda des Oulad Tazi, toujours à droite, se
trouve Derb Sidi Jelloul. Au fond de cette impasse qui
s’appelait Derb Khalq Allah, ainsi qu’on l’a vu, est enterré,
dans la maison qu’il habitait, le cheikh El Ouali Çalih Sidi
Jelloul bel Hadj, qui s’appelait de son nom Abd El Djelil et
était originaire de Oulad Aïsa, dans le Gharb. C’était un
homme un peu fou il est mort le 17 choual 1036 ou 37, et
le Derb Khalq Allah a pris le nom de Derb Sidi Jelloul.
La maison de Sidi Jelloul est devenue une rauda où se
trouvent plusieurs tombeaux, entre autres celui de Sidi
Ahmed ben Hamdoun Chdid El Andalousi, des notables
de Fès, qui était un adepte de Moulay Mohammed, fils de
Moulay Abdallah Chérif, fondateur d’Ouezzan. Il reçut
son ouerd par l’intermédiaire d’un disciple de Moulay
Mohammed, Sidi El Hadj El Khyat Er Reqaï. Il fut égale-
ment le disciple de Moulay Et Tehami et de Moulay Et
Tayeb, tous deux fils de Moulay Mohammed ben Abdal-
lah. Il était nadhir des habous de Fès et enseignait « Er
Risala » aux Qaraouyin. Il est mort en 1170.

Dans une maison ruinée, voisine de la rauda de Sidi Jel-
loul, et appartenant à Sidi Mohammed ben Saïd Et Taheri,
se trouve le tombeau de Sidi Mohammed dit Bou Qoja,
des serviteurs de Moulay Et Tayeb El Ouazzani. Il est mort
au commencement de ramadan en 1201. On ne sait rien
;sur son origine.
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ARCHIVES MAROCAINES

Dans la même impasse, se trouvent trois « meçria »
louées généralement à des jeunes gens qui viennent s’y
divertir puis un jardin « arça » habité par des Chorfa
Alaouyin qui en sont propriétaires, ainsi que d’une écurie
contiguë. Ce jardin a une autre porte près du fondaq des
Oulad El Iladj Et Taher Bennani, c’est-à-dire plus loin, dans
l’intérieur du quartier, comme on le verra tout à l’heure.
En revenant dans la voie principale on trouve un pressoir
à huile appartenant à Si Feddoul Rami d’une famille
non chérifienne, dans laquelle est toujours choisi le
moqaddem de Moulay Idris. Un autre pressoir appartenant
aux Oulad El Mehdi Bennani, famille de commerçants, vient
ensuite, puis le tombeau de Sidi Haha dont on ne connaît
pas l’origine et qui aurait été un des trois garants (damen)
de Fès, sous le règne de Mohammed El Mehdi Es Saadi et
de son fils Abdallah El Ghaleb Billah. Les deux autres
garants étaient Sidi Jelloul et Sidi Mesaoud Ech Cherrat
(Es Salaouat El Anfas). Cet incident a trait aux difficultés
des sultans saadiens à Fès à la fin du dixième siècle de
l’hégire. Puis un fondaq appartenant à la famille El Mehdi
Bennani ce fondaq est à main gauche, en face du pressoir
à huile.

Après quelques maisons en ruine, on rencontre sur la
droite une fabrique de savon (dar eç çaboun) aux Oulad Bou
Ayad, ancienne famille Djebelienne de Fès et la rauda où
est enterré Sidi Hammou que l’on dit être Kerzazi et dont
l’origine, est inconnue ainsi que l’époque où il vivait.
Après cette rauda, un fondaq appartenant aux Habous et
connu sous le nom de Fondaq El Hababi ^LpJI. El Ha-
babi, originaire de Fès, était Bach Hammar, c’est-à-dire
chef des muletiers faisant les transports pour les commer-
çants entre les ports et Fès. On appelle ces muletiers
Hammar Souahili, c’est-à-dire muletiers qui font le trans-
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DESCRIPTION DE LA VILLIi DE FKS

port avec Es Sahel, le bord de la mer. Les fonctions de
Bach Hammar n’ont rien de commun avec celles de « Qaïd
El Hammara » tous deux sont nommés par le Sultan, par
lettre officielle, mais, tandis que le Qaïd El Hammara est
un véritable fonctionnaire du Makhzen ayant le comman-
dement de tous les muletiers du Sultan, le Bach Hammar
est une espèce de directeur des messageries, chargé de
l’organisation des caravanes. C’était autrefois à lui que
l’on s’adressait pour l’envoi et pour la réception des mar-
chandises. Il fixait les prix des transports, selon la saison
et les circonstances, établissait la responsabilité des mule-
tiers pour les avaries survenues aux marchandises en cours
de route, pour les retards, et tranchait également les difl’é-
rends entre muletiers.

Comme beaucoup d’anciennes institutions locales, celle
du Bach Hammar tombe en désuétude les voyageurs et
les commerçants traitent directement avec les muletiers,
ce qui ne laisse pas, d’ailleurs, que de créer souvent des
difficultés et des complications qui pourraient être évitées
en s’adressant au Bach Hammar. Les muletiers préfèrent
traiter directement avec leurs clients pour éviter de payer
le droit d’environ 5 p. 100 qu’ils doivent au Bach Hammar
et qui constitue d’ailleurs ses seuls appointements. Il est
arrivé pour cette institution ce qui s’est produit pour la
plupart d’entre elles l’usage abusif ‘et maladroit du
principe de la protection européenne, entre les mains de
personnes ignorant complètement ce qui constituait l’or-
ganisation du pays et niant même purement et simplement
que cette organisation pût exister, a créé des conflits
devant lesquels le gouvernement marocain, pour éviter des
ennuis, a cédé, en laissant sacrifier ses quelques institu-
tions qui, pour médiocres qu’elles pouvaient être, étaient
conformes à l’état du pays et préférables de toutes façons.
au désordre absolu qui les a remplacées.

Le Bach Hammar n’a, pour ainsi dire, plus aucune auto-
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ARCHIVES MAUOr.AlNES

rité, il est encore appelé, cependant, quelquefois, par le
gouverneur de Fès pour établir la responsabilité des mule-
tiers, conformément aux usages, déterminer exactement
leurs droits et leurs devoirs, tant pour le transport des
marchandises que vis-à-vis des voyageurs.

C’est au Bach Hammar également que s’adresse le
Makhzen pour les réquisitions des bêtes de charges qui lui
sont nécessaires pour assurer certains transports lorsque
les bêtes du Makhzen sont insuffisantes.

Le Bach Hammar ne siège plus aujourd’hui au Fondaq
El Hababi, qui a été vidé il y a quelques années pour y
loger des askars.

A sa mort, El Hababi a été remplacé par Bou ‘Arfa, mort
également et remplacé par le Chérif Ahmed Ech Cher-
qaouï Ed Debari qui, lors de l’établissement des askars au
Fondaq El Hababi, s’est installé au Fondaq El Meçlouhi
que l’on verra plus loin.

Après le Fondaq El Hababi, une écurie appartenant à Si
Mohammed Ould El Hadj Et Taher Eç Çammar El Fasi, un
petit fondaq des Habous des Qaraouyin, loué comme
écurie au Chérif Sidi Ahmed El Ouazzani et le fondaq El Me-
çloui, qui appartient aux Hahous de Moulay Idris et qui
tire sans doute son nom de ce qu’il a été donné à la zaouya
de Moulay Idris, par un homme originaire de Tameçlouht,
près de Marrakech.

Ce fondaq est exploité par le Bach Hammar Cherqaoug,
qui s’y tient habituellement. C’est un des plus grands
fondaqs de Fès, il peut contenir environ cent bêtes, et,
outre les chambres du fondaq même, il s’y trouve, à droite
en entrant, ce que l’on appelle une « douairya » (petite
maison) qui comprend douze petites chambres louées
aux muletiers ou aux étrangers de passage.

On trouve ensuite une rauda des Oulad Ed Djezouli où
sont enterrés les membres de cette famille, puis une
Vue 289 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FIÏS

rauda d’une branche des Chorfa Çqallyin et un pressoir
à huile « Maçrat ez zit » à la même famille.

Dans une petite ruelle, après ce pressoir à huile, se
trouve le tombeau du Chérif Sidi Mohammed ben Ahmed

El Baqqali, qui avait une réputation de sainteté et est
mort en 1298 de l’hégire. Dans la même impasse, un jar-
din sans habitation appartenant aux Chorfa Iraqyin, la
rauda des Oulad El Hadj Et Taher Bennani. En face
de cette rauda, dans cette impasse également une meçrya,
ou plus exactement une maison surélevée appartenant au
Chérif Moulay Idris ben Abd El Hadi El Alaouï, parent du
Sultan qui est un des plus riches propriétaires et possède
la plus belle bibliothèque de Fès. Cette maison, bâtie
au-dessus d’un pressoir à huile appartenant au même pro-
priétaire, se compose de six pièces, louées à différents
locataires.

En revenant dans la rue principale, on trouve à main
droite le fondaq des Oulad El Hadj Et Taher Bennani Ez z
Ziatni (de ziïoun, olives). Ce surnom de Ez Ziatni a été
donné à cette branche de la tribu des Bennani parce qu’ils
sont, de père en fils, fabriquants d’huile depuis’ plusieurs
générations. Ce fondaq est un des plus grands de Fès, il
contieht plus de cent bêtes et a soixante-cinq chambres
Vue 290 sur 510

AUUIIIVES MAROCAINES

au premier étage il y a également un grand nombre
de pièces au rez-de-chaussée, derrière les arcades qui
entourent le fondaq et où sont placées les bêtes. Les Oulad
El Hadj Et Taher exploitent eux-mêmes le fondaq, qui,
comme tout leur héritage, est resté indivis entre eux
c’est un cas qui se présente assez souvent à Fès, tantôt
pour éviter la dispersion des immeubles paternels, surtout
lorsqu’aucun des héritiers n’est assez riche pour racheter
les parts des autres et qu’il faudrait vendre à des étran-
gers, tantôt parce que tout ou partie des biens ont été
constitués en habous par le défunt, afin d’en empêcher la
vente et pour maintenir intacts les immeubles de la famille.
Ces immeubles se trouvent appartenir à plusieurs héri-
tiers dont le nombre augmente à chaque génération, de
telle façon que chacun finit par ne plus toucher qu’une
part insignifiante et que le partage des loyers, compliqué
par la présence d’héritiers à différents degrés ayant droit
chacun à des parts d’importance différente, donne lieu à
des discussions, qui se terminent souvent par de véritables
batailles et à des procès qui, eux, ne se terminent jamais.
L’héritage entier est représenté par 1 « mithqal » et le
partage de cet héritage se fait selon les subdivisions du
« mithqal » qui contient 10 onces, chaque once 4 mou-
zouna, chaque mouzouna 6 flous (au sing. fels), soit
240 flous pour 1 mithqal, ce qui permet de partager un
héritage en 240 parts et d’attribuer à chacun ce qui lui
revient en suivant les subdivisions du mithqal.
Tous les soirs, tous les héritiers du Hadj Et Taher
Bennani, ou leurs représentants, se rendent au fondaq
qui leur appartient et qui est gardé par un « guellas »
^yMf- qui perçoit les droits de fondaq. Les appointements
de ce gardien sont prélevés sur la somme totale et le
reste est partagé entre tous les héritiers. Pour les loyers
mensuels, les rentrées sont partagées tous les mois.
Vue 291 sur 510

nF.SC«ll>TION DE LA VILLE DE I’fe.S

A la porte de ce fondaq, sur la rue, se trouve une fon-
taine en mosaïque de faïence (zellij), ensuite une petite
mosquée sans minaret où se font les cinq prières régle-
mentaires. Il y a, dans les différentes rues de Fès, un grand
nombre de ces petites mosquées qui servent surtout à faire
les prières de la nuit, afin d’éviter aux fidèles l’obligation
de s’éloigner de chez eux. Toutes ces petites mosquées
ont un « imam » pour dire les prières et un moqaddem
pour balayer et entretenir la mosquée, tous deux choisis
parmi les habitants du quartier.

Quatre petites échoppes, moitié boutiques, moitié écu-
ries, appartenant aux Oulad El Hadj Et Taher et générale-
ment louées à des fabricants de « halas », sortes de bâts
spéciaux pour les mules et préférés par les gens de Fès et
par le Makhzen aux bâts ordinaires (bardaa). Le fondaq
des Oulad El Hadj Et Taher s’étend derrière ces quatre
échoppes jusqu’à un grand « Riad » qui leur appartient
également et dont l’entrée se trouve sur la voie principale
qui s’appelle, à cet endroit, « Ed Derb El Amer », la rue
habitée. Ce Riad a été bâti par El Hadj Et Taher Bennani
sur les instructions du fameux chérif d’Ouezzan, Sidi El
Hadj El Arbi, El Hadj Et Taher était un « khedim » dévoué.
Sidi El Hadj El Arbi, père de Sidi El Hadj Abd Es Salam El
Ouazzani, qui devint protégé français en 1884, n’avait pas
à Fès une maison convenable pour y descendre. Il lui
déplaisait, d’autre part, d’être toujours l’hôte du Sultan r.t
il préférait conserver son indépendance.

El Hadj Et Taher Bennani était propriétaire d’un pressoir
à huile qui existe encore, et d’un jardin dans une rue de
Zoqaq Er Romman, appelée « Ed Derb El Khali », la rue
inhabitée. Sidi El Hadj El Arbi lui ordonna de bâtir un
Riad dans ce jardin, en lui disant « S’il plaît à Dieu,
cette rue ne s’appellera plus Ed Derb El Khali, mais
Ed Derb El Amer » c’est en effet ce dernier nom qu’elle
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A UCIH VUS MAROCAINES

porte encore aujourd’hui. On ne saurait dire quels arran-
gements intervinrent entre le Chérif et son « khedim »
il est probable que, sans rien débourser lui-même, Sidi
El Hadj El Arbi fit contribuer à la construction du Riad
les Khouan de sa confrérie, si ce n’est en argent, au
moins en matériaux et en main-d’œuvre, et il ne serait
pas surprenant que cet immeuble eût été constitué en
hahous de la zaouya d’Ouezzan a de certaines conditions.
Quoi qu’il en soit, les héritiers d’El Hadj Et Taher lîen-
nani conservent la jouissance du Riad, mais les chorfa
d’Ouezzan, descendants de Sidi El Hadj El Arbi, qui vien-
nent à Fès, y descendent presque toujours.

En entrant dans le Riad, on a, en face de soi, une vaste
écurie, dont le premier étage est occupé par des ateliers
de tisserands et par des meçrias on y parvient par un
petit escalier dont la porte donne dans la rue. En lais-
sant à droite l’écurie, on trouve, dans l’intérieur du vesti-
bule, à main gauche une porte qui, par un long couloir
remontant à droite et longeant extérieurement l’écu-
rie, dans toute sa longueur, conduit au Riad, composé de
deux corps de bâtiments donnant sur une cour pavée
de mosaïque (zellij) et orné d’un bassin de marbre blanc
avec un jet d’eau. Le bâtiment situé à droite en entrant
se compose de trois grandes pièces au rez-de-chaussée
derrière une grande arcade, et au premier étage, de deux
grandes chambres adossées, dont l’une donne sur le Riad,
et dont l’autre a une vue superbe sur toute la ville
de Fès El Bali. Il s’y trouve, de plus, des cuisines et des
chambres de débarras. Le corps de bâtiment qui se trouve
à gauche, à angle droit avec le premier, ne comprend
qu’un rez-de-chaussée qui se compose de deux belles
pièces séparées par un large vestibule ouvert. En face de
ce corps de bâtiment, de l’autre côté de la cour dont on
a parlé, se trouve un jardin de même largeur que la
Vue 293 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

cour et qui s’étend jusqu’au mur du fondaq. Ce dernier
corps de bâtiment est de construction récente. A sa place
se trouvait autrefois un bâtiment d’un étage qui commu-
niquait avec le premier étage de l’autre corps de logis.
Un assez grand luxe avait été déployé dans ces cons-

tructions dont tous les plafonds étaient peints et dorés,
mais elles n’étaient pas d’une grande solidité et mena-
çaient ruine.

Après leur Riad, les Oulad El Hadj Et Taher ont un pres-
soir à huile qui lui est contigu. Ce pressoir (Ma’çerat Ez Zit)
est le type des pressoirs à olives de Fès qui sont des plus
primitifs, comme tous ceux employés au Maroc.
Le pressoir des Oulad El Hadj Et Taher se compose
d’abord d’une meule de pierre de 0 m. 80 de diamètre
environ, qui tourne verticalement dans un bassin en ma-
çonnerie, autour d’un axe en bois mis en mouvement
par une mule attelée à une traverse de bois qui passe
par-dessus la meule. Les olives sont jetées dans le bas-
sin et écrasées par la meule. La pâte ainsi obtenue
est placée dans des récipients en sparterie que l’on ap-
Vue 294 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

pelle en France « Scourtins », au Maroc « Cliamya »,
au pluriel « Chouamy » (ce nom de Chamya vient sans
doute de « Cham », la Palestine, d’où la fabrication de
l’huile aura été introduite au Maroc). Les « chouamy »,

remplis d’olives écrasées,
sont empilés les uns sur les
autres sous une presse à vis,
mue à la main par des le-
viers l’huile est recueillie
en dessous dans un vase.
Ces presses sont entière-
ment en bois, ainsi que le
pas de vis.

Le pressoir des Oulad El
Uaclj Et Taher contient une
meule et trois pressoirs.
Le bassin de la meule peut
contenir 40 « moudds »
d’olives, mais il faut plus
de trois jours pour écraser
cette quantité (40 moudds
équivalent environ à 15 hec-

tolitres d’olives). Le maître ouvrier de cette « macéra »
est un Hasani de la tribu des Ben Hasan, dans la mon-
tagne des environs de Tétouan.

La fabrication de l’huile est une spécialité des Béni
Hasan, et tous les maîtres ouvriers des « macéras »
de Fès viennent de cette tribu. Outre le ma’allem Hasani,
on emploie trois ou quatre ouvriers ou manœuvres.
Au point de vue commercial, voici comment procèdent
à Fès les propriétaires de « macéra ». Si ce proprié-
taire a des capitaux suffisants ou des olives lui apparte-
nant, il fait de l’huile et la vend comme bon lui semble
si, au contraire, ce qui est le cas le plus fréquent, il n’a
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DESCRIPTION D1C LA VILLIi DE Il’iS

pas les fonds nécessaires et ne possède pas d’oliviers, il
emprunte à un capitaliste l’argent dont il a besoin, et ce
capitaliste devient son associé pour l’exploitation de son
pressoir il est établi un acte d’adoul de la convention
intervenue entre eux. Avec cet argent, le propriétaire
du pressoir achète sur arbre des olives, dont il fait la
récolte il emmagasine cette récolte et envoie au bailleur
de fonds, son associé, une déclaration écrite (nechira) de
la quantité de moudds d’olives emmagasinés par lui.
L’huile faite et placée dans des jarres ou dans des réser-
voirs, le propriétaire du moulin se rend au Fondaq El
Qa’a où se vend l’huile, et l’amin de ce fondaq, suivant
les demandes qui lui en sont faites par des acheteurs, lui
dit qu’il lui faut tant de qollas d’huile (la qolla d’huile est
de 30 litres). Le propriétaire du pressoir envoie à son
ma’allem un ordre écrit d’expédier au Fondaq El Qa’a la
quantité de qollas d’huile demandée par l’amin, qui la
livre aux acheteurs, se paye et envoie l’argent au bailleur
de fonds qui lui donne des reçus des sommes touchées
les reçus sont remis par l’amin au propriétaire du pres-
soir qui les garde par devers lui. Lorsque toute l’huile
est vendue, le propriétaire du pressoir, en mettant ces
reçus en face des ordres écrits qu’il a envoyés à son
ma’allem pour la livraison de l’huile à l’amin du Fondaq
El Qa’a, contrôle ce qui a été vendu et combien. Le bail-
leur de fonds, qui a reçu tout l’argent de la vente de l’huile,
commence par reprendre son capital et le surplus est par-
tagé entre les deux associés, défalcation faite des frais de
main-d’œuvre et autres. L’année dernière, le pressoir des
Oulad El Hadj Et Taher Bennani a laissé un bénéfice net
de 1.000 douros, dont 500 pour leur bailleur de fonds et
500 pour eux.

En face de ce pressoir, la maison du ma’allem Idris El
Bradai (fabricant de barda).

A côté du pressoir à huile des Oulad El Hadj Et Taher
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ARCE1IYKS MAIiOCAINKS

Beunaui, ou voit, dans un jardin, le tombeau de Lalla
Mennana El Mejdoubya. On ne sait pas à quelle époque
vivait cette chérifa. L’enclos où se trouve son tombeau
sert de cimetière aux Oulad El Mejdoub, descendants de
Abou Zeid Abd Er Rahman Ed Doukkali El Farji, dit « El
Mejdoub ». Plus loin, toujours sur la droite de la rue, une
meçrya et des ateliers de tisserands, appartenant aux
Oulad Çefeïra ^f^>.

En face, un four à plâtre (Kouchat El Guebs) appartenant
à El Hadj Mohammed Bou Médian qui l’exploite. Les
fours à plâtre ne payent pas d’impôt, mais, par contre, si le
Makhzen a besoin de plâtre, il envoie purement et simple-
ment des Mokhaznia, qui font emporter, d’autorité, la
quantité nécessaire de plâtre qui est payée ensuite à moi-
tié prix du cours.

En continuant, sur la gauche de la rue, on trouve un
pressoir à huile, appelé El Macéra El Oustya, « le pressoir
du milieu », appartenant aux habous des Qaraouyin, et qui
se loue par année; puis un autre pressoir, connu sous le
nom de « El Macéra Et Touila », le pressoir long, aux
habous des Qaraouyin, loué également à l’année.
A main droite, le jardin (Arça) des Oulad Chlyah
^-jLS, chorfa de la descendance de Sidi Hamza. Au mi-
lieu de ce jardin, se trouve la qoubba de Sidi El Hadj
Ahmed El Khotzi Es Sefiani, de la famille du qaïd
Ibrahim Es Sefiani. Ce personnage est connu sous le
nom de Sidi El Hadj El Ajali (J«*N de J&&, dont l’exé-
cution est prompte, sans doute parce que les demandes
qui lui sont faites sont promptement exécutées, ne restent
pas sans résultat. C’était un halluciné, un peu fou, qui pré-
disait l’avenir. Il est mort le 10 djoumada ettani 1092 de
l’hégire (Es Salaoual El Anfas\.

Après ce jardin, une « macera » appartenant aux Oulad
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DliSCrtll’TION Illi LA VILLE DE I”ÈS

Çefeira, qui la louent, puis un jardin « area », aux habous
des Qaraouyin. Ce jardin n’est pas loué, mais exploité par
les nadhirs de la mosquée qui en vendent les produits au
profit des habous. C’est ici la fin du quartier de Zoqaq
Er Romman, dans cette direction. Quelques pas après une
arcade qui se ferme par une porte, on entre dans le quar-
tier Haumat Aïn Asliten. Pour continuer le quartier de
Zoqaq Er Romman il faut revenir en arrière jusqu’au fon-
daq des Oulad El Hadj Et Taher Bennani. En face de ce
fondaq, à main droite en venant de Bab El Guisa, se
trouve une rue en pente, très mal pavée, d’un abord diffi-
cile, c’est « Derb Bou Krim » qui pénètre dans la hauma
de Zoqaq Er Romman. En entrant dans le Derb Bou Krim,
à main gauche, se trouvent deux maisons et une meçria
en face desquelles s’ouvre une impasse dite Derb El
Hannach ^llsJl, sans doute à cause de quelque Aïsaouï
montreur de serpents qui y habitait; dans la même im-
passe, quatre maisons et une écurie au coin de la rue Bou
Krim; à droite, dans cette rue, une grande et belle mai-
son appartenant aux Oulad Djeroudi (de Gueroua ?). Con-
tiguë à cette maison, l’impasse qui s’appelait autrefois
« Derb El Mernisi », et qui s’appelle aujourd’hui « Derb
Sidi Abdallah Yazrour » parce que ce personnage y est
enterré.

Sidi El Hadj Abdallah ben Mohammed Yazrour jjj Jj
de la famille des Oulad Yazrour El Lemtyin, de Fès, était,
de son vivant, tisserand de haïks et de ceintures de laine.
Après avoir été à la Mecque, en pèlerinage, il s’arrêta
pendant plusieurs années à Tunis, puis revint à Fès. Il
semble que son pèlerinage lui ait troublé l’esprit, car, à
son retour, au lieu de reprendre son métier de tisserand,
il allait dans la montagne chercher du bois et des feuilles
de palmier, fabriquait des balais, entrait chez Moulay Idris
et aux Qaraouyin aux heures des prières, et les troublait
Vue 298 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

de ses imprécations. Il élait néanmoins, ou à cause même
de son extravagance, l’objet d’un profond respect de la
part de ses contemporains qui le considéraient comme un
illuminé. Il est mort le vendredi, jour d’Arafa, le 9 de
dou el hijja 1199, et a été enterré dans sa maison du
Derb El Mernisi, Hauma de Zoqaq Er Romman (Es
Salaouat El Anfas).

Dans la même impasse, se trouvent dix-huit maisons et
deux ateliers de tisserands au coin de l’impasse de Sidi
Yazrour et de Derb Bou Krim, une petite mosquée de
quartier avec minaret où se disent les cinq prières.
En face de cette mosquée, une impasse où se trouvent
trois maisons, et, au coin de cette impasse et de la rue Bou
Krim, une petite école de Qoran au premier étage. Plus
bas dans la rue Bou Krim, une autre impasse avec deux
maisons et, dans la rue principale, la maison du Chérif
Akhemrich.

Les Oulad Akhemrich ont une Zaouya, où se trouve le
tombeau d’un de leurs ancêtres, Sidi Ahmed Akhemrich,
dans la tribu des Çenhadja-t-Reddou 1. Les Oulad Akhem-
rich de Fès sont des gens très aisés, mais qui ont conservé
les allures et le costume de leurs montagnes. Quoique éle- 1
vés à Fès, ils continuent à parler entre eux le langage du
Rif.

On trouve ensuite l’impasse « Derb Sidi Chahed El
Ouazzani, où ce chérif possède deux maisons et une écu-
rie, puis une autre impasse dite « Derb Miko jSZ», du nom
d’une famille de Fès, où se trouvent quatre maisons, une
écurie et deux ateliers de tisserands.

1. Mouliéras, Maroc inconnu, p. 143. La Djebala ».
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DESCII1PTION DE LA VILLE DE FÈS

En revenant dans le Derb Bou Krim, on trouve trois
écuries, et, sur la gauche, une impasse dite Derb ElKatib,
au coin de laquelle se trouve une petite mosquée sans
minaret, où se disent les cinq prières, et appelée « Djama
ElKatib ». Le Derb ElKatib, qui contient treize maisons,
appartient en entier à Si Mohammed Cheikh Et Tazi, mi-
nistre des Finances. Le Derb El Katib, après une quin-
zaine de mètres, fait, à angle droit, un coude à gauche et
se prolonge pendant 25 mètres environ. Au fond de l’im-
passe bordée par treize maisons s’ouvre la porte du palais
que s’était fait construire, sous le règne de Moulay El
Hasan, Si Mohammed Eç Çar’ir Ed Djamaï, alors ministre
de la Guerre. Arrêté par Ba Ahmed, à Mequinès, au com-
mencement du règne de Moulay Ahd El Aziz, il a été
envoyé prisonnier à Tétouan, et y est encore. Cette maison
avait été terminée au commencementde 1889, elle a été sai-
sie par le Makhzen et achetée il y a quelques années par le
Cheikh Et Tazi ainsi que les douze autres maisons du Derb
El Katib. Par derrière, cette grande maison remonte jus-
qu’à la voie principale de Zoqaq Er Romman, et ses murs
forment, sur une étendue assez longue, le côté gauche de
cette voie. La porte qui se trouve au fond de l’impasse
« Derb El Katib » n’est qu’une porte de dégagement de la
maison. Si Mohammed Eç Çar’ir s’en servait pour échap-
per aux importuns qui l’attendaient à la sortie à la porte
principale de cette maison, qui est dans le quartier de
« Fondaq El Yhoudi ».

En face du Derb El Katib se trouve une autre impasse
avec huit maisons. En suivant la voie principale, Derb
Bou Krim, on trouve, à main gauche, une maison et une
meçria habitée par des « zerzaïa », portefaix, puis une
impasse, appelée El Ousaa, où il y a six maisons et deux
écuries.
Vue 300 sur 510

ARCHIVES MAHOCAINES

Dans la rue principale, on trouve ensuite la maison d’El
Jay (El Jay est un vieux taleb de la tribu de Jaya), ensuite
une impasse avec six maisons, dont une au ministre des
Finances. Au coin de cette impasse et de la rue Bou Krim,
un four à pain aux habous des Qaraouyin. En face de ce
four se trouve une autre impasse appelée Derb El Ban (saule
d’Egypte jUl), qui contient quinze maisons, quatre écu-
ries, deux meçrias, et un mesdjid d’instruction qoranique
pour les enfants. Il s’y trouve, de plus, une petite mosquée
de quartier appelée Djama El Ban.

A cet endroit, le Derb Bou Krim arrive à un carrefour
où se rencontrent quatre rues la première « Derb Bou
Krim », que l’on vient de parcourir; à gauche, la deuxième,
« Bou Oqda »; en face, la troisième, « ‘Aïn El Khil », qui
conduit à Aïn Allou, et à droite, enfin, la quatrième
« Derb En Nouaryin », qui conduit à « El Qbib En Naqeç ».
Ce carrefour est connu sous le nom de « Souïqat Aïn El
Khil (le petit marché de la fontaine aux chevaux).
En prenant la première de ces rues, celle de gauche
« Derb Bou Oqba », on rencontre d’abord la maison de
« El Mandari ».

D’après l’opinion publique, ces « Mandaryin » seraient
« morabitin » et descendants de Sidi El Mandari, enterré
à Tétouan. Sidi El Mandari est, en effet, le patron de la
ville de Tétouan. Es Salaouat El An fas parle d’un Hadj
Mohammed El Mandri ou El Mandari, illuminé et un
peu fou, mort en 1213, et enterré dans le Derb Er Roum
dans Zoqaq El Hajar, « qui était de la famille des Oulad El
Mandari, qui habitent Fès ». On trouve également ce nom
à Rabat, où les indigènes le prononcent El Mendri (1);
(1) Cf. Arch. mar., vol. VII. Rabat, description topographique.’
Vue 301 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

ARCII. MAROC. 20

puis une maison appartenant à un Ben Chekroun, une
autre appartenant aux Cheraqa, un moulin appartenant
aux chorfa d’Ouezzan à droite, en face la porte de la grande
maison du qaïd Ali Er Rachedi Ed Djamaï. Cette maison
s’étend par-dessus la rue que nous suivons, et on parvient
à l’endroit où la rue passe sous la maison liachedi par une
pente très rapide. Après la grande maison, à main gauche
également, on trouve une autre maison du Racliedi, plus
petite. La voie, dans la partie sur laquelle passe la maison
Rachedi, fait un coude sur la gauche et, en sortant de ce
passage couvert, se partage en deux; dans la rue qui con-
tinue en ligne droite, on trouve la maison de El Fedouî
Et Tlemsani, celle de Sid El Hafid El Amrani ces deux
maisons à main gauche, du même côté que la porte de la
maison Rachedi. En face, vers la droite, un msid pour
l’enseignement du Qoran une mosquée, pour les cinq
prières, sans minaret; trois écuries et un atelier de menui-
sier. Au haut de la rue, à gauche, deux maisons, et des
deux côtés, une dizaine de boutiques où l’on vend de
l’huile, du beurre, du miel et de l’épicerie.

Les deux dernières de ces boutiques sont l’une en face
de l’autre sous une voûte qui termine Bou Oqda dans
cette direction et où s’arrête le quartier de Zoqaq Er liom-
man. De l’autre côté de cette voûte, après avoir coupé la
grande artère de EtTala1 a au-dessus de Ras EtTialin, la
rue continue vers Souïqet Ben Safi.

L’autre artère de Bou Oqda tourne sur la droite après
le passage sous la maison Rachedi.

Cette maison a été bâtie par le qaïd Ali Er Rachedi, de
la tribu Makhzen des Oulad Djama, entre Fès et le Sebou,
qui avait été nommé gouverneur de Fès à la mort du
qaïd Bou Chta bel Bar’datli, également Djamaï. Il avait
pris comme khalifa son (ils, Ahmed, mais avait été obligé
de le destituer, sur les plaintes répétées des habitants de
Vue 302 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

Fès contre les abus de ce fonctionnaire. Despote et mala-
droit, le qaïd Ali fut enveloppé dans la disgrâce qui frappa
tous les Djama’iyîn, après la mort de Moulay El Hasan,
au commencement de la régence de Ba Ahmed, et des-
titué pour être remplacé par le qaïd Idris Bel Allam,
Boukhari, qui était également Qaïd El Mechouar. Quelques
années après, le qaïd Ali Er Rachedi obtint, moyennant
finances, le gouvernement de Larache, mais devant les
plaintes répétées des habitants de cette ville, il fut déplacé
et nommé à Rabat.

Déjà malade, il mourut en route, entre ces deux villes.
Un peu plus tard, après un intérim fait par un des ou-
mana de la douane, il fut remplacé à Larache, par son fils
Ahmed, qui vint occuper son poste accompagné de son
frère, connu sous le nom de « Bacha Abdallah ». Cet indi-
vidu, fils du qaïd Ali et d’une négresse esclave, s’était vu
refuser, par les agents du Makhzen chargés de régler la
succession du qaïd Er Rachedi, la situation de fils de ce
qaïd et avait été emprisonné comme étant simplement un
esclave du feu gouverneur et devenu, de ce fait, propriété
du Makhzen. Son frère Ahmed finit, en payant, par le
sortir de cette pénible situation. Le qaïd Ahmed Er Rachedi
reprit à Larache les errements de son père. Ses abus et
ceux du fameux « Bacha Abdallah » finirent par le faire
destituer. Il fut remplacé à Larache par le qaïd Abd El Qa-
der El Khalkhali, tué plus tard à Azila et dont le fils aîné,
Mohammed, vient de mourir à Ktama, en Ehl Sérif, après
s’être enfui de Marrakech, où il était interné.

Si Ahmed Er Rachedi, après être resté sans fonctions
pendant plusieurs années, vient d’être nommé, il y a peu
de temps, -amin « Allaf » des muletiers du Sultan, ce qui
lui permet de faire, sur la nourriture des mules du Makh-
zen, quelques bénéfices illicites. Il habite sa maison avec
le « Bacha Abdallah » et leurs familles.
Vue 303 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

En passant à droite, après avoir passé sous la maison
Rachedi, on trouve, en face de cette maison, à gauche,
une impasse dite « Derb Ez Zouyyar », où se trouvent douze
maisons, puis cinq maisons entre cette impasse et une
autre appelée « Derb Qetchana », sur la droite, où se
trouve un four appartenant aux habous de Moulay Idris,
un riad à Sidi Ahmed ben Et Taher, « Allaf » du Makhzen,
seize maisons dont trois à des chorfa d’Ouezzan, quatre
écuries, leur appartenant également, ainsi que trois mou-
lins à eau, aux mêmes propriétaires. Plus haut que le
Derb Qetchana, sur la droite, une autre impasse dite « Derb
El Mqaous » (en forme d’arc), huit maisons, dont sept aux
chorfa d’Ouezzan, un jardin hahous des Qaraouyin, entre
les mains des mêmes chorfa d’Ouezzan, puis la mosquée
de Sidi El Mtarfi, où se font les cinq prières. En revenant
dans l’artère principale, une maison appartenant aux chorfa
Souhama d’Ouezzan, et connue sous le nom de Dar El
Bourdj. Près de cette maison, une fontaine dite « Seqqaïet
Ed Demnati » et le tombeau de Sidi Abd Er Rahman El
Filali, savant, mort en 1029 de l’hégire. En face de
Seqqaïet Ed Demnati se trouve la maison de Ben Ito
Ed Djamaï, le propriétaire de la ferme connue sous le
nom de « Nzala » de Ben Ito, à quatre heures de Fès au
nord par Aqbat El Mesajin. Deux moulins appartenant
aux chorfa d’Ouezzan et dans une rue dite « Derh Et I
Fouah », (lui communique avec la grande artère de Tala’a
qui porte à cet endroit le nom de « Ech Chrablyin », le
tombeau de Sidi Khiar. A partir de cet endroit, la voie
principale entre dans le quartier de « Aïn Asliten ». En
revenant au carrefour de Es Souïqat, on trouve, en face, le
«Derb BouKrim», et, en laissant à main gauche « Bou
Oqda », que l’on vient de parcourir, la rue de « Aïn El
Khil » (la source aux chevaux). En entrant dans Aïn El
Khil, on se trouve sur une petite place; à main gauche,
une maison dite Dar Bennis, du nom de son propriétaire.
Vue 304 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

Au rez-de-chaussée de cette maison se trouve un « msid »
(petite pièce donnant sur la rue, sans communication avec
la maison), où siège le moqaddem el hauma du quartier
de Zoqaq Er Roinman il s’appelle actuellement Sidi Abd El
Kebir ben Mohammed ben Masan; c’est un Chérit’ Alaouù
A côté de Dar Hennis, une fontaine, c’est Aïn El Khil,
puis trois écuries, une petite mosquée des cinq prières,
avec minaret on l’appelle Ed Djamaï d’Ain El Khil.
Après la mosquée, un « msid » où l’on enseigne le Qoran
aux enfants, puis une impasse où se trouvent quatre mai-
sons appartenant à des chorfa Iraqyin, et habitées par eux.
A droite, une autre impasse, appelée « DerbElAqita »
(la petite montée) où se trouvent dix maisons et une
« meçria ». Sur la voie principale, à gauche, on trouve
une maison appartenant à une branche de la famille Ben
Jelloul, et une autre appelée Dar Es Slaouï. En face de ces
deux maisons, à main droite, se trouvent deux moulins
qui offrent une particularité assez singulière et unique à
Fès. Ce sont deux moulins hydrauliques, à blé, qui sont
placés l’un sur l’autre, c’est-à-dire que l’un est au rez-de.
chaussée et l’autre au premier étage, au-dessus. Ces deux,
moulins sont indépendants l’un de l’autre et sont mis en
mouvement chacun par un cours d’eau différent. Celui
d’en bas est actionné par un bras de la rivière qui coule
au niveau de la rue; celui du premier étage est mû par un
autre bras de la rivière, qui, grâce aux différences de
niveau du sol, se trouve arriver par en haut. Ce moulin
suspendu est le seul de ce genre à Fès. Après ces deux
moulins, sur la gauche, une impasse où se trouvent un
atelier et une écurie transformée en atelier. Dans ces deux
ateliers, on tisse des foulards de soie. En face, à droite,
sur la voie principale, une maison dite Dar Bel Ghazi, puis
six boutiques, un four appartenant aux habous des Qaraou-
yin et une boutique de barbier. Sur la gauche, une im-.
passe où se trouvent trois maisons.
Vue 305 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

La rue de Ain El Khil débouche ensuite sur la grande
voie qui, partant de J5ab El Mahrouq, pénètre dans le
centre de la ville jusqu’à la mosquée des Qaraouvin. Cette
grande artère porte successivement les noms de Tala’a,
Ech Chrablyin, Et Terrafin, Ras Et Tialin, Aïn Allou et El
Attarin. La rue de Aïn El Khil tombe dans Ain Allou,
ou plus exactement « Aïn Alloun » ôjk- (V- c’est-à-dire
source d’ Alloun. Du temps de Moulay Tdris cette source
était au milieu d’une forèt épaisse remplie d’animaux sau-
vages il y vivait un bandit nommé Alloun que Moulay
Idris fit arrêter et mettre à mort. La source près de laquelle
il habitait garda son nom. Cette source existe encore et
se trouve dans la mosquée « Es Sania », qui est à main
droite, dans la grande rue de Aïn Alloun en venant de
El Attarin, et qui donne à la fois dans cette grande rue,
dans le Derb Eljouaïn, et dans une impasse donnant dans
Aïn Alloun, et qui s’appelle « Derb El Hammam ». La
porte de la mosquée est dans cette impasse, son « mihrab »
est dans Aïn Alloun. C’est une mosquée des cinq prières,
avec un minaret. Dans le Derb El Hammam se trouvent un
petit fondaq où l’on vend du fer, un « hammam » apparte-
nant aux habous des Qaraouyin, et appelé « Hammam Aïn
Alloun », une maison appartenant à Loudeïni ben Kiran,
celle d’El Hadj Mohammed ben Kiran, naclliir des Qaraou-
yin et une autre appartenant à son frère, ainsi qu’une meç-
ria et trois écuries occupées par des ateliers de tisserands,
au même propriétaire. Il s’y trouve également la maison
de Si Mohammed Cheddan, marchand de selles, et celle
d’un boucher nommé Tazi.

En face du mihrab de la mosquée de Es Sania, dans la
rue de Aïn Alloun, se trouve la porte d’une autre mosquée
appelée Djama Aïn Allou, qui s’étend par derrière jus-
qu’aux « Nejjarin » (les menuisiers) au-dessous de cette
mosquée et la longeant, passe « Derb El Bellajin » (les
Vue 306 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

fabricants de serrures en bois qui s’appellent « farkha »,
au pluriel « i’rakhi »). Ils fabriquent également les « qba-
qeb » au singulier « qabqab », sortes de patins en bois,
élevés sur le sol de 3 ou 4 centimètres et dont se servent
les habitants de Fès pour marcher dans la boue. La mos-
quée de Aïn Allou, est élevée de quelques marches au-
dessus du niveau de la rue et par derrière, du côté des
« Nejjarin » se trouve bâtie sur les boutiques du rez-de-
chaussée occupée par les « Bellajin ». C’est dans Derb El
Bellajin que se trouve la porte du « metaher » (lieux d’ai-
sances) de cette mosquée (on sait que toutes les mosquées
en sont pourvues). Ceux-ci se trouvent au rez-de-chaussée
et communiquent par un escalier à la mosquée elle-même,
qui est au-dessus. Les « metaher » de Djama Aïn Alloun
présentent cette particularité, unique à Fès et peut-être
au Maroc tout entier, que les Juifs peuvent y pénétrer.
Les deux cabinets voisins de la porte leur sont réservés.
Le nom de « Aïn Alloun » date donc de la fondation
de la ville, et s’appliquait autrefois à toute la partie de Fès
située sur la rive droite de l’Oued, et qui a pris plus tard
le nom de Adouat El Qaraouyin2.

« Fès est divisée en trois, ou plutôt ce sont trois villes
« assemblées en une et qui portent le mesme nom et ont
« été basties en divers tems. La plus ancienne est celle de
« Beleyde, qui est au levant du fleuve (Adouat El Anda-
« lous). L’autre, qu’on nomme la vieille Fez, autrement
1. Qabqab. Après sont ceux qui font les mules que portent les gen-
tilshommes quand il y a des fanges dans la cité
Elles sont faites coutumièrement de boys de mûrier blanc et noir,
il y en a aussi de noyer et boys de jujutes, qui sont plus propres et
jolies que les autres, mais celles de mûrier sont plus durables » (Léon
l’Africain, t. II, p. 105).

« Tout auprès sont les faiseurs de galoches et de sandales de marque-
terie couvertes de cuir ou de soye, que les habitants ont coutume de
porter quand il pleut ou qu’il fait sale. Et il y en a de si chères qu’elles
valent dix ou douze écus ̃> (Marmol, t. lI, liv. IV, p. 1<>T).
2. C’est au sommet de la colline d’Aïn Alloun que Moulay Idris éleva
la première porte de la ville, qu’il nomma « Bab Ifriqya
Vue 307 sur 510

DESCHIPTION DE LA VILLE DE FÈS

« A’in Alu, est au couchant du fleuve (Adouat El Qaraou-
« yin). La troisième ville est le nouveau Fez, etc. »
Aujourd’hui le nom d’Aïn Alloun n’est plus porté que
par la fraction de la grande artère allant de Bab El Mah-
rouq à El Qaraouyin, entre Ras EtTialinetEl Attarin; elle
comprend les quelques impasses qui s’y ouvrent. Ou
l’appelle « Souq Aïn Alloun ». A Fès ce mot de Souq ne
doit pas être pris généralement dans le sens de marché,
mais dans celui de rue marchande. Il n’est pris dans le
sens de marché que pour le « Souq El Khemis » qui se
tient tous les jeudis et tous les lundis en dehors de Bab El
Mahrouq.

Le « Souq » de Aïn Alloun comprend environ soixante-
cinq boutiques. C’est de ce Souq que parle Léon l’Africain,
dans sa description des boutiques de Fès, lorsqu’il in-
dique la rue qui va « depuis le temple (la mosquée des
« Qaraouyin) jusqu’à la porte oit l’on va à Mecrase (Bab
« El Mahrouq) ». Marmol en parle également: « II y a une
« autre rue, qui commence à la porte du couchant de la
« grande mosquée et va se rendre à la porte de la ville
« par où l’on va au nouveau Fez. »

Dans les boutiques du haut, vers Ras Et Tialin se trou-
vent les boutiques des marchands qui vendent du fer et de
l’acier en barres, ainsi que des objets de fer manufacturés
tels que anneaux, verrous, clous, charnières, gonds,
marteaux de portes, chaînes, grilles, etc., presque tous de
fabrication indigène. A gauche de ce « Souq », en venant
du côté de El Attarin, se trouve une petite place appelée
« Fenidaq El Hadid » (le petit fondaq du fer), quoiqu’il
n’y ait en réalité aucun fondaq. Cette petite place est en-
tourée d’une dizaine de petits ateliers. Ceux de droite
sont occupés par des forgerons « Haddada », qui fabri-
quent des clous, des chaînes, des verrous, des marteaux
1. Makmol, trad. P. d’Ablancourt, t. II. liv. IV, chap. XXII, p. 157.
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ARCHIVES MAROCAINES

de portes, des gonds, des grilles pour les fenêtres ou
pour placer dans le haut des cours intérieures, afin d’em-
pêcher les voleurs de pouvoir y descendre par les ter-
rasses. Ces forgerons brisent également le fer et l’acier
des marchands pour leur permettre de le vendre. Les
ateliers de gauche sont occupés par des ouvriers qui
remettent à neuf et polissent les élriers, les lames de
sabres et de poignards, les fourreaux, les poignées. Ils
ne font pas de neuf. Pour les étriers, par exemple, étriers
argentés de selles ou de serijas (selles de mule) ou étriers
dorés de selles (les selles de mules n’ont jamais d’étriers
dorés), ces ouvriers refont les filigranes dont ils sont in-
crustés, les réajustent ou les redorent de même pour les
poignées de sabre ou de poignards.

Les mêmes marchands de fer et d’objets de fer, de Aïn
Alloun, vendent également du goudron (El Latoukh et El
Qitran) que l’on appelle « El Biad », le Blanc, par euphé-
misme et pour éviter de prononcer un nom éveillant l’idée
d’une chose désagréable à voir et à sentir.

Ils vendent également de vieux étriers, de vieux mors,
de vieux sabres et de vieux poignards. Tous les jours, à
partir de 1″« Açer » dans l’après-midi, il y a, à cet endroit,
une vente aux enchères (delala) de vieux sabres, étriers, etc.
Ces objets d’occasion sont achetés par quiconque veut
surenchérir, et par les gens des boutiques qui les reven-
dent ensuite de gré à gré.

Un peu plus bas, dans le Souq d’Aïn Alloun vers El
Attarin on trouve, des deux côtés, des boutiques de mar-
chands de sacoches _/j£ï, au singulier IJS3,. Ces mar-
chands s’appellent «Ghkaïria»i ^1^2 Ils ne vendent abso-
lument que des sacoches de cuir « Chekara ». C’est la sa-
coche portée par la plupart des Marocains et qui leur tient
lieu de poches que leurs vêtements ne comportent pas.
Celles fabriquées à Marrakech sont réputées préférables
Vue 309 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FUS

fl celles fabriquées à Fès, mais cette dernière fabrication
est cependant la plus répandue.

Dans les boutiques d’Ain Alloun, on vend surtout les
sacoches fabriquées à Fès, mais on y trouve également de
celles de Marrakech et même du Djebala, à longues franges
de cuir, et à une quantité de petites poches à secrets, qui
sont vendues aux enchères, comme on le verra plus loin.
Ces marchands vendent également des sacs à poudre
« Chekaïr El Baroud » qui ont une forme spéciale la par-
tie qui se rabat, au lieu de n’avoir que 7 ou 8 centi-
mètres et de se composer simplement du haut de la sa-
coche, repliée, se compose d’un rabat simple, mais de la
même dimension que la sacoche elle-même, qu’elle
recouvre complètement ces mêmes marchands ven-
dent également des petits sacs pour le « Kif » appelés
Metouy i£jb* qui sont souvent très joliment brodés de
soie de couleurs varices, des porte-monnaie « Beztam »
j»Ua^, brodés d’or et de soie, se fermant soit par une ganse
de soie et une petite olive, soit au moyen d’une agrafe de
cuivre à ressort (ces agrafes sont également fabriquées à
Fès), des étuis à pistolets brodés d’or et de soie et d’autres
de forme européenne, mais aussi fabriqués à Fès.
A l’« Acer », tous les jours il y a vente aux enchères au
Souq EchChkaïria de tous ces objets, neufs et d’occasion.
Les objets neufs sont mis aux enchères à la pièce, par les
ouvriers qui les fabriquent les objets d’occasion sont
remis au « Déliai » par la personne qui les vend.
La vente est publique et peuvent acheter, non seule-
ment les marchands des boutiques, mais tous ceux à qui
un objet convient.

Entre les boutiques de « Chkaïria et El Attarin, dans
le bas du Souq d’Ain Alloun, se trouvent quelques bou-
tiques où l’on vend du sucre, du thé, des épices, du tabac,
des cigarettes et des allumettes.
Vue 310 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

En partant de El Attarin dans Aïn Alloun, on trouve, i
main gauche, à la limite des deux souqs une rue mar-
chande où se trouvent des boutiques de faïence de Fès et
des marchands de petite quincaillerie et de verrerie dans
cette rue appelée Derb El Qechchacha, à gauche, à une
dizaine de mètres, une porte qui donne sur une petite
place appelée Tasi Sidi Frej ̃r^ i£-V” (.s*
Le bâtiment connu sous le nom de Sidi Frej et qui se
trouve au fond de cette petite place, est en même temps
un hospice d’aliénés et le lieu de détention des femmes.
Les aliénés sont au rez-de-chaussée et les femmes empri-
sonnées au premier étage.

D’aprèsEs SalaouatElAnfas, voici quelle serait l’origine
du nom de Sidi Frej « Près du Souq El Attarin et du
« Souq El Henna, se trouve l’endroit où sont les gens qui
« ont l’esprit malade, les fous. Cet endroit est désigné
« par le nom de Sidi Frej quoiqu’il n’y ait là aucun person-
« nage interné portant ce nom, ni aucun tombeau. Cette
maison a été bâtie par un Sultan pour y réunir les Mu-
« sulmans malades et n’ayant pas de refuges, et on lui a
« donné le nom de Bab El Faradj -rjA\ (la porte du
« soulagement, parce que les malades y trouvent un sou-
« lagement à leurs maux. Beaucoup de personnes ont
« constitué des habous dont les revenus sont affectés aux
« dépenses de cet établissement. »

Léon l’Africain, après avoir raconté qu’il y avait eu plu-
sieurs hôpitaux à Fès, mais que le « roy se trouvant fort
« nécessiteux d’argent, les possessions qui dépendoyent
« de ces hôpitaux furent vendues avec les rentes et n’en
« y a qu’un seul pour subvenir et servir aux pauvres
« malades » ajoute « En cet hôpital’ il y a quelques
« chambres expressément ordonnées pour les folz, c’est
« à savoir pour ceux qui ruent les pierres parmi les rues
Vue 311 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

« et font autres actes scandaleux, là où ils sont enchaî-
nés.

« Cet hôpital est pourvu de trois ministres et offi-
« ciers qui sont, en semblable cas, requis comme des
« notaires, facteurs, protecteurs, cuisiniers et autres, qui
« sont au gouvernement des malades et où chacun a sa-
« laire assez suffisant. De mon adolescence, je y demeu-
« ray deux ans comme notaire, comme c’est la coutume
« des jeunes étudiants qui, exerçant cet office, ont trois
« ducats le moys pour leur gage. »

C’était sans doute à l’hôpital de Sidi Frej, que le jeune
El Hasan hen Mohammed El Ouzzan, devenu plus tard
Jean-Léon l’Africain, était Adel (notaire), au commence-
ment du dixième siècle de l’hégire, commencement du
seizième siècle de l’ère chrétienne. Cependant, quelques
années plus tard, Marmol, en répétant ce qu’a dit Léon rela-
tivement à la mainmise des Rois sur les revenus des hôpi-
taux, ajoute « II y a seulement un hospital aux faux-
bourgs « pour les estrangers qui sont malades. » Or l’hôpital
actuel de Sidi Frej, près des mosquées deMoulay Idris et
des Qaraouyin est dans un endroit qui n’a jamais été un
faubourg de Fès. Cela laisserait supposer que le bâtiment
actuel de Sidi Frej est de construction plus récente. Ali
Bey El Abbasi, au commencement du siècle dernier, dit
d’une façon plus positive « Fès possède un hôpital ou un
« hospice très richement doté et destiné uniquement au
« traitement des fous. »

Dans Es Salaouat El An/as, El Kettani ne donne pas la
date de la construction de Sidi Frej.

Aujourd’hui, Sidi Frej est réservé exclusivement aux
fous, qui sont au rez-de-chaussée, et aux femmes empri-
sonnées, qui sont détenues au premier.

Les fous sont enfermés dans des cellules séparées et
sont enchaînés par le cou ou par la taille. Comme du
temps de Léon, il y a deux Adouls (notaires), qui sont
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ARCHIVES MAROCAINES

attachés au nadhir spécial des habous fie Sidi Frej pour
tenir les comptes de l’administration de cet hospice et de
ses habous, mais il n’y a plus de cuisinier et les fous ne
reçoivent plus que deux pains par jour, et de l’eau. Le
personnel de l’hospice se compose uniquement de
quelques gardiens. Aucun médecin ne visite les fous qui
ne sont l’objet ni de traitement ni même de soins.
Les femmes emprisonnées qui sont généralement des
femmes de mauvaise vie, sont au premier étage; elles ne
sont pas enfermées, mais ont les fers aux pieds; ce qui
les empêche de s’échapper, mais leur permet de vaquer
aux difl’érents travaux d’intérieur que leur fait faire la geô-
lière, « El Arifa ». Cette « Arifa » est nommée par le
gouverneur de Fès El Bali, dont elle relève uniquement.
Elle n’a pas d’appointements, sauf un petit droit minime
qu’elle prélève sur chaque prisonnière, mais elle aug-
mente ses ressources par des abus dont le moindre con-
siste à louer les détenues, si le prix offert lui semble suffi-
sant, et la discrétion assurée. L’Arifa a un khalifa et des
aides de son sexe, qui touchent des « sokhra » comme
des mokhaznia de qaïd. Généralement, l’Arifa est la
femme ou la sœur d’un des mokhaznia du gouverneur de
Fès.

La petite place, « Et Tasi », qui se trouve devant Sidi
Frej, a environ 10 mètres de côté et est entourée d’une
trentaine de boutiques, où se vendent uniquement le
« henna », et le r’assoul, ou savon minéral. C’est ce que
l’on appelle Souq El Henna. Il y a deux espèces de henna
El Henna Ed Doukkalia(du Doukkala) et El Henna El Fila-
lia qui vient du Tafilelt; ce dernier est le meilleur.
Les femmes de Fès font un grand usage du henna, non
seulement pour se colorer les mains et les pieds, mais
elles s’en enduisent la tête avant d’aller au bain, et pré-
tendent que cela fortifie leurs chevelures.
Vue 313 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

Le « henna » et le « r’assoul » se vendent au poids, par
livres de 20 douros, c’est-à-dire de 500 grammes, ce que
l’on appelle « Er Retol El Attari ». Le Souq El Henna est
recouvert d’une treille supportée par des roseaux. Quatre
grands mûriers plantés sur la place, dépassent la treille
et augmentent l’ombrage. A un de ces mûriers est attachée
une grande balance où l’on pèse le henna et le r’assoul
vendus aux boutiquiers qui entourent la petite place. Ce
henna et ce r’assoul, apportés à Fès à dos de mules ou de
chameaux, sont d’abord déposés dans les fondaq où des-
cendent les muletiers et les chameliers, et, de là, apportés
par les portefaix « zerzaya », sur leur dos ou sur les mules
leur appartenant, au Souq El Henna, pour être vendus
aux boutiquiers de ce souq par « qontar » de 100 livres.
La vente est faite aux enchères de la façon suivante
Celui qui a apporté le henna ou le r’assoul, le remet au
« déliai » qui fait circuler, parmi les boutiquiers, des
échantillons des différentes marchandises en leur indi-
quant la mise à prix et la quantité de chaque marchandise
et de chaque qualité. Les boutiquiers surenchérissent et
achètent.

La vente terminée, la marchandise est pesée à la grande
balance suspendue à l’un des mûriers, et livrée aux diffé-
rents acquéreurs.

Cette marchandise paye un « achour », 10 p. 100 ad
valorem; ce droit est payé en argent, moitié par le vendeur,
moitié par l’acheteur il est perçu par un « amin » bouti-
quier du Souq El Henna, qui achète ce droit de l’Amin
El Moustafad, aux enchères également, pour une durée
d’un an.

Lorsque le henna et le r’assoul arrivent en grande quan-
tité, il y a naturellement accord entre tous les marchands
du souq qui s’entendent pour que les enchères ne dépas-
sent pas un certain prix, et le vendeur est obligé d’en pas-
ser par leurs exigences. En effet, le vendeur, qui vient de
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ARCHIVES MAROCAINES

loin a hâte de sortir de Fès, ne pouvant supporter long-
temps les frais que lui causent le séjour dans cette ville
de ses mules ou de ses chameaux. Il veut donc vendre le
plus vite possible et les acheteurs du Souq El Henna spé-
culent sur cette situation.

Lorsque l’arrivage de henna ou de r’assoul n’est pas
très important et permet à un boutiquier du souq de l’ache-
ter en entier à lui seul, les enchères sont plus sérieuses.
Une autre particularité du Souq El Henna, c’est que
henna et r’assoul ne peuvent pas y être vendus en
grandes quantités, pour être revendus à Fès. C’est un
monopole.

Ainsi, si un acheteur se présente pour acheter une
quantité un peu considérable, on ne la lui laisse sortir du
Souq El Henna, que s’il est porteur d’un bulletin « nechira »
du « Fondaq En Nejjarin 1 établissant qu’il a acquitté les
droits de sortie de cette marchandise, qui sont perçus à ce
fondaq. Ce droit est de 10 p. 100. Le henna et le r’assoul
ne se vendent absolument, même au détail, qu’au Souq
El Henna, les produits sont achetés en gros par les bouti-
quiers de ce souq et revendus au détail par eux.
Le r’assoul se vend brut et préparé. Cette préparation
est d’ailleurs très simple. Le marchand mouille chez lui le
r’assoul et l’étend pour le faire sécher sur des planches
qu’il monte au soleil sur sa terrasse. II gratte ensuite cette
boue desséchée avec une planchette, la brise dans ses
mains et la met dans des « couffins ». Le r’assoul ainsi
préparé est plus soluble que celui qui est encore en mottes.
On trouve également à acheter, en cachette, du r’assoul
parfumé à la rose ou à la fleur d’oranger. Ce sont en général
des marchands des « Chemaïn » qui vendent des dattes et
des fruits secs, qui offrent aux étrangers de leur vendre
1. Fondaq En Nejjarin. V. Areh. mar., I” vol.,n° 1, « Les Impôts maro-
cains ».
Vue 315 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FLS

du r’assoul parfumé qu’ils vont chercher chez eux et qu’ils
vendent trois « billiouns » 0,75 c. hassani la livre. Le
r’assoul préparé, mais non parfumé, se vend deux « bil-
liouns », le r’assoul brut 1 mitqal (env. 0,40 c.).
Pour se faire une idée juste des différences de prix, il
faut les examiner en onces et en mitqals. Il y a 14 mitqals
au douro de 5 pesetas hassani. Chaque mitqal se com-
pose de 10 onces.

Le r’assoul brut se vend 1 mitqal ou 10 onces, le
r’assoul préparé 1 mitqal et 4 onces ou 14 onces, le r’as-
soul parfumé 2 mitqals et 1 once ou 21 onces.

Le Henna Et Touatia se vend de 6 à 7 mitqals, environ
1 demi-douro.

Le Ilenna Ed Doukkalia se vend de 3 mitqal à 3 mitqals et
5 onces.

A la porte de Sidi Frej se trouve le bureau « El
Mahakma » du Mohtaseb, qui est installé de la façon
suivante un large auvent en maçonnerie dépasse la porte
de Sidi Frej et s’étend sur une longueur de plus de
2 mètres de chaque côté de la porte.

Sur la droite de la porte, on a construit sous cet auvent,
à l’aide de planches, une petite chambre dont trois côtés
sont en planches et dont le quatrième côté est formé par
le mur de Sidi Frej le plafond de cette pièce est formé
par l’auvent, les planches ne montent pas jusqu’à l’auvent
de façon à donner à cette petite pièce du jour et de l’air
en hiver, cet air est combattu par des rideaux grossiers et le
jour vient par des petites fenêtres à volets de bois, prati-
qués dans la cloison de planches la porte de ce bureau
est pratiquée dans la partie de la cloison qui donne du
côté de la porte de Sidi Frej, à angle droit avec cette porte,
et à sa droite en la regardant.

Les fonctions du Mohtaseb seront étudiées avec l’admi-
nistration de la ville de Fès. Léon l’Africain l’appelle le
Vue 316 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

« chef des consuls qui tient ordinairement douze sergens
en sa maison ». Marmol en parle également dans « Aïn
Alu », ce qui fait supposer qu’à son époque ce magistrat
siégeait non loin de l’endroit où il siège aujourd’hui. « Un
« peu plus loin est une autre place où demeure le prévost
« des marchands, qui met le prix aux vivres et contrôle les
« poids et les mesures». Telles sont encore aujourd’hui les
fonctions du Mohtaseh « Un ministre qu’on appelle
« Almotasn, dit Ali Bey, fixe le prix des vivres et juge les
« affaires relatives à cette branche du service public, »
C’est le Mohtaseb de Fès El Bali qui a son bureau à Sidi
Frej. Fès Ed Djedid a un mohtaseb particulier. Le mohtaseb
actuel de Fès El Bali, Si Mohammed Et Tazi, frère du minis-
tre des Finances etde l’Amin El Moustafad de Fès, intendant
des bâtiments du Sultan, ne vient que le matin à Sidi Frej
et assez rarement il donne, en général, ses audiences chez
lui à la porte de sa maison. Il a un khalifa, qui est un de
ses parents, qui règle les affaires de peu d’importance et
les contestations courantes.

Le Souq El Henna communique directement avec El
Attarin par une petite ruelle où ne passent que les piétons,
et qui se trouve à main gauche en regardant la porte de Sidi
Frej sur le prolongement du mur de façade de ce bâtiment.
Sous la porte qui communique des Qechchacha au Souq
El Henna, sont réunis les fossoyeurs, Eç Çahhafa 4?b^a)l et
les porteurs de civières qui sont des « Zerzaya » désignés
à cet effet, il y a environ une vingtaine de fossoyeurs et
autant de porteurs sous les ordres d’un « Amin», Si Mo-
hammed ben Maanimar El Filali.

Lorsqu’un décès se produit, on vient prévenir cet Amin
à la porte du Souq El Henna et l’on traite avec lui du prix
de la fosse en lui indiquant l’endroit où elle devra être
creusée. Il n’y a pas de frais d’achat pour les terrains qui
Vue 317 sur 510

DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

ARCH. MAROC. 21

se trouvent dans une « djebbania » £.’>Ls*)l ou cimetière
public. D’autre part, un grand nombre de familles de Fès,
chérifiennes ou bourgeoises, ont des « rauda », cimetières
particuliers où sont enterrés les membres de ces familles.
Ce n’est que dans les cimetières des Zaouyas, ou appar-
tenant à quelque marabout, que les terrains sont vendus.
Pour cette acquisition, la famille traite avec le nadhir de la
Zaouya ou des sanctuaires. Les concessions ainsi vendues
sont toujours perpétuelles. Il arrive assez souvent que des
personnes expriment, dans leur testament, la volonté d’être
enterrés dans tel ou tel sanctuaire. Le prix d’une conces-
sion varie de 50 à 200 douros, selon l’importance du sanc-
tuaire.

Le prix le plus réduit pour creuser une fosse est de
8 douros (40 pesetas hassani), c’est le prix des fosses sur
lesquelles on ne doit pas bâtir de tombeau et qui seront
simplement recouvertes d’un dos d’âne en pierres. Les
fosses sur lesquelles doit être bâti un tombeau sont faites
plus larges, et leurs côtés sont garnis de briques pour
supporter les murailles du tombeau. Pour le prix convenu
1′ Amin « Eç Çahhafa » doit creuser la tombe et fournir
les dalles « Eç Çfaïa » ^la^ail avec lesquelles on recouvre
le corps, en laissant entre le fond de la fosse et les dalles
environ 0 m. 60. Cette couverture s’appelle « El R’ta »
lki)l ou « El Hadd » -v»J\. Ces dalles sont vendues auprès
de toutes les portes de Fès.

Derrière les battants de la porte du SouqElHenna,se trou-
vent les planches sur lesquelles on lave les morts, et qui
s’appellent « El Mer’sel » y*à\.
Sur cette petite place, on voit des boutiques de mar-
chands de poisson, de sel, d’ustensiles de cuisine en terre
pour les gens de la campagne; il s’y vend également des
légumes. Sur la droite s’ouvre une impasse, dite Zenqet
1. Oukil El Mr’arba. En Egypte el, en Tunisie, le Sultan du Maroc a des
agents qui jouent auprès des Marocains El Mr’arba », soit résidents ou
de passage, le rôle du Bou Maouarith et de l’Oukil El R’iab, c’est-à-dire
qu’il représente le Bit El Mal du Sultan du Maroc pour prélever, au cas
échéant, la part revenant à ce Bit El Mal dans l’héritage d’un Marocain,
et qu’il représente également les héritiers absents. En un mot, il veille
à,. ce que la succession d’uu Marocain ne soit pas isolée et perdue et que
ce qu’il possède à l’étranger ne soit pas distrait de ce qu’il peut possé-
der dans son pays. Un agent marocain du même genre se trouve à
Gibraltar: on l’appelle le Consul du Maroc. Cet embryon d’organisation
consulaire fera l’objet d’une étude spéciale (Cf. Arc h. mai:, vol. XI,
Ahmed Rezzoùk ).
Vue 325 sur 510

DESCRIPTION DH LA VILLE DE FÈS

Adila, comprenant deux écuries où l’on hache de la
viande pour la « Kefla » et cinq ateliers de cordonniers
qui appartiennent à Si Mohammed ben El Arbi Ed Djamaï,
grand vizir sous Moulay El Hasan et encore vivant,
mais complètement paralysé, puis une meçria apparte-
nant au Chérit Sid El Mehdi El Qtib. Après cette impasse
s’en trouve une autre, également i droite, appelée « Derb
El Guezouli » ou « El Djazouli », où se trouvent une
maison, deux « meçrias » et une écurie appartenant aux
Oulad El Guezouli ou El Djazouli, dont le père était t
« Amin » de El Héri (les magasins) de Bou Jeloud, sous
Sidi Mohammed. Une écurie aux héritiers d’El Hadj El
Arbi ben Mousa, qui, de son vivant, sous le règne de
Sidi Mohammed, était nadhir de Sidi Frej, et sept aatres
maisons dont une aux héritiers d’El Hadj Et Taher Bennani
qui était « Cheikh El Fellaha » et avait été khalifa du gou-
verneur de Fès El Bali sous le règne de Moulay El Hasan,
avec le qaïd Bou Chta Bel liar’dadi Ed Djamaï. Cette mai-
Son est habitée aujourd’hui par ses deux fils, dont l’un,
Si Mohammed, est aujourd’hui Cheikh El Fellaha à Fès.
C’est à cette famille qu’appartient le Riad, le fondaq et le
pressoir à huile dont il a été question dans le « Derb
El Amer ». Dans le Derb El Guezouli se trouve égale-
ment la maison de Si Mohammed Et Tazi, aujourd’hui amin
à « Dar Adyil et, au coin de cette impasse, de la place
de Es Souïqa, et de la rue qui sert de débouché à cette
place, se trouve une boutique appelée « Hanout El Qefla-
çin », la boutique des fabricants de cages cette boutique,
qui servait autrefois à cette industrie, est le siège de
l’amin de la corporation des « Maalleniin tebbala ou r’yaba »
(joueurs de tambour et de hautbois). Il s’y trouve tou-
jours plusieurs membres de cette corporation qui y accro-
chent leurs instruments, et c’est là que les gens qui ont
besoin de ces musiciens pour un mariage ou pour une
naissance viennent les chercher et faire prix avec leur
Vue 326 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

Amin. Puis, clans la rue venant de Es Souïqa, un four,
habous de Sidi Qasem Berrahmoun, deux maisons, l’une
aux Oulad Bricha, l’autre aux Oulad Ben Mançour, une
meçria et une ancienne écurie, où l’on hache la « Kel’ta ».
A droite, une petite mosquée des cinq prières, appelée
Djama El QeJTaçin, quelques marchands d’huile, deheurre,
de légumes, des vendeurs de « kefta » (viande hachée) et
quelques boutiques d’épiciers. Enfin un fondaq apparte-
nant aux hahous de Sidi Frej et qui était, il y a une douzaine
d’années, occupé par M. Fabarez, aujourd’hui agent de la
Compagnie marocaine à Fès. Cet endroit s’appelle « El
Qbib En Naqeç » (le petit seau incomplet). Il s’y trouve
une fontaine d’eau de source, où, pour boire, est attaché
un petit seau de bois, garni de fer, et attaché au mur par
une chaîne de fer. On raconte que Moulay Idris aurait
prédit que quiconque avait bu à El Qbib En Naqeç, reve-
nait toujours à Fès; c’est une croyance populaire.
Marniol l’appelle « Cobeyb El Nacas ». « Puès de là,
dit-il, est une place où il y a une fort honne cisterne »
(t. II, liv. IV, chap. XXII, p. 166).

Pour rester dans le quartier de Zoqaq Er Rominan, il faut,
en sortant de Joutiya, laisser à droite El Qbib En Naqeç et
prendre à main gauche. Après avoir passé sous un passage
couvert, on entre dans la rue des « Nouaryin » (fabricants
(le roues de moulins ou de rouets). Il ne reste plus trace
aujourd’hui de cette fabrication à cet endroit, le nom seul
est resté. A main droite, une impasse étroite et obscure,
où une bête ne pourrait passer, appelée « Derh Ez Ziat »
(rue du fabricant ou du marchand d’huile) il s’y trouve la
maison de Si Mohammed Et Tazi où est enterré « Sidi
« Ahmed bel Hadj Azzouz Et Tazi,des Oulad Et Tazi,connus
« à Fès c’était un illuminé qui arriva à la folie, au point
« que l’on dût l’attacher en lui mettant une chaîne au cou.
« Cette chaîne s’étantmiraculeusementrompue, Sidi Ahmed
Vue 327 sur 510

DESCHIPTION DE LA VILLE DE FÈS

« parcourait les rues et les souqs de Fès, en disant aux gens
« leurs pensées secrètes il était vêtu d’une djellaba de
« Bounedof lai ne grossière). Il est mort au commence-
« ment du treizième siècle de l’hégire et a été enterré dans
« sa maison du « Derb Ez Ziat, » dans le quartier (les
« Nouaryin. Cette maison est la première de l’impasse et
« son tombeau se trouve dans une petite chambre à main
« gauche en entrant dans la maison. C’est, encore aujour-
« d’hui, un endroit qui est un objet de vénération et où l’on
« se rend en pèlerinage. » (Es Salaouat El Anfas.) Dans le
même Derb Ez Ziat, se trouvent la maison du qadi de Fès
Sid El Homid Bennani, la maison de Si Ben Nacer Et Tazi,
qui était du temps de Sid El Hadj Abd Es Salam, moqad-
dem de la confrérie d’Ouezzan à Fès, la maison du Chérif
Sidi Ali Es Sousi, adel à Fès Ed Djedid, et neuf autres
maisons.

Dans le Derb En Nouaryin, presque en face de Derb
Ez Ziat, une autre impasse, où se trouvent deux maisons,
l’une à l’Amin Et Touizi, l’autre à un Ben Cheqroun.
Sur la voie principale, se trouve une maison appelée
« Dar Ed Doukhan », la maison de la fumée, parce qu’elle
reçoit toute la fumée du hammam (bain) qui est à côté
d’elle. Ce hammam s’appelle hammam de Sidi El Arbi
bel Ma ati il est exploité par Sidi Alfal El Baqqali, fils de
Sid El Hadj Abd Es Salam El Baqqali, dit Bou Qtib auquel
la concession en avait été donnée par le sultan Sidi
Mohammed 1, dont il était le favori.

Outre ce hammam, Sidi Allai El Baqqali a conservé
également la jouissance de quelques boutiques, d’une
meç.ria et d’une maison sise dans la même rue, et qui
1. Sidi El Hadj Abd Es Salam El Baqqali, dit Bou Qlib. Sur ce person-
nage, voir Arch. marocaines, vol. II, L. II, p. 210 (El Qçar El Kbir).
Vue 328 sur 510

ARCIIIVES MAROCAINES

avaient été concédées à son père par le même Sultan. l’ne
autre maison appartenant au Makhzen, avait été concédée
autrefois au chérif d’Ouezzan, Sidi El Haclj El A ri», par
Moulay Abd Er Rahman. Cette concession fut retirée par
Sidi Mohammed etdonnée à Sidi El Hadj Abd Es Salam El
Baqqali. A la mort de ce chérif, sous le règne de Moulay
El Hasan, cette maison fut concédée à Si El Hadj Moham-
med Ould Ba Mohammed Chergui, gouverneur de Larache,
qui avait contribué à détruire l’influence de l’ancien favori
de Sidi Mohammed en faisant arrêter, à El Qçar, son nègre
Saïd, qui commettait dans cette ville, au nom de son maître,
les abus de pouvoir les plus scandaleux. Saïd, envoyé à
Marrakech, y fut descendu dans une prison souterraine où
il était enchaîné par le cou de telle façon qu’il devait rester
toujours debout; il mourut dans cette position et son
cadavre commençait à être mangé par les rats lorsqu’on
s’aperçut de sa mort. Cette maison est louée aujourd’hui
par les héritiers de ce gouverneur de Larache, qui en
conservent la jouissance, au chérif d’Ouezzan, Sidi AbdEd
Djelil.

Après cette maison, s’en trouve une autre qui appartient
également au Makhzen sa jouissance a été concédée
autrefois au chérif d’Ouezzan Sidi El Hadj El Arbi et
maintenue à ses héritiers, c’est-à-dire à son fils Sidi El.
Hadj Abd Es Salam, qui s’est fait protéger par la France,
puis par Moulay El Arbi, son fils, mort il y a quelques
mois. La jouissance en a été continuée à Moulay EtTayeb,
fils de Moulay El Arbi. Cette maison est occupée par le
moqaddem Et Taher Et Touati, représentant et fondé de
pouvoirs des chorfa d’Ouezzan auprès des gens du Touat
habitant Fès, Mequinès et les environs.

On sait que les gens du Touat sont tous affiliés à la
confrérie d’Ouezzan, depuis le voyage fait au Touat par le
petit-fils du fondateur de cette confrérie, Moulay Et Tayeb
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DESCRIPTION DE LA VILLE DE FÈS

ben Mohammed ben Abdallah. Le Touat est considéré
comme une véritable zaouya d’Ouezzan, comme un fief
religieux, à tel point que les descendants de Moulay
EtTayeb ont, parfirman chérifien, le privilège de se substi-
tuer au Trésor chérifien pour toucher dans tout l’empire
I QSELÏÏÏ R’ARABA DE SA FAMILLE EN 1876

On a vu, dans « Les Musulmans d’Algérie au Maroc »;
qu’un certain nombre d’Oulad Sidi Cheikh et leurs servi-
teurs ont été transportés au Maroc par la France en 1876,
au moment de la soumission de Si Sliman ben Qaddour2
au Sultan Moulay El Hassan par l’entremise du Chérif
d’Ouezzan, Sid El Hadj Abdesselam.

En étudiant cette période du règne de Moulay El Hassan,
l’attention est attirée par les différents épisodes peu con-
nus, qui ont marqué à cette époque les relations de l’Algé-
rie et du Maroc. On ne peut s’empêcher d’être porté à
croire que le nouveau souverain du Maroc, monté sur le
trône depuis trois ans à peine, a pu caresser un moment
le projet de tirer profit des difficultés que nous avions
depuis tant d’années sur nos frontières avec le Maroc et
principalement dans le Sud-Oranais. Sans doute il ne pou-
vait pas entrer dans les idées de Moulay El Hassan de
reprendre le rêve de tous les souverains du Maroc, con-
sistant à étendre leurs territoires vers l’Est et reconstituer
au moins en partie l’Empire des Almohades cependant
1. Archives marocaines, vol. XI, n° 1.

2. Si Sliman ben Qaddour, ancien Agha de Géryville et des Hamian, était
Taïbi, c’est-à-dire de la confrérie religieuse d’Ouezzan, ce qui explique
l’intervention de Sid El Hadj Abdesselam, chef de cette confrérie.
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ARCHIVES MAROCAINES

l’agitation continuellement entretenue sur notre frontière,
et que nous semblions demander au Maroc pour
faire cesser les razzias contre les tribus soumises, par les
tribus dissidentes réfugiées sur son territoire, pouvaient
bien être prises pour de la faiblesse et encourager cer-
taines illusions.

Il faut, à ce propos, expliquer rapidement la politique
intérieure de Moulay El Hassan, qui lui a permis d’avoir
un règne florissant et de donner au Maroc l’apparence
d’un empire.

L’opposition les unes aux autres des compétitions des
différentes puissances pour échapper à l’influence trop
prépondérante d’une seule, qui a été tout le jeu de la
politique extérieure de ce règne, est trop connue pour qu’il
soit utile d’y revenir. Sa politique intérieure est moins
connue, et son examen peut donner l’explication de bien
des choses qui paraissent illogiques elles sont, d’autre
part, tout à fait conformes à la véritable mentalité de la
grande majorité des Marocains.

Le rêve, on pourrait dire l’idée fixe des Musulmans
marocains, à peu d’exceptions près, c’est la guerre sainte,
c’est-à-dire la conversion, la soumission, l’expulsion ou la
mort des infidèles. Ceux qui ont renoncé à la réalisation
immédiate de ce rêve, comme impossible, déplorent cette
impossibilité, et non seulement ne désespèrent pas d’un
renouveau de l’Islam, mais ils y croient fermement dans
un avenir plus ou moins lointain. II suffit d’ailleurs de
lire les ouvrages musulmans religieux ou juridiques pour
se rendre compte que l’on se trouve encore là en face de
l’irréconciliable. La pensée, qui pénètre lentement, finira
sans doute par changer cette forme de l’intellectualité
musulmane, mais la pensée seule peut opérer cette trans-
formation. Tous les autres moyens, que les circonstances
rendent d’ailleurs parfois indispensables, peuvent domp-
ter, mai ils n’assimilent pas ils peuvent briser les volon-
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN Q.ADDOUB

tés, réduire les individus, mais ils n’empêchent pas le
rêve de continuer, obsédant et héréditaire.

Moulay El Hassan, (lui connaissait parfaitement cette
mentalité de son peuple, s’en est très habilement servi
comme d’un moyen de gouvernement il était peut-être
en cela parfaitement d’accord avec ses propres convic-
tions et avec ses espérances.

Dans les tribus complètement soumises à l’autorité du
Sultan, dans les tribus makhzen, là où les abus eux-mêmes
des fonctionnaires marocains, qui sont tout-puissants, ont
poussé les indigènes à rechercher la protection euro-
péenne, le désir de la guerre sainte est beaucoup moins
ardent, quoique le principe en subsiste toujours. Dans ces
tribus, d’ailleurs, le pouvoir temporel du Sultan est suffi-
samment établi pour y permettre la perception de tous les
impôts, sans qu’il soit nécessaire d’avoir recours à l’idée
religieuse. Il n’en est pas de même dans les tribus insou-
mises, qui sont généralement les tribus des montagnes et
les tribus berbères.

Dans ces dernières, surtout celles de l’Est, la préoccu-
pation de la guerre sainte est constante, et l’espoir du jour
tant attendu est plein d’impatience. Pour toutes ces popu-
lations, ignorantes et presque sauvages, la présence des
chrétiens non seulement dans quelques villes du Maroc
mais même sur le territoire de l’Algérie, n’est due qu’à la
longanimité du Sultan, à un réel excès de bonté de sa
part. Pendant tout son règne, Moulay El Hassan les a main-
tenues dans une demi-obéissance et les a empêchées tout
au moins de se soulever contre lui en entretenant l’espé-
rance de cette guerre sainte dont lui seul, comme Imam,
avait le droit d’indiquer le jour. Par ce même moyen, il a
su se faire verser par ces populations indépendantes, si ce
n’est à proprement parler des contributions, au moins des
tributs assez nombreux. Ces tributs étaient obtenus sous le
prétexte de préparer la guerre contre l’infidèle. De fait,
Vue 336 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

ils permettaient au Sultan, joints aux ressources des
douanes et aux autres impôts, d’entretenir les troupes
suffisantes à maintenir son autorité et de subvenir à toutes
les dépenses de l’État. Moulay El Hassan parvint ainsi,
sans avoir recours à des emprunts, à faire face à toutes les
obligations que les relations plus fréquentes avec les puis-
sances rendaient plus coûteuses que sous les règnes pré-
cédents. Maintenant d’une part en haleine, par l’espoir du
Bjihad, les tribus indépendantes de son empire, opposant
d’autre part aux idées de progrès, qui lui sont suggérées
par l’Europe, l’état d’esprit de son peuple qu’il entretenait
lui-même, il a pu régner pendant vingt ans sans compli-
cations graves. Il a, de plus, tiré de son pays tout ce qu’il
pouvait donner avec un état de choses impossible à changer
brusquement sans risquer de provoquer une révolution
où pouvaient sombrer la dynastie et l’empire lui-même.
Quoique cela sorte un peu du cadre de cette étude, il
faut faire remarquer, en passant, qu’étant donné les senti-
ments entretenus par Moulay El Hassan chez les tribus
berbères, leur désillusion a dû être grande lorsque, voyant
il y a huit ans le Touat occupé par la France, elles sont
venues demander à Moulay Abdelaziz l’exécution des pro-
messes de son père. Le jeune Sultan a dû tempérer leur
ardeur et tâcher de leur faire comprendre que le jour tant
attendu n’était pas encore venu il en est résulté un sen-
timent de défiance, qui dure encore et qui a contribué
pour beaucoup à l’impopularité du Sultan actuel. Comme
les enfants, les Berbères n’ont que des idées absolues et
pour eux la puissance de l’Imam ne peut être soumise à
aucune autre relativité, sous peine de perdre tout son
prestige.

En 1876, le Sultan Moulay El Hassan avait réuni à Mar-
rakech une armée considérable, 40.000 hommes dit-on, en
annonçant une expédition dans le Sous; puis, prétextant
l’état de désordre du Nord de l’Empire, il renonça à ce
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

projet, se mit en marche en passant par Mazagan, Casa-
blanca et Rabat, arriva à Fès, où il resta quelque temps
pour augmenter ses troupes. De là il se dirigea par Taza,
vers les tribus de la frontière algérienne, Beni Iznazen,
Angad, M’haïa et à Oujda, où il arriva au mois de sep-
tembre et où il se rencontra avec le général Osmont, com-
mandant la division d’Oran.

Au commencement de la même année, M. Tissot, mi-
nistre de France à Tanger, d’accord avec le général Chanzy,
gouverneur général de l’Algérie, s’employait auprès du
Sultan pour obtenir de lui qu’il consentît à l’internement
des Oulad Sidi Cheikh à l’Ouest de Fès. Moulay El Hassan
accepta avec empressement cette combinaison et il fut
décidé que le Chérif d’Ouezzan, Sid El Hadj Abdesselam,
qui n’était pas encore protégé français, mais jouissait
cependant d’une sorte de protection officieuse de notre
légation à Tanger, serait chargé par le Sultan de négocier
avec les Oulad Sidi Cheikh leur internement au Maroc. 11
faut rappeler, à ce propos, que les chorfa d’Ouezzan ont
toujours joui d’une grande influence dans l’Ouest-Algérien
et qu’au commencement de la conquête de l’Algérie, Mou-
lay Abderrahman, lorsqu’il chercha à s’emparerde l’ancien
royaume de Tlemcen, envoya dans cette région Sid El Iladj
El Arbi, père de Sid El Hadj Abdesselam 1.

Voici brièvement les motifs qui avaient amené le gou-
vernement général de l’Algérie à demander son concours
à notre diplomatie an Maroc pour essayer de se débarras-
ser d’une des plus importantes tribus du Sud-Oranais.
La tribu arabe des Oulad Sidi Cheikh, qui fait remonter
son origine au Khalifa Abou Beker Es Sadik et qui date
effectivement de Sidi Abdelqader, dit Sidi Cheikh, mort
en 1630 (1035 de l’hégire), a toujours été turbulente, enne-
1. Archives marocaines, vol. XI, n° 1, « Les Musulmans d’Algérie au
Maroc », p. 42.
Vue 338 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

mie de toute administration et de toute autorité. Pour con-
server leur indépendance, et pour continuer leur existence
de grands seigneurs religieux, et percevoir leur ziara
sans être inquiétés, les Oulad Sidi Cheikh consentirent à
payer un tribut aux Turcs. Plus lard, ils payèrent égale-
ment des contributions à l’Emir Abdelqader ben Mahi
Ed Din. Après le traité de 1845, entre la France et le Maroc,
qui partageait assez arbitrairement entre les deux pays
les tribus frontières, les Oulad Sidi Cheikh firent sans
succès une tentative auprès du gouvernement de Fès pour
échapper i notre autorité.

A partir de ce moment, le malentendu causé par les
termes du traité de 1845 commença à créer la pénible
situation que l’on a voulu trancher en 1876 par l’interne-
ment au Maroc des Oulad Sidi Cheikh dissidents.
Aux termes de ce traité, les Oulad Sidi Cheikh Cheraga,
c’est-à-dire de l’Est, étaient sujets français, tandis que les
Oulad Sidi Cheikh R’araba, c’est-à-dire de l’Ouest, étaient
marocains. En réalité, les dénominations Cheraga et
R’araba, appliquées aux Oulad Sidi Cheikh, signifient sim-
plement que les premiers habitent le Qçar Ech Chergui,
ou des Oulad El Hadj Bou Hafs, qui est à l’Est du tombeau
de Sidi Cheikh, tandis que les seconds habitent le Qçar El
R’arbi, ou des Oulad El Hadj Abd El Hakim, à l’Ouest du
même tombeau.

La stricte application des termes de ce traité, en ce qui
concerne les Oulad Sidi Cheikh, étendrait donc l’autorité
du Sultan du Maroc jusqu’à El Abiod Sidi Cheikh.
Cette erreur a permis en 1849 à Sidi CheikhbenEtTayeb,
chef des Oulad Sidi Cheikh R’araba, de se faire passer
comme Khalifa du Sultan du Maroc pour la région qu’il
habitait, et pour empêcher les menées de ce personnage,
la France dut avoir recours au Sultan Moulay Abderrah-
man, qui l’attira à Fès, où il le maintint en prison pendant
quelques mois.
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

II serait trop long de raconter nos luttes avec les Oulad
Sidi Cheikh, leurs perpétuelles trahisons, leurs soumis-
sions intéressées. Pendant des années, les Oulad Sidi
Cheikh Cherag’a et R’araba se sont alternativement servis
de notre appui pour la satisfaction de leurs petites ambi-
tions locales et dans l’espoir d’obtenir chacune une supré-
matie qu’elles se disputent depuis près de deux siècles.
En 1874, Si Sliman ben Qaddour, des Oulad Sidi Cheikh
R’araba, après avoir combattu dans nos rangs les O. S. Ch.
et n’ayant pas trouvé dans son alliance avec nous
les satisfactions d’amour-propre qu’il espérait, s’enfuit au
Maroc, et par l’intermédiaire d’un marabout des Oulad
Abderrahman, Moulay Saoul, se réconcilia avec Si Qad-
dour ben Hamza, des O. S. Ch. Cheraga, et les dissidents
des deux branches des O. S. Ch. s’allièrent contre nous.
Ces fractions dissidentes des Oulad Sidi Cheikh, réfu-
giées au Maroc, tout près de notre frontière, opérèrent
de nombreuses razzias sur nos tribus le gouvernement
marocain opposant son impuissance à nos revendications
et à nos demandes d’indemnité, on se décida à autoriser
nos tribus à razzier à leur tour les tribus marocaines qui
donnaient refuge à nos dissidents. Ce système n’avait pas
donné les résultats qu’on pouvait en attendre, et ne faisait
qu’entretenir entre les tribus de la frontière un état
d’hostilité permanent préjudiciable à la prospérité de nos
tribus elles-mêmes le gouvernement général, d’autre
part, ne jugeant pas utile de prendre, vis-à-vis des tribus
marocaines et des Oulad Sidi Cheikh, les mesures éner-
giques qui, seules, auraient pu rétablir le calme et la sécu-
rité, résolut de s’adresser, par l’intermédiaire de notre
légation de Tanger, au Sultan du Maroc, pour lui deman-
der d’éloigner de notre frontière les Oulad Sidi Cheikh
R’araba qui étaient la cause réelle de tous ces désordres.
Les négociations entamées à ce sujet par M. Tissot furent
accueillies avec joie par Moulay El Hassan. Le Sultan
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ARCHIVES MAROCAINES

voyait dans cette démarche et dans la nécessité où parais-
sait se trouver la France d’avoir recours à lui pour se
débarrasser de ses propres dissidents, un aveu d’impuis-
sance de sa part de pouvoir les réduire elle-même; c’était
pour lui une excellente occasion de relever son prestige
dans le Sud-Est de son empire, parfaitement conforme à
la politique qu’il avait adoptée. Il est certain qu’il résolut
de profiter de cette circonstance pour étendre son influence
vers l’Est et que c’est là la vraie raison qui lui fit modifier
son plan primitif qui consistait à conduire une expédition
dans le Sous, pour se rapprocher au contraire de la fron-
tière et profiter de notre apparente faiblesse, à laquelle il
était en droit de croire, pour montrer près de l’Algérie
l’étendard de l’Emir El Moumenin.

Il ne semble pas douteux que le rôle que nous deman-
dions au Chérif d’Ouezzan de jouer dans cette circonstance
n’était pas le même que celui dont le Sultan l’avait chargé.
Tandis que notre légation, comme le gouvernement géné-
ral de l’Algérie, comptaient sur l’influence du Chérir uni-
quement pour persuader les chefs des Oulad Sidi Cheikh
dissidents de faire leur soumission au Sultan, et à se lais-
ser interner au Maroc, Moulay El Hassan devait espérer
que l’influence du Chérif ne se bornerait pas à obtenir ce
résultat et pourrait provoquer un mouvement en sa faveur
dans l’Ouest algérien. Si ce mouvement, préparé sans
doute de longue main, ne se produisit pas, c’est que pro-
bablement Sid El Hadj Abdesselam, peu confiant dans la
reconnaissance du Sultan, d’une part, ne tarda pas à se
convaincre, d’autre part, que notre faiblesse n’était pas
telle qu’on pouvait le croire à la cour de Fès. Il pensa
qu’il n’était pas de son véritable intérêt de servir aux
ambitions de Moulay El Hassan, qui lui paraissaient irréa-
lisables, et qu’il était préférable pour lui de se conduire
de façon à obtenir la protection française qu’il recherchait
depuis un certain temps, et qu’il obtint quelques années
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAM HKN OADDOUI!

plus tard. Le Chérif avait un intérêt de premier ordre à
ne pas se voir fermer l’Algérie, où la maison d’Ouezzan
compte autant d’adhérents qu’au Maroc.

Cependant, le gouvernement général de l’Algérie se
rendait compte, au mois d’avril 1876, que l’accueil fait au
Chérif d’Ouczzan dans la province d’Oran était plus res-
pectueux que d’habitude. Sa présence causait une certaine
surexcitation dans les confréries et semblait y réveiller
l’espoir toujours vivant des indigènes de voir les Français
obligés d’abandonner l’Algérie et d’y voir la domination
arabe de nouveau établie.

Le Sultan avait également chargé le Chérif d’Ouezzan, à
son retour du Sud algérien, de réconcilier les Angad et
les Beni Iznazen. Sid El Hadj Abdesselam, comme on le
verra plus loin, ne réussit pas à opérer cette réconciliation,
qui n’aurait pu avoir pour nous que des conséquences
fâcheuses en faisant cesser les dissensions des deux prin-
cipales tribus voisines de notre frontière, et en leur per-
mettant d’agir simultanément contre nos tribus.
Transporté en Algérie par l’aviso le Cassard, Sid El
Hadj Abdesselam arrivait au commencement du mois
d’avril 1876 à Ras El Ma des Beni Mathar, où il avait donné
rendez-vous aux chefs des Oulad Sidi Cheikh R’araba et
Cheraga. Il n’y trouva que Si Sliman ben Qaddour, chef
des R’araba. Qaddour ben Hamza s’était fait excuser et
remplacer par son frère Si Eddin et par son faqih (secré-
taire), Si El Fadil. Si Sliman ben Qaddour accepta de se
rendre auprès du Sultan. Quant à l’internement de Si
Qaddour ben Hamza discuté avec le Chérif par ses émis-
saires, il resta subordonné par lui à la restitution par le
gouvernement général de l’Algérie de tous les biens qui
lui avaient été confisqués. A cette condition, Si Qaddour
consentait à aller vivre au Maroc entre Oujda et Taza et il
espérait que Sid El Hadj Abdesselam obtiendrait du Sultan
pour lui le commandement des populations établies entre
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ARCHIVES MAROCAINES

les deux villes. Ces conditions, qui témoignent bien des
sentiments que l’intervention du Chérif et du Sultan avait
fait naitre dans l’espoir de Si Qaddour ben Hamza, ne
méritaient même pas d’être discutées et Sid El Hadj Abcles-
selam dut se contenter d’avoir pu décider Si Sliman ben
Qaddour à se retirer au Maroc. C’est au retour de cette
mission que le Chérif fit une tentative inutile et, semhle-
t-il, assez molle, pour réconcilier les Angad et les Beni
Iznazen.

La soumission de Si Sliman ben Qaddour n’était pas
elle-même ce que nous pouvions croire. L’internement au
Maroc de ce personnage était l’expression française du
résultat obtenu par la mission du Chérif, tandis qu’en réa-
lité, dans l’esprit de Si Sliman et du Sultan lui-même, les
Oulad Sidi Cheikh R’araba dissidents et leur chef étaient
des « mouhadjirin », des émigrés religieux, qui fuyaient
devant les infidèles et auxquels l’Emir El Moumenin don-
nai l’hospitalité. Il est certain que, dans cette circonstance,
comme dans la plupart des conventions d’ailleurs, les uns
cherchaient à tromper les autres et que le négociateur lui-
même présentait à chacun sa mission dans les termes et
avec les espérances qui devaient le plus en faciliter la
réussite.

La manière dont Si Sliman hen Qaddour et un grand
nombre des tribus marocaines de la frontière compre-
naient l’internement du chef des Oulad Sidi Cheikh R’araba
au Maroc se manifeste clairement par le fait suivant
Si Sliman, en partant pour le Maroc, était porteur de
lettres des Angad, des M’haya, des Beni Mathar, des Beni
Cuild et des Oulad Djarir, demandant au Sultan de le
nommer Amel d’Oudja en remplacement de Si Mohammed
Ould El Bachir Ou Messaoud. Sans doute, cette manœuvre
était plutôt dirigée par les Angad contre la tribu des Beni
Iznazen à laquelle appartenait Ould El Bachir cependant,
il était difficile à la France d’admettre que le personnage
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN DEN QADDOUR

inquiétant qu’elle internait en territoire marocain fût
nommé gouverneur du Sultan sur notre frontière, et notre
légation protesta énergiquement auprès de la cour de Fès
pour empêcher cette combinaison d’ahoutir.

Le 19 avril 4876, Si Sliman ben Qaddour arrivait à
Tanger et descendait dans une maison du Chérif d’Ouezzan.
M. Tissot parut s’étonner de ce que le personnage, interné
sur sa demande, ne se présente pas à sa légation, ce qui
prouve que le malentendu sur cet internement continuait
toujours.

Avant de quitter Oran, Si Sliman avait remis au général
Osmont les deux listes ci-après, comprenant les memhres
de sa famille et ses serviteurs, qu’il désirait voir le re-
joindre au Maroc.

État n° 1.

Famille de Si Sliman ben Qaddour.

1° Tayeb Ould El Hadj El Arbi.

Sa mère Dehahia bent (il a omis de l’indiquer).
Sa femme Halyma bent – –

Ses deux frères, l’un du même père, Mohammed (fort
jeune) l’autre, de la même mère, Ben Sliman (plus
âgé).

Ses deux sœurs, Johra (grande).

Bent Naimi (petite).

2° Moradj ben Qaddour 1.

Sa femme, Yamina bent Bou Haous.

Un petit enfant, Mohammed (âgé de 21 mois).

3° Bou Bekeur hen Bou Hafs 2.

Ses deux femmes, Kelila et Kebtha.

1. Il indique une seconde femme, mais il en tait le nom.
2. II indique sept frères et deux sœurs, mais il en tait le nom.
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ARCHIVES MAROCAINES

Un fils, Abdelaziz.

Une fille, Kheïra.

Son père, Si Bou Hafs ben Et Tayeb (oncle de Si Sliman
ben Qaddour).

Sa mère, Bathoul.

La deuxième femme de son père, Zohra.

Cinq frères Clieikh-Larbi-Daho (grands).

Ali et Bou Douaia (petits).

Trois sœurs Yamina (femme de Moraclj ben Qaddour).
Lalia (grande).

Cherifa (petite).

État n° 2.

Famille de Si Sliman ben Qaddour.

Si Sliman ben Tayeb (oncle de Si Sliman, frère de son père).
Si Cheikh ben Mohammed (cousin germain de Si Sliman,
fils de Si Mohammed ben Tayeb).

Qaddour ben Bou Hafs (cousin germain, fils de Sidi Bou
Hafs ben Tayeb).

Si Qaddour ben Zian (cousin germain), rentré de Corse.
Si Mohammed ben Mansour (cousin germain).
Si Mohammed ben Bou Bekeur –

Si Maamar ben Bou Bekeur –

Si Safi hen El Mazouzi –

Si Larbi ben Zian –

La tente des orphelins Ouled Sidi Larbi ben Brahim
(neveux de Si Sliman; leur mère est sa sœur).

Bent Naimi (femme de Sidi Cheikh ben Tayeb).
Si Abdallah (cousin éloigné).

Si M’hammed –

Mohammed ben Cheikh –

Ben Amar –
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

Si Bou Hafs ben Zian (cousin éloigné)

Si Hakoum –

Si Bel Fodhil ben Mohammed –

Si Bou Hafs ben Qaddour –

Si Cheikh ben Sliman –

Tahar ben Cheikh – rentré de Corse.
Sliman ben El Hadj Miloud Abid

El Miloud ben Bellal

Bel Kheir

Bou Chta

Bel Fodhil ben Khelifa

Maamar ben Khelifa

Abdelhakem ben Abbou

Sliman ben El Miloud

Maamar ben Attala

Mohammed ben El Djellali

Bou Hafs ben Attala

Bou Hafs ben Cheikh

La tente de Larbi ben El Hadj

Ahmed ben Miloud

Sliman (aveugle).

Cheikh ben Abderrahman (domestique).

Abd El Hakem (forgeron).

Après avoir vainement insisté pour faire un voyage en
France, le Chérif d’Ouezzan, qui aurait tenu sans doute à
être à Paris en même temps que le Hadj Mohammed Zebdi,
ambassadeur du Sultan, rentre à Tanger, d’où il partit à
la fin mai pour Ouezzan avec Si Sliman ben Qaddour, qu’il
présenta au Sultan à Méquinès dans le courant du mois de
juin.

Moulay El Hassan accueillit très bien Si Sliman et lui
donna une maison à Fès pour y habiter, en attendant son
établissement définitif pour lui, sa famille et ses gens,
dans la plaine du Saïs.
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ARCHIVES MAROCAINES

Plus tard, Moulay El Hassan, se rendant compte sans
doute qu’il s’était fait des illusions sur la possibilité d’éta-
blir son influence dans l’Ouest algérien et, désireux de
donner satisfaction à la France avant de se rapprocher de
la frontière, décida d’envoyer les Oulad Sidi Cheikh et Si
Sliman ben Qaddour à Marrakech, et cette fois de les y
interner réellement. Il fit demander au gouvernement
français de faire transporter la famille et les gens de Si
Sliman ben Qaddour jusqu’à Safi.

Dans l’origine, les Oulad Sidi Cheikh devaient être
transportés par mer jusqu’à Tanger, et leurs troupeaux et
leurs tentes devaient gagner la frontière par terre sous la
direction du fils de Si Sliman ben Qaddour. Lorsqu’il fut
décidé qu’ils seraient internés près de Marrakech, ils
durent, avant de quitter l’Algérie, vendre leurs troupeaux
qu’il était impossible, étant donné la distance, de faire
voyager par terre, ainsi que cela était convenu lors du
premier projet qui consistait à demander au Sultan de les
établir dans la plaine du Saïs, entre Fès et Méquinès. Les
seuls campements personnels de Si Sliman avaient quitté
l’Algérie par terre au mois d’avril sous le commandement
de son fils.

Après de nombreux pourparlers, les Oulad Sidi Cheikh
finirent par s’embarquer à Oran le 1.7 septembre. Ils étaient
accompagnés du capitaine Rinn, de la section des officiers
interprètes de l’état-major général, d’un brigadier et de
cinq spahis.

Si Sliman ben Qaddour n’ayant remis au général Osmont
que la liste des notables, le nombre de gens qui se pré-
senta pour s’embarquer fut beaucoup plus considérable.
En voici l’état nominatif qui comprend 35 tentes ou familles,
soit 227 personnes, dont 75 hommes, 84 femmes et 68 en-
fants. Pour ne pas scinder les familles, on se décida à
envoyer le tout.
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INTE11NBMENT AU MAROC DE SI SI.1MAN BEN QADDOUIl

ÉTAT NOMINATIF DES OULAD SIDI Cheikh QUI s’embarquèrent
A BOUGIE LE 11 SEPTEMBRE ET A ORAN LE 17 SEPTEMBRE
1876 POUR être DIRIGÉS SUR LE maroc.

Tentes qui étaient internées dans la subdivision de Sètif.
Première lente.

Bou Hafs ben Ettaieb, chef de tente, cousin de Sliman
ben Kaddour

Cheikh ben Bou Haffs homme.

El Arbi ben Bou Haffs –

Salem ben Beloul –

Fathma bent El Mir femme.

Kheira bent Ahmed –

El Alia bent Bou Haffs –

Fathma bent Ahmed –

Bou Alam ben Bou Haffs petit garçon.

Ali ben Bou Haffs –

Echcheikh ben Eddin –

Deuxième tente.

Mohammed ben Belal chef de tente.

Bou Haffs bel Hadj homme.

Zana bent Ahmed femme.

Om El Kheir bent El Hadj fille.

Mabrouka bent El Hadj –

Troisième tente.

Bou Beker ben Bou Haffs chef de tente.

El Beloul bent Ahmed femme.
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ARCHIVES MAROCAINES

Gouta bent Ech Cheikh femme
Cherifa bent Bou Hafl’s –
Aicha bent Bou Ilaffs –
Bou Douaia bent Bou Haffs petit garçon.
Abderrahman ben Bou Ilaffs –
(Cousins de Sliman ben Kaddour.)

Quatrième tente.

El Mâradj ben Kaddour chef de tente.
Mobarek ben Beloul homme.
Mobarek ben Larech –
Sefia ben Ettaieb femme.
Fatma bent Kaddour
Messaouda bent Kaddour
Debbia bent Belal
Nouna bent Mohammed
Abdelaziz bent Boubeker garçon.
Rheira bent Bou Beker fille.
Cinquième tente.

Cheikh ben Abderrahman chef de tente.
M’hammed ben Cheikh homme.
Brahim ben Cheikh –
Fatma bent El Arbi femme.
Mabrouka bent Cheikh –
Mamaar ben Cheikh petit garçon.
Sixième tente.

Kaddour ben Bou Hafl’s chef de tente.
Khcira bent Cheikh femme.
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

ARCH. MAROC. 23

Aicha Lent Bou Haffs femme
Halima petite fille.
Septième tente.

El Miloud ben Belal chef de tente.
Mimouna bent Messaoud, femme.
Om El Kheir bent Feredj –
Khedidja bent Belal –
(Cousins de Sliman ben Kaddour.)

Huitième tente.

Ettaieb bel Hadj chef de tente.
Ben Sliman bel Hadj homme.
Dabbia bent Sliman femme.
El Hadja bent Zian –
Dabbia bent El Hadj –
Halima bent Mohammed –
Mohammed bel Hadj petit garçon.
Mohammed ben Sliman –
Zohra bent El Hadj petite fille.
(Cousins de Sliman ben Kaddour.)

Neuvième tente.

Bel Khir ben Brik chef de tente.
Brik ben Belal homme.
Aida bent Feredj femme.
El Alia bent Mohammed –
Mohammed ben Bel Kheir petit garçon.
Tedja bent Brik petite fille.
(Cousins de Sliman ben Kaddour.)
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ARCHIVES MAROCAINES

Dixième lente.

Ben Sliman ben Mazouzi chef de tente.
Fatma bent El Hadj femme.
(Cousins de Sliman ben Kaddour.)

Onzième tente.

Bou Chita ben Cheikh chef de tente.
Rahma bent Brik femme.
Douzième tente.

Safi ben Ahmed chef de tente.
Mostafa ben Ahmed homme.
Fatma bent Ahmed femme.
Kheira bent Bel Fadil –
(Cousins de Sliman ben Qaddour.) .)

Treizième lente.

Abd El Hakem ben Nebou chef de tente.
Brahim ben, Abdelhakem homme.
Samikia bent Aisa femme.
Abdel Hakem ben Abdelhakem petit garçon.
Kheira bent Abdelhakem petite fille.
Fatma bent Abdelhakem –
(Cousins de Sliman ben Qaddour.)

Quatorzième tente.

Abdelhakem ben Bou Haffs chef de tente.
Djeloul ben Hekoum homme.
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

Bou Alam ben Hekoum homme
Cheikh ben Hekoum –
Et Taieb ben Bou Hafs –
Khedidja bent Mohammed femme.
(Cousins de Sliman ben Qaddour.)

Quinzième tente.

Cheikh ben Zian chef de tente.
El Hadj ben Zian homme.
Halima bent Mohammed femme.
Baia bent Cheikh –
Abdelhakem ben Zian petit garçon.
Taki ben Zian –
Mohammed ben Zian –
Messaoud ben Zian –
Kheira bent Zian petite fille.
Amina bent Zian
Fatma bent Zian –
Fatma bent Cheikh –
(Cousins de Sliman ben Qaddour.)

Seizième tente.

Kaddour ben Zian chef de tente.
Ahmed bel Halib homme.
Bou Haffs ben Zian –
Fatma bent El Hadj femme.
Saadia bent Cheikh
Halima bent Bou Haffs
Kheira bent Djilemi
Renia bent Chelali
Mohammed ben Kaddour petit garçon.
Ahmed ben Kaddour –
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ARCHIVES MAROCAINES

Zahra bent Dou Halls petite fille.
(Cousins de Sliman ben Qaddour.)

Dix-septième lente.

Amar ben Bou Beker chef de tente.
Bakrita bent Mohammed femme.
Mobareka bent M’hammed petite fille.
Mohammed ben Az/an petit garçon.
Dix-huitième tente.

Ben Aissa ben Lakreuch chef de tente.
Sliman ben Aissa homme.
Bou Haffs ben Aissa –
Mobarka bent Bou Halls femme.
Taieb ben Aissa petit garçon.
Dix-neuvième tente.

Tahar ben Cheikh chef de tente.
Bachir ben Kaddour homme.
Kheira bent Taieb femme.
Fatma bent Maamar • –
Reqia bent Cheikh –
Mohammed ben Bachir petit garçon.
Reqia bent Bachir petite fille.
(Sic) Reqia bent el Bachir –
Mariem bent el Bachir –
Vingtième tente.

Mohammed ben Boubeker chef de tente.
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

Fatma bent Mohammed femme.
Requia bent Cheikh –
Sliman ben Mohammed petit garçon.
Fatma bent Mohammed petite fille.
(Cousins de Sliman ben Kaddour.)

Vingt et unième lente.

Mohammed ben Mançour chef de tente.
(Cousin de Sliman ben Kaddour.)

Sliman ben Mançour homme.
Mançour ben Mohammed –
M’hammed ben Mohammed –
Ahmed ben M’hammed –
Meriem bent El Aid femme.
Om El Kheir bent Ali –
Aiche bent Bou Messad –
Abderrahman ben Mohammed petit garçon.
Kherfia bent Sliman petite fille.
Vingt-deuxième tente.

Kaddour ben Ali chef de tente.
(Cousin de Sliman ben Kaddour.)

Anira bent Ali femme.
Djilani ben El Aid petit garçon.
Vingt-troisième tente.

M’hammed bel Hadj chef de tente.
Khadra bent Cheikh femme.
Vingt-quatrième tente.

Mohammed ben Cheikh chef de tente.
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ARCHIVES MAROCAINES

Ben Dris ben Cheikh homme.
Fatma bent Ettaieb femme.
Renia bent Mohammed –
Fatma bent Mohammed petite fille.
Vingt-cinquième lente.

Ben Ameur ben Ziad chef de tente.
Mahhouba bent Sliman femme.
Mohammed ben Ameur petit gan-on.
Vingt-sixième tente.

Abdallah ben Saad chef de tente.
Mesk El Djib bent Bou Haffs femme.
Amina bent Ahmed –
Fatma bent Abdallah –
Ahmed ben Abdallah peti garçon.
Bachri ben Abdallah –
Amina bent Abdallah petite fille.
Halima bent Belkacem –
Fatma bent Belkacem –
Vingt-septième tente.

Bel Fadel Bel Khelifa chef de tente.
(Cousin de Sliman ben Kaddour.)

Sliman ben Sail homme.
Mohammed bel Fadel –
Fatma bent Salah femme.
Vingt-huitième tente.

Abdel Hakem ben Eddjilani chef de tente.
Kaddour ben Eddjilani homme.
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMA.N BEN QADDOUR

Mohammed ben Eddjilani homme
Rebiha bent Bou Haffs femme.
Fatma bent Bou Hamama –
Kheira bent Abdelhakem petite fille.
Abdel Hakem ben Abdelhakem petit garçon.
Vingt-neuvième tente.

Om Khalifa bent Said chef de tente (femme).
Fatma bent Mazouzi femme.
Kaddour ben Mazouzi petit garçon.
Trentième tente.

Halima bent Bou Haffs chef de tente (femme).
Mohammed ben Moussa petit garçon.
Reqia bent Moussa petite fille.
Trente et unième tente.

Maamar ben Khalifa chef de tente.
Aicha bent Kaddour femme.
Fatma bent Ali –

Mira bent Maamar petite fille.
TENTES QUI étaient internées DANS LA SUBDIVISION DE BATNA.
Première tente.

Ben Douaïa ben Mamar homme.
Abderrahman ben Mamar –

Mohammed ben Mamar –
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ARCHIVES MAROCAINES

Milout ben Mamar homme
Khadija bent Mamar femme.
Tenia Lent Mamar
Embarka bent El Hachimi
Kheira bent El Hadj
Moukhalifa bent Maamar
Embarek hen Maamar petit garçon.
Ba Ilaous ben Maamar –
Deuxième tente.

Mohammed bel Djilali chef de tente.
Ahmed ben Djilali homme.
Kaddour ben Djilali –
Allai ben Djilali –
Safia bent Cheikh femme.
Fatma bent El Hadj –
Kheira bent Cheikh –
Batna bent Cheikh

Cheikh ben Mohammed petit garçon.
Djilali ben Mohammed –
Sliman ben Mohammed –
Khenadda bent Mohammed petite fille.
Troisième tente.

Bou Haffs ben Attala chef de tente.
(Cousin de Sliman ben Kaddour.)

Moulferah ben Kaddour homme.
Fatma bent Djilali femme.
Fatma bent Ba Hous –
Teilia bent Mohammed –
Kaddouin bent Ba Haous –
Teilia bent Ba Haous –
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BEN QADDOUR

Aicha bent Ba Haous petite fille.
Remlia bent Ba Haous –
M’harek ben Ba Haous petit garçon.
Quatrième tente.

Bou Hafs ben Cheikh chef de tente.
(Cousin de Sliman ben Kaddour.)

Larbi ben Cheikh homme.
Salem ben Cheikh –
Hamadou ben Cheikh –

El Mana bent Cheikh femme.
Fatma bent Attala –
Zaouia bent Cheikh petite fille.
Oran, 17 seplembre 4876.

Pour le chef de bataillon,

Directeur des Affaires indigènes en mission.

Le Capitaine,

Signé DE Breuille.

Sétif, le 28 août 1876.

Pour le générai commandant la subdivision,

P. O. le capitaine, chef du bureau arabe P. I.

Signé Wolff.

Pour copie con forme.

Pour le chef de la section des Affaires

indigènes de l’état-major général en mission.

Le Chef de bataillon sous-che f.

Signé A. STROHL.
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ARCHIVES MAROCAINES

Depuis 1876, des changements ont été apportés dans la
composition des Oulad Sidi Cheikh R’araba, campés à
« Souhelah » dans le « Bled El Ahmar », près de Marra-
kech.

Quelques-uns ont suivi Si Sliman ben Qaddourl dans sa
fuite d’autres ont rejoint plus tard Sidi Allai ben Cheikh
ben Et Tayeb, dans le Sahara; d’autre part, de nouveaux
immigrants sont venus à différentes époques et, depuis
trente ans, de nouvelles tentes se sont formées, par les
enfants mêmes des premiers émigrés.

Aujourd’hui, les Oulad Sidi Cheikh R’araba, établis
auprès de Marrakech, comptent 58 tentes, dont la liste a
été dressée par les soins du Hadj Mohammed ben Cheikh
ben Mohammed ben Zeyan, un des internés de 1876 et qui
vient, sur sa demande, d’être reconnu comme sujet fran-
çais.

Si El Hadj Mohammed a donné, pour quelques-unes de
ces tentes, le détail complet de leurs habitants.
LISTE ACTUELLE DES OULAD SID[ CHEIKH ÉTABLIS A TROIS
HEURES ENVIRON DE MARRAKECH, A SOUHELA.

NOMBRE DES TENTES ET NOMS DE LEURS CHEFS.

Oulad Ben Zyan ben Abdelhakem.

1. Si Larbi ben bou Haouç ben Et Tayeb. Moqaddem
nommé par le Sultan.

2. Son frère Bou Douaia (ils ont entre eux 5 fils et
7 filles).

1. Si Sliman ben Qaddour n été assassiné en 1883, à Bouchaouen, par
les Berbères. Voir Archives marocaines, vol. XI, n° 1, « Les Musulmans
d’Algérie au Maroc p. 9.
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SLIMAN BKN QADDOUR

3. Si Abdallah ben Bou Beker ben Bou Haouç ben
Et Tayeb (2 femmes, ] fille).

lx. – Mohammed ben Bou Beker (1 femme, 1 fils et 5 filles).
5. Maamar ben Bou Beker (1 femme et 1 fils).
6. Ahmed ben Bou Beker (1 femme, 1 fils et 2 filles).
7. El Hadj Mohammed ben Zyan,

8. El Hadj Qaddour ben Zyan (avait été interné en
Corse).

9. El Hadj Bou Hafs Omar ben Zyan.

10. Abdallah bel Hadj.

11. Sliman bel Hadj Omar.

12. Moustafa bel Hadj Qaddour.

-13. El Hadj Mohammed ben Abdelqader.

14. Çanad (?) ben Mohammed.

15. – Abdelkcrim ben Zyan.

16. – Mohammed ben Azzab.

17. – Moula El Frâa ben Nifouf.

18. Mohammed ben Sliman.

19. Djelloul ben Abdelhakem.

20. Ahmed bel Habib.

21. Mohammed bel Hadj Medjdoub.

22. Et Tayeb ben Sliman.

23. Sliman ben Et Tayeb.

24. Bou Alam ben Abdelhakem.

25. Cheikh ben Djelloul.

26. Mohammed ben Driss.

27. Qaddour ben Mazouzi.

28. Mohammed bel Hadj Mohammed.

29. Et Taher ben Abdelhakem.

30. El Gourari bel Hadj (son père vit encore à Rezaina)
(II fils, 3 filles et leur mère).

31. Sliman ben Aissa (3 fils et 3 filles et leur mère).

Rezaina.
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ARCHIVES MAROCAINES

32. Bou Haouç ben Aissa (1 femme, 2 fils et 1 fille).
33. Et Tayeb ben Aissa (1 femme, 2 fils et 1 fille).
34. Sliman ben Miloud (1 femme, pas d’enfants.)
El R’ouat.

35. Ahmed ben Mançour.

36. Abdelqader ben Mançour (1 femme, 5 fils et 3 filles).
37. Mançour ben Mançour (1 femme et 1 fils).
38. Mohammed ben Mançour (1 femme, 3 filles et 3 fils).
39. Larbi Et Trech (1 femme et 1 fils).

40. Mohammed ben Miloud.

El Mâbed.

41. Abdelqader ben Abdelhakem (1 femme et 1 fils).
42. Sliman ben Es Sayah (h femmes, 11 fils et 4 filles).
43. Ahmed ben Abdallah ben Saad, originaire d’Ar-
baouat (1 femme, 2 fils et 1 fille).

44- – Qaddour ben Ali (sa mère, 1 femme, 5 fils et 2 filles).
45. Ed Djilani ben Ali (1 femme, 3 fils et 1 fille).
46. Abdelqader ben Mohammed, originaire des Kerarma
(sa mère, sa femme et pas d’enfant).

47. Bou Alam ben Et Taher, des Oulad En Nahar(2 fils,
3 filles et leur mère).

48. – Mohammed ben Bou Aalem, des Oulad Bou Douaia
(sa mère et sa femme).

49. Et Tayeb ben Eddin, des Oulad Sidi Hamza. Il était
avec Bou Amama et n’est venu à Marrakech qu’il
y a cinq ou six ans (1 femme et 1 fille).

50. Mohammed bel Hadj Mohammed ben Bou Beker,
des Oulad Sidi Ahmed ben Sliman, et 2 de ses
frères (la tente comprend 7 femmes).
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INTERNEMENT AU MAROC DE SI SI-IMAN BEN QADDOUR

Esclaves affranchis de Sidi Bou Haouç ben Et Tayeb,
51. Sliman bel Hadj El Miloud (2 enfants sa tente com-
prend 11 femmes, entre ses femmes et ses filles).
52. Bou Haouç bel Hadj El Miloud (2 enfants sa tente
comprend 12 femmes).

53. Mohammed bel Miloud, fils de la sœur du précé-
dent (il a dans sa tente ses 2 frères, ses 3 sœurs
et sa mère).

51t. En Nacer ben Ed Djilani, des Abid Sidi Cheikh (sa
femme et la sœur de sa femme).

55. Mohammed ben Mousa.

56. Embarek ben Belal (une femme, pas d’enfants).
57. Salem ben Belal (1 femme, 2 fils et 2 filles).
58. M’hammedben El Mouilid, venu deTouat(l femme,
2 fils et 2 filles).

Les autres tentesdes Oulad Benyan ben Abdelhakem sont
pour la plupart chez les M’haia et chez les Beni Guild.
Comme on l’a vu, les négociations entamées par Sid El
Hadj Abdesselam El Ouezzani pour obtenir de Si Qaddour
ben Hamza son émigration au Maroc n’avaient pas réussi.
Après être resté pendant de longues années indépendant
avec son oncle Si Lala, ils se rapprochèrent insensible-
ment de nous Si Qaddour, le premier, faisait sa soumis-
sion en 1892 et Si Lala suivait son exemple quelques
années après.

Le seul chef des Oulad Sidi Cheikh qui n’ait pas aujour-
d’hui fait sa soumission est le fameux Bou Amama, des
Oulad Sidi Cheikh R’araba. Il est certain que si un terrain
de conciliation lui était offert, qui ne fût pas en contradic-
tion avec son incommensurable orgueil, Bou Amama ne
tarderait pas à se soumettre également. Comme la plupart
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ARCHIVES MAROCAINES

de ces chefs d’insurrection, il a été dupe de l’importance
qu’on avait cru devoir y attacher, et il lui est pénible
d’avouer qu’il a été lui-même trompé par les illusions
qu’on s’était faites sur son compte.

On peut donc dire qu’à l’heure qu’il est, la très grande
majorité des Oulad Sidi Cheikh a fait sa soumission à la
France. Il en reste cependant un assez grand nombre au
Maroc et, sans parler de ceux qui habitent les M’haïa, les
Beni Guild, le Douï Menia, les Oulad Djarir et le Tafilelt,
on en compte dans le R’arb, dans la plaine du Saïs 1 et
près de Marrakech près de deux cents tentes.

De même que les Oulad Sidi Cheikh soumis à’notre auto-
rité représentent une véritable force dans le Sud algérien,
ceux qui se sont réfugiés au Maroc ou qui y ont été tran-
sportés, dans des circonstances que le temps a modifiées,
peuvent, dans l’état de choses actuel, être pour nous un
élément de pénétration qui mérite de n’être pas négligé.
1. Archives marocaines, vol. XI, n° 1, « Les Musulmans d’Algérie au
Maroc «, pp. 5 à 11.

ED. Michaux-Bellaire.
Vue 363 sur 510

L’INDUSTRIE A TÉTOUAN
(suite)

G. LES INDUSTRIES DU MÉTAL

Les industries du métal comprennent à Tétouan
1° L’industrie des armes

2° Celle des forgerons

3° Celle des maréchaux ferrants

4° Celles des fondeurs en cuivre

5° Celle des chaudronniers

6° Celle des ferblantiers

7° Celle des bijoutiers et orfèvres

8° Celle des ciseleurs-guillocheurs sur cuivre
9° Celle des damasquineurs-nielleurs.

A cette liste, il faut ajouter deux ou trois horlogers eu-
ropéens, Juifs ou Musulmans.

1

L’INDUSTRIE DES ARMES

L’industrie des armes, à Tétouan, date de plusieurs
siècles déjà; elle comportait autrefois, outre la fabrication
des fusils, celle des armes blanches cependant cette der-
nière branche de l’armurerie y fut toujours fort réduite.
Seule aujourd’hui, la fabrication des fusils subsiste en-
Vue 364 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

core a-t-elle perdu presque toute son importance elle
n’appartient pas non plus tout entière aux industries du
métal, puisque les fabricants de fûts sont absolument dis-
tincts de ceux qui font les canons et de ceux qui font les
batteries. L’armurerie comprend donc, à Tétouan, trois
métiers absolument différents installés dans des locaux
séparés

Fabricants de canons (Dja’îbi, plur. Dja’îbiya1);
de batteries (Znâi’di,plur. Znâïdiya-)
de fûts (Srâïri, plur. Srâïriya 3).

Nous parlerons de ces derniers aux industries du bois.
1° Fabricants de canons (Dja’ibiya). Les fabricants de
canons sont installés à Soûq Ezzra\ aux Trankât et
à Elr’arsa Elkebira.

La matière première est achetée par eux à un Musul-
man et à un Juif qui l’importent d’Europe et la vendent
de Ob. 35 à 0 b. 40 1e Betal ‘Attdry (500 gr.). C’est de
l’acier doux, dit Hadîd Artobi. Le métier est peu lucratif,
quoique pénible. Le loyer du local, toujours exigu, est
compris entre 6 et 8 basîtas. Un ouvrier ne gagne guère
plus de 0 b. 75 par jour. Le manœuvre qui tourne le vo-
lant du banc d’oeuvre gagne souvent moins encore (à peine
0 b. 50). Il faut, en effet, trois jours pour fabriquer un ca-
non et celui-ci se vend au prix moyen de 7 basîtas 50.
Le canon (Dja’aba0) est fabriqué par les procédés sui-
1. plur. *–»»̃.

2. i£-kjjj plur. i_jjj

3. ~$ P~ur. 4~ J.

4. ^J=>J -bJLs-.

5. If?-‘
Vue 365 sur 510

24

Nomenclature du fusil télouanais.
“Janon, Dja’aba, 4,»:

C, Capucines, Rbûli, ^=\ j-

Fût, Srtr, ^^y>

Baguette, Medekk, ct)-«.

Logement de la baguette, Trlq Elmedeltk,
J-61 ~ÿ. Jb.

Chien ou batterie, Znèd, .slij.

Culasse (portée plus épaisse, plus grosse,.plus
solide où se loge la charge), K/izâma, 4-olti-.
Pontet, Elhâdi, ^UJL

D, Briyâl, Û>1> j>

E, Étranglement de la crosse, Eççeba’, –J\
F, Col de la crosse, Drèâ’, e-lj j. 1.

G, Joues de la crosse, ûdrerna, £«jLi.
Loge de la batterie, Madreb Ezznèd, ,_< j, ̃>» i
.~L

il, Partie ajustée entre la crosse et la plaque de
couche, Ziyâq, J)lO •

I, Plaque de couche, Ourâya, iij_J-
K, Le guidon, Debbdna, *jwi.

L, La mire, Nîchèn, ô^

M,’ Lumière, petit trou par lequel le feu de la
batterie se communique à la charge, Bokhch,
J~

Dimensions Canon = 1 m. 40. Partie du
G canon dépassant le fût = 0 m. 11.

Crosse, du menton (D) à la
pointe de la plaque de cou-.

che = 0 m. 52 du menton au
<^ f col (F) = 0 m. 30. Longueur ̃ ̃^y" de la plaque de couche, d'une pointe à l'autre = 0 m. 20. Vue 366 sur 510 ARCHIVES MAROCAINES vants 1° forgeage 2° alésage 3° polissage 4° finissage. A. Forgeage. L'ouvrier prend trois bandes de fer appelées Basil1, ayant environ 1 m. 20 de longueur. Il les chaufle pour les rendre plus malléables et les roule en hélice, côte à côte, sur une verge de fer puis il les mar- Forge de fabricant de canons de fusil. 1. Soufflet. 2. Foyer. 3. Auge à eau. telle et les forge de façon à produire l'adhésion des bords les uns avec les autres. Pour faciliter cette adhésion, on sau- poudre, en forgeant, de limaille de fer. On a, en résumé, un tube à âme très étroite et fruste, à parois très épaisses 2. 1~ La. plur. £2. L'art de fabriquer des canons avec des rubans de métal, dit Budgett Vue 367 sur 510 L'INDUSTRIE A TÉTOUAN B. Alésage. Il s'agit alors cl aléser la pièce au calibre voulu. L'appareil dont on se sert pour ce faire est un banc d'œuvre appelé Bânk 1. Il consiste en une traverse hori- zontale, de peu de largeur, portée par deux pieds de bois dits Ouaqqâf (plur. Ouqâqef-). Sur la traverse, on place, posée dans le sens de la longueur, une sorte d'augette en Disposition du canon sur le banc d'oeuvre. 1. Banc. 2. Augette. – 3. Canon. 4. Coins. 5. Pontet. bois, longue, à peine plus large que le canon à forer, à section rectangulaire, dite A/ejerr3, qui peut se mouvoir d'avant en arrière sur le banc, mais qui ne peut s'écarter latéralement de sa position, car elle est maintenue dans ce sens par deux rebords longitudinaux du banc d'œuvre dits Fesâqi^. Dans l'augette, on dispose le canon il se trouve maintenu solidaire avec elle par le moyen de coins Meakin (The Moors, p. 200), passe pour avoir été transmis aux Maures par un Portugais fait prisonnier à la bataille d'El Kgar. Le même auteur rapporte d'après Hay (p. 154) que, d'après la tradition, un Maure aurait découvert le secret du procédé un jour que, déguisé en Juif, il était occupé (dans une possession espagnole ou portugaise sans doute) à blanchir l'atelier d'un armurier chrétien. 1. dU. 2. ^jfei plur. i– f»l»J. 3. 4. Le singulier est « Fesqiya », *J–J plur. ^LmS. 1-1 2- "•>*

(Coupe transversale)
Vue 368 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

en fer dits Lezâïz*, enfoncés à grands coups de marteau
entre la masse et deux pontets en fer dits Kherâïç (sing.
Khorça 2) fixés aux bords de l’augette et sous lesquels il
passe. Le foret cylindrique en acier doux s’appelle Ber-
rimak Il est porté par le moyeu en fer MovzeV-* d’un
volant (Toûrnoâ6), de 2 mètres de diamètre, environ, qui
se meut dans un plan perpendiculaire à celui du foret et
du canon à forer, sous l’action d’une manivelle dite
Manouîla1. Le foret s’emmanche sur le moyeu par une
tête carrée enchâssée dans une cavité de même forme,
dite BU Elmor’zel 8; l’adhérence du foret et du moyeu est
augmentée au moyen d’un peu de cendre mouillée. Il est
clair qu’en tournant, le volant entraîne dans son mouve-
ment le foret dont la tête libre, plus ou moins en forme de
fraise, en contact avec l’extrémité du canon, y pénètre
peu à peu en l’alésant. Il faut évidemment maintenir le
canon constamment pressé avec force contre la tête du
foret, pour que celui-ci continue à l’entamer au fur et à
mesure qu’il fait son chemin. Pour cela, on se sert d’un
contrepoids dit Thaqqâl 9 pendu à une poulie Jerrâra 10
i. j.y.

S. Kua^- plur. tja>\j>

3. Appelé « Hend,. » -UA.

4. 4.o~i;·

6. Jji*.

6. y j y?. Le mot est évidemment d’origine européenne.
7. *X>y*. C’est un mot d’origine espagnole.

8. J_J»jJ| iJi^

9. JUT.

10. S j\ja-
Vue 369 sur 510

1 Manivelle. – 2. IJcr’zeUmoyou’ –3. Ttiàrnoû (Volant;. – 4. Ouaqqûf (\>iei\s, Làlis) 5. Biink ib.nnc). «. ilejer,
(augetle). – 7. Thaqqûl contrepoids). – 8ct9. 9. Poulies. 10. – Berrlmn (Foret;.

Banfi d’œuvre des fabricants de canons.

r

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o

O

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s

^5
Vue 370 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

fixée au plafond ce contrepoids tend fortement une
corde passant sur une seconde poulie fixée au bâti du
volant, munie à son extrémité d’un crochet, R’antchoû • ce
dernier s’accroche au pontet de l’auget le plus éloigné du
volant et tend constamment à le rapprocher davantage de
celui-ci, ainsi que l’auget lui-même et le canon qu’il ren-
ferme.

On passe successivement des forets de plus en plus
gros, jusqu’à ce qu’on ait obtenu l’âme de la section vou-
lue. Il faut, naturellement, arrêter souvent l’opération et
dégager le canon pour le débarrasser de la limaille de fer
qui s’accumule à l’intérieur. On vérifie, chaque fois, la
marche de l’opération en passant dans le canon des balles
de fer calibrées, cylindriques, dites Goualeb2.
C. Polissage. On passe ensuite au polissage. Pour
cela, on enfile le canon sur une verge de fer cylindrique
placée horizontalement, et dont les deux extrémités repo-
sent sur deux pieux fichés debout en terre, dits Ouqâqef.
L’ouvrier lime d’abord la pièce c’est un travail plus ou
moins long, plus ou moins difficile, suivant qu’il s’agit
de l’arrondir ou de lui faire des cannelures, des pans
coupés, etc. Le polissage se fait après, l’ouvrier maniant
des deux mains à la fois une large et solide râpe de fer
dite Meçeqla 3 et un cylindre de fer dit ‘Aoud Eççeqîl’1,
d’un diamètre de 3 à 4 centimètres, long comme la râpe,
de 15 à 20 centimètres. Le canon se trouve pris entre
les deux, c’est-à-dire entre la râpe d’un côté et le polis-
1. » i* ̃ P. Le mot est d’origine espagnole (gancho).

2. wJiji, le singulier est «_JU.

3. 4.LL^»; delà racine Çeqel, <>=>, polir.

4. tLjLaaJl Jjft. C’est-à-dire la tige à polir ». Le mot <_Ui«» signi- fiant >< polissage ». Vue 371 sur 510 l'industrie A TÉTOUAN soir de l'autre, passant dans une des échancrures de divers calibres dont est muni ledit polissoir. Bien entendu, il s'agit de frotter le canon sur toute sa sur- face en le faisant tour- ner sur son axe et en te- nant le polissoir et la râpe plus ou moins obli- quement, plus ou moins Position du canon entre la râpe (1) et le polissoir (?) pour le polissage. verticalement, plus ou moins horizontalement. D. Finissage. II faut encore, pour achever le canon, forer la chambre où se vissera la queue de culasse qui obturera l'âme à l'extrémité postérieure du canon et servira à fixer celui-ci sur le collet de là crosse. On fraise avec un taraud dit Déker1. La queue de culasse (Qlâta%), for- gée à part, est filetée dans la partie utile au moyen d'une filière européenne dite Tarrâcha3 Enfin, on visse la Mire du fusil Tétouanais. queue de culasse au moyen d'un tourne-à- gauche ou levier à oeil dit Boûjf1. C'est une plaque de fonte, percée en son milieu d'un trou en losange dans lequel on engage la culasse et que l'on manœuvre comme un levier. Le point de mire est aussi forgé à part et fixé au canon par une brasure au cuivre, puis la cheminée, lorsque le canon en comporte. Les canons fabriqués à Tétouan sont très longs, en 1. J J. Sans doute par comparaison avec le pénis qui porte le même nom. 2. «.kyi. 3. Ôl^i. S. Vue 372 sur 510 ARCHIVES MAROCAINES général, et dépassent mètre. Ils peuvent atteindre 1 m. 20 ou i m. 30, de sorte que certains fusils atteignent 1 m. 80 de longueur totale. Cependant, on fabrique aussi quelques canons courts, de 80 centimètres environ, pour les fusils à un coup à capsule dits Chkoupita K f"1 l l 1- Canon à Hazèm. certains canons portent des cannelures, des gra- vures, faites après coup, par des spécialistes qui se servent de burins et de marteaux. D'autres ca- nons portent de distance en distance des annelets ou frettes en fer qui les renforcent et sont dits Hazèm 2. Le même nom, dans le sud du Maroc, s'applique à la partie de la batterie dite à Tétouan Hirz 3. Lorsque les canons sont achevés, ils sont vendus aux monteurs ou fabricants de fûts. Le métier de fabricant de canons est en pleine décadence. Chaque fois qu'il meurt un artisan, il n'est pas remplacé, et le chiffre du personnel va diminuant de jour en jour. 2° Les fabricants de chiens et de batteries.- Les fabricants de chiens et de batteries (Znâïdiya) sont établis à Soûq Ezzra' Zenqel Bâb Ettoût, au Feddân et aux Trankât. Ils paient un loyer de 6 à 8 basîtas par mois, sauf au Fedddn, où le loyer est plus cher (11 à 12 basitas par mois). Le métier passe pour bon. En effet, un bon ouvrier peut faire, dans sa journée, une batterie; s'il a un apprenti ou un fils qui l'aide dans son travail, il peut faire trois batte- ries en deux jours. Or, suivant la qualité, une batterie vaut de 10 à 20 et même quelquefois 25 basîtas; la matière première est évidemment fort peu de chose. 1. De l'espagnol escopeta. 2. fjj*" plur. (*ib* 3. j^ Voir la nomenclature de la batterie. Vue 373 sur 510 1. INDUSTRIE A TÉTOUAN Les Znâ'i'diya fabriquent des chiens de fusils, des bat- teries Znèd1 à pierre, des vis Loûleb- pour les assembler. Tous ces objets sont trop connus, pour qu'il soit utile de les décrire la nomenclature de la batterie, telle qu'on la connaît à Tétouan, est indiquée par le croquis ci-joint. Coupe de la culasse et de la queue de culasse. Mais il convient d'ajouter que l'on trouve des batteries fort belles avec leurs ressorts bleu de Prusse ou violet améthyste, certaines pièces bronzées dans une gamme qui varie des tons les plus foncés aux plus clairs, depuis le brun jusqu'à la patine presque dorée, des filigranes, des damasquinures en argent, etc. Dans certaines batte- ries, les vis sont à tête perdue, ce que l'on appelle Louâleb Medqoûqîn*. Les fabricants de batteries de Tétouan ont pour concur- rents ceux de la montagne, aussi habiles et même quel- quefois plus, mais horriblement astucieux et trompeurs. Ces artisans travaillent presque toujours sur commande 1. Jl-?y. laquelle appartient, notamment, ^_jjj
enfoncer en tournant (Sud Algérien).

3. ^ji^pX» »_Ji_jJ littéralement battues, frappées, enfoncées •>.
Vue 374 sur 510

BATTERIE TÉTOUANAISE (Vue extérieure)

N
Vue 375 sur 510

BATTERIE TÉTOUANAISE (Vue intérieure)

lz.x

-1-J.

Cj
Vue 376 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

et chaque commande est appuyée, au début, d’une petite
provision d’argent avec quelques cadeaux. L’artisan se
met à l’oeuvre, la faisant durer le plus possible. Quand le
client vient prendre livraison, il lui dit invariablement
qu’il n’a pas terminé, mais qu’il peut revenir dans quatre
ou cinq jours cela se reproduit plusieurs fois, jusqu’à ce
que fatigué, ennuyé, le client vienne enfin s’établir chez
le fabricant et n’en bouge plus qu’il ne l’ait vu achever la
pièce demandée. Mais en attendant, il a laissé quelques
cadeaux à chaque visite, du beurre, des œufs, du fromage,
des fruits, des légumes, etc., et l’artisan ne s’est pas
privé de vendre, en cachette, à Tétouan, toutes les pièces
qu’il a pu achever dans l’intervalle, sans se donner beau-
coup de peine.

II

LES FORGERONS

Les forgerons (Haddâd, plur. Haddâdîn), tous Musul-
mans, sont, pour la plupart, groupés à Zenqet Elhaddâdîn
à laquelle ils donnent son nom, entre Ettrankûl et Elmë-
choudr.

Le métier est assez lucratif, paraît-il le loyer est de
11 basîtas, en moyenne un ouvrier gagne 2 basîtas 50 à
3 basîtas par jour un apprenti environ 0 b. 50.
Le fer est importé d’Europe et vendu aux forgerons par
les Juifs au prix de 0 b. 20 à 0 b. 25 le Retal ‘Attâry
(500 grammes environ). En général, il provient de démo-
litions, surtout de démolitions navales, et arrive sous
forme de chaîne d’ancre, par exemple.
Vue 377 sur 510

L’INDUSTRIE A TÉTOUAN

Les forgerons ont un syndic (Amin) nommé par le
Mohtaseh. C’était en 1904-1905 un nommé Mezoaâq.
Les outils dont se servent les forgerons sont
Une sorte de tricoise appelée Blz Ennâr{;

Une pince à feu – Laqqât (TEVâfia 2
Des marteaux – Matarqa,])lur.Metâreq3;
Une enclume – Zobra 4

Des tenailles – Kollâb5;

Un étau – Zeyyâr0.

Le foyer est monté sur le même plan que celui des
armuriers fabricants de canons de fusils mais il est
quelquefois plus primitif et manque, en général, d’auge
à eau.

Les principaux objets fabriqués par les forgerons
sont

Les fers à ferrer les bêtes (Çfiha, plur. Çf’âïh)
Anneaux de fer

Serrures (Zekroûm, plur. Zekârem)è;

i. jldlj-.

2. ijUljJ=>UJ.

3. *ijb* plur. i_jjUa-«.

*• *J.->-

5.

6. j\j.

7. Ax*jl*s plur. ̃rz-Aa^s.

8. fijj plur. fjL5j.
Vue 378 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

Clefs ( Tsdroût, plur. Tsouâret)

Mer’ezza 2;

Faucilles (Menjel, plur. Menâjel) 3

Socs de charrue (Sekka, plur. Sekek) 4;

Pioches, herrninettes (Qâdoûm, plur. Oouâdem)”
Alènes (Echfa, plur. Echâfl) 6 vendues 16,25 les 2;
Fer à souder (Kaououâï) 7

Fers pour prisonniers (Qebâl) s, ou entraves pour les
animaux (même nom)

Des pontets, des capucines de fusil, en fer;

Des barreaux de fer pour mettre aux fenêtres.
Ils sont encore assez habiles pour fabriquer

Des rampes d’escalier;

Les membrures de fer des cages vitrées que l’on place,
pour les recouvrir, au-dessus des cours intérieures des
maisons

Des balustrades de balcon

Des grilles pour fenêtre (Chebbâk, plur. Chbâbek)*.
1. >li5J« plur. £jj[y. C’est le berbère il>JJ« clef. Le mot arabe
« Meftdh » f”^?-* n’est guère employé dans le nord marocain souvent
même il n’y est pas compris.

2. ïji*.

3. jJstU plur. b^S.

3. S[j** Plur. jjl^.

4. A,

fi. ïS^s>- plur. oLw»-.

~· C~.Jy-

7. ib, j p]ur_ ^^J.
Vue 383 sur 510

L’INDUSTRIE A tétouan

tif l’apprenti gagne 0 basîta 50 à 0 basîta 75 quand il
commence à rendre quelques services; plus tard, devenu
ouvrier, il touchera 2 hasîtas 50 par jour environ.
Les objets façonnés se vendent au poids, au prix de
C\ 1_· n 1_ nr 1- n_r

2 basitas à 2 basîtas 25 le Retal
‘Attâry (500 grammes).

L’outillage d’un fondeur de
cuivre est des plus simples, il
-comprend

De toutes petites enclumes car-
rées, terminées par une pointe
en bas et que l’on fiche dans
des billots de bois. Ces enclumes
sont mobiles. Une ou deux autres

Enclume des ferblantiers, fon-
deurs, bijoutiers, etc., etc.

sont fixes, mais installées de même sur des billots très
bas, de façon que l’ouvrier puisse toujours travailler assis.
Des pinces à feu;

Un fourgon à feu

Des creusets

Une grande cuiller à feu

Un marteau

Des tenailles

Un foyer.

En plus, quelques caisses, quelques tasses en métal ou
en terre pour mettre l’eau, le sable, la terre, pour serrer
les outils, pour emmagasiner les bandes de fer (cercles de
roues ou de tonneaux en fer mince et malléable) dont on
se sert pour cercler les moules, ainsi que les débris de
cuivre, de laiton, de zinc, enfin quelques vieux bidons à
pétrole dans lesquels on conserve des provisions d’eau
plus considérables que celles contenues dans les tasses et
vases de terre, et aussi le charbon. Tout cela distribué
Vue 384 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

pêle-mêle dans la pièce étroite, ou bien pendu au mur
clans un pittoresque désordre.

Anneau de cuivre ajouré, dit Khrtç, fabriqué par les fondeurs en cuivre-
Le charbon employé est souvent celui de JRetem (voii-
ci-après aux chaudronniers).

Le foyer (Ad/!OHn) et les moules méritent seuls un
description particulière.

Le foyer est un simple trou carré, pratiqué dans le sol,
et garni sur son pourtour d’un rang de briques posées de
champ au fond aboutit une tuyère en terre (?). Un soufflet
se trouve à proximité, sur le sol, protégé contre les ardeurs
du feu par une petite murette mince de 40 à 50 centimètres-
de haut. Ce soufflet {Râboûz) 2 se compose d’une outre
J. ~LT

2. -Jy.J- Le nom de « Ktr » j-J est réservé au soufflet de forme
européenne des orfèvres-bijoutiers. Celui de « Bâboûz » s’applique aux
Vue 385 sur 510

l-‘lNDUSTltlE A TÉTOUAN

̃sèche (Mêzouedj munie à sa partie supérieure d’une
barre de bois poiu- la facilité de la manœuvre. Celle-ci se
lait de liaul en bas, verticalement; l’ouvrier manie d’une

Foyer et soufflet des fondeurs de cuivre.

main le soufflet tandis que de l’autre il attise le feu, pose
•ou retire les creusets, etc.

Les moules (Qâleb, plur. Qouûleb)- sont faits d’une
‘terre sableuse provenant à’Ettouîla, croupe qui accidente
le pied du Djebel Darsa, à 3 ou kilomètres au nord de
Tétouan. Cette terre, d’un jaune pâle, devient rouge brun
;après avoir subi l’action du feu. Pour donner plus de soli-
•dité aux moules, on les cercle avec des bandes de fer, s’ils
sont de petite taille et, s’ils sont plus grands, on les éta-
blit dans des caisses défoncées, dont les côtés leur servent
•de membrure extérieure. Comme d’habitude, les moules
̃se composent de deux parties qui s’assemblent par tenon
soufflets domestiques (de fabrication européenne) et aux soufflets cons-
titués par des outres de formes variées.

1. *J^}a plur. ^J’Jf”.

2. Jli plur. t-J|>
Vue 386 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

et mortaise ou mieux par creux et bosses on laisse, dans.
une extrémité, un trou pour verser le métal fondu. Pour
la commodité du maniement, les moules sont réunis par

Presse à moules des fondeurs
en cuivre.

trois ou quatre dans une sorte
de presse appelée 2~e~d~’ 1
composée d’un cadre de bois
que l’on serre au moyen de
deux vis à tête mobile.

Les creusets (Bout, plur.
A bouât) sont achetés en Eu-
rope, surtout à Gibraltar ils
valent 2 à 3 douros espagnols
(10 à 15 pesetas) et durent peu
de temps.

Les fondeurs en cuivre em-
ploient surtout, comme ma-

a

tière des objets qu’ils façonnent, un alliage de laiton
(Çfâr) 3 et de zinc (Toûtiya) 4.

V

LES CHAUDRONNIERS

Les chaudronniers (Qzâdrî) 5 se trouvent aux Iladdâdîn
(près la porte de Mechoaâr) à Karsa Elkebîra, à Zenqet
i. jVj.

2. Joy plur. «l^l-

3. j^*&, c’esL-à-dire jaune,

4. “^>_y ̃

5. <£J3>\£ plur. \jl>\£. Du mot « Quzdir » j^J? étain (régu-
Vue 387 sur 510

L’INDUSTRIE A TÉTOUAN

Elmoqaddem et à Soûq Elhoûl. Ce sont tous des Musul-
mans. L’un d’eux, originaire de Constantine, est établi à
Tétouan depuis sept ans environ 1.

Le loyer de leurs boutiques est à peu près de 10 basîtas
par mois l’ouvrier gagne 2 basîtas par jour l’apprenti
ne gagne rien pendant les deux ou trois premières années,
on lui donne ensuite quelque chose, suivant les services
qu’il peut rendre. Le métier passe pour assez lucratif.
Les chaudronniers se servent de charbon de Retem
presque exclusivement, pour leur travail, probablement
parce qu’il dégage beaucoup de chaleur, ou passe pour tel.
La matière première est le laiton, vendu par les Juifs en
grandes feuilles de 5 mètres de long sur Om. 50 ou 1 mètre
de large, au prix de 2 basîtas le Relal ‘Attàry (500 gr.).
Les chaudronniers fabriquent

Des Keskès 3, vendues environ 7 basîtas 50
Des marmites [Qodra, plur. Qodârî) l 12 50
lièrement y-a’ qaçdir), parce qu’ils sont étameurs en même temps
que chaudronniers.

1. La chaudronnerie est en effet une branche d’industrie qui fut autre-
fois très développée à Constantine et qui y a conservé une importance
relative.

2. mj. C’est une plante qui ressemble au genêt. Une espèce (Rataura
bovei) est très répandue sur les bords de la Méditerranée, à Tanger, à
Tétouan, etc. Elle y atteint la taille d’un petit arbuste ses jolies fleurs
blanches odorantes, sa ramure grèle et souple, presque dépourvue de
feuilles, en font un des ornements les plus caractéristiques des dunes.
3. ^ixJj On connaît cet instrument, sorte de tronc conique, qui
sert à faire cuire le couscous à l’étuvée. Ce sont surtout les pèlerins se
rendant à la Mecque qui emploient les « Keskfcs » de cuivre, com.no incas-
sables, pour faire leur cuisine en cours de voyage, sur le bateau qui les
emporte, en caravane, etc.

4. i)-W plur. t£jW
Vue 388 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

Des poêles en cuivre, sans queue (Mogla,

plur. Mogâli) 9 basîlus
Des bouilloires à bec dites Kafalîra, pl.

Kafalîrûl”- 2. 11 t –
Des chaudières (Qâzûn, pl. Qouâzen)* 16 douros
Des bassines (Tanjera, pl. Tnûjer) ‘<. 5 – Des cuves à teindre (Khâbiya d'Eççbra, pl. Khouâbî) • 10 – II va sans dire que les prix ci-dessus n'ont rien d'absolu, ils varient suivant la taille des objets fabriqués et aussi, plus ou moins, suivant les cours du cuivre en Europe. Les chaudronniers de Tétouan sont habiles, mais leur métier n'offre rien de particulier. VI LES FERBLANTIERS Les ferblantiers (Djouâlqî, pl. Djouâlqiya) ° sont sur- tout des Israélites un seul est Musulman. 1. iyu plur. ti^ Ces poêles servent à faire griller le café, par «xemple. 2. \j.\ap plur. Zj\j^sJ) C'est une corruption du mot espagnol Cafatera. 3. ij^jtë plur. jj|y. Il y en a de formes diverses. Celles des cafés maures sont quelquefois de fort grande taille. 4. ij>^ plur. jr~^>.

5. ̃>-̃ ^»’l *>

– plur. £*ûJu=-, du mot ij^T” fer-blanc.
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l’industrie A tktouan

On les trouve à Soûq Enneijyârtn, Solkj Ettarrûfîn et ii
Soûq Elkoût, enfin au Mellûh.

Ils paient un loyer de 9 à 10 basîtas par mois. L’ouvrier
gagne 3 à k réaux hassani par jour (0 basîta 75 à 1 basîta).
L’apprenti demeure 6 à 7 mois sans rien gagner; on lui
donne ensuite 0 basîta 50 environ par semaine. Le métier
est peu lucratif, comme on le conçoit d’après les prix
précédents, et le patron gagne lui-même au plus 2 basîlasôO
à 3 basîtas par jour.

Comme les chaudronniers, les ferblantiers brûlent à
peu près exclusivement du charbon de Relem.
Les matières premières, l’étain (Oazdîr) 1 et le fer-blanc
(Djâloûq) viennent d’Europe.

Le métier n’ofl’re rien de particulièrement intéressant.
L’étamage est pratiqué par voie sèche et le sel ammoniac
(Nchâder)’1 est employé, comme en Europe, pour déposer
et étendre préalablement l’étain sur la surface. Le ferblan-
tier se sert du fer à souder qu’il appelle Ti~oHOKd~ et
qui est fabriqué par les forgerons de la ville.

Les ferblantiers fabriquent entre autres objets
Des lanternes (Fenûr, pi. Fenûrûl) ̃’ yen-

dues de 0 basita 50 à 2 basitas
1.

2. JjV.

3. jjLîJ. En Algérie, jiLïi.

4. £}f.

5. J^ plur. CjIj^s. Ce sont des objets souvenL compliqués de
forme, à pans, dômes, clochetons, etc., rappelant des pagodes, des mos-
quées, etc. Souvent elles son’; ornées de verres dc luxe, ellcs atteignent
des prix assez élevés.
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ARCIIIVES MAROCAINES

Des lampes primitives (Moçbûh, pl. Meçâ-

beh1) 0basîta30à à 0 basita 40
Des bouillotes {R’allâya, pl. Rallâyât1*)

0 basita 50 à 0 – 75

Des cafetières à une tasse (Baqrej, pl.

Beqârej) 3 0 basîta 60 à 0 75
Des tamis à fond métallique, ressemblant à

de très larges passoires (R’erbâl, pl.

Rerûbeul) ‘• 1 »
Des gobelets à puiser l’eau (ffarrâf, pl.

Rerâreuf) :> 0 25
VII

LES BIJOUTIERS-ORFÈVRES

Comme presque partout, dans l’Afrique du Nord, les
bijoutiers (Çeyyûr’îna) sont surtout des Juifs, à Tétouan. Il
y a cependant deux Musulmans aussi, établis à Soûq
Elr’ezel. Quant aux Juifs, on les trouve au Mellûh et aux
Tarrâfîn (un seul). Ils payent, au Mellûh, un loyer de 10 à
1. ^-L«a* plur. rcjLa». Ce sont de petites cuves en fer-blanc pleines
d’huile, dans lesquelles trempent des mèches de coton.

2. i>U plur. ilXMc.

3. fr[y^ plur. 7?j\â

4. J^^i- plur. (J>

5. kJîi^- plur. Jj’y-, Cet ustensile est très usité, dans le même
but, en Andalousie, où il a absolument la même forme.

6. J^éLa.
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l’industrie A tétouan

15 basîtas de 5 à 6 à Soûq Elrezel. L’un des bijoutiers
du Mellâh ajoute à son industrie la vente des Z)er6oH/a 1
(tamhours de basque) et par contre, un autre, Yousef
Lasry 2, ne fait que la fonte et le façonnage premier des
bijoux en or; il ne travaille pas l’argent, et il laisse à des
ciseleurs {Neqqâchîn) 3 dont c’est la spécialité, le soin
de finir le travail.

Ce Yoûsef Lasry est très vieux il a, parait-il, une
véritable compétence, acquise à Paris et à Oran, où il a
résidé longtemps. On le dit fort honnête, très habile,
grand connaisseur en joyaux et pierres précieuses. C’est
un ïétouanais de naissance et d’origine.

Un autre bijoutier juif est de Marrakech un autre de
Mekinez.

L’or et l’argent dont se servent les bijoutiers de Tétouan
proviennent de pièces monnayées, notamment des dou-
blons espagnols en or, estimés environ 80 basitas ici, et des
vieux bijoux. On prétend, dans les milieux européens, que
des Rifains apportent aussi à Tétouan de l’or en poudre
ou en pépites très petites, mais nous n’avons pu vérifier le
fait, bien que nous ayons cherché à le faire, soit que ce
soit une fable, soit que les vendeurs et les acheteurs se
cachent soigneusement pour opérer leurs transactions,
dans un but de lucre facile à comprendre.

La matière première est fournie par le client quand il
s’agit de pièces faites sur commande son poids doit être
égal à celui des bijoux qu’il désire. On compte, comme
1.
Vue 393 sur 510

l’iNDUSTME A TETOUAN

Les Slâsel Eddeheb chaînes d’or;

Du fil d’or ou d’argent;

Et diverses espèces de colliers, en or pour les cita-
dines, en argent pour les femmes de la campagne. Mais
on ne fabrique à Tétouan aucun de ces anneaux de pied dits
KhalkhâlouRdûif1.

Depuis quelques années, la mode de l’or rouge s’est
introduite à Tétouan. L’or jaune, anciennement en vogue,
est facilement transformé en or rouge par le procédé sui-
vant On le chauffe, puis on l’enduit au pinceau d’un
mélange de sel ammoniac (JVchâder), d’oxyde de cuivre
[Hadîda Hamrâ) 3 et d’alun (CAe6&)~; on chauffe une se-
conde fois, on jette du son sur le feu, et l’on retire l’objet
complètement noir on le plonge dans le son, puis dans
l’eau, on lave, on brosse et on essuie. L’opération se
répète trois ou quatre fois, après quoi l’or est devenu
rouge.

L’outillage des bijoutiers est des plus simples. Quelques
creusets, un fourneau, formé d’une caisse sans fond, inté-
rieurement doublée en briques, un soufflet de modèle
européen « Kîr » 5, suspendu au plafond, dans une posi-
tion horizontale, et manœuvré par un aide à la façon des
soufflets de forge, des pinces, une petite enclume porta-
tive, des étaux fixés à terre à de petits billots, quelques
caisses, de vieux bidons, des soucoupes et des plats pour
1. v**JJIJu«5L..

2. JU>Jà- ou i– *J^J.

3. \j»»- S-*jA»-.

4. u»^.

5. ^>-J voir plus haut, note 2, p. IÎS2.
Vue 394 sur 510

ARCHIVES MAROCAINES

déposer les métaux, les rognures de cuivre, d’étain, de
zinc, etc. Tout cela dans le plus grand désordre.
Le métier est lucratif, mais malsain; les boutiques-ate-
liers sont petites, encombrées, elles manquent d’air; les
artisans travaillent constamment assis et le sang circule
mal. De plus, dans l’atmosphère impure de l’atelier, qui
ne prend du jour que par la porte et où jamais on ne peut
établir de courant d’air, les vapeurs d’acide s’accumulent
et prennent à la gorge.

Les Tétouanaises sont avides de bijoux; elles en pos-
sèdent une grande variété, dont nous ferons la description
en traitant du vêtement et de la parure. Certaines cas-
settes sont fort riches. Un bijoutier de Paris (?) vint, dit-on,
il y a quelques années, acheter des joyaux d’origine an-
cienne, car ils s’accumulaient à Tétouan depuis l’époque
̃des pirates, et donna pour une perle une quinzaine de
mille francs (Renseignements indigènes).

VIII

LES CISELEURS-GUILLOCHEURS SUR CUIVRE (Neqqâchîn) {
ET LES DAMASQUINEURS-NIELLEURS. LES HORLOGERS.
Depuis peu (1905), quelques Juifs se sont établis à
Tétouan pour se livrer à la fabrication des plateaux de
cuivre ciselés, repoussés et guillochés. Nous nous abstien-
drons d’en parler avec détail, car cette industrie est trop
1. ,ilib.
Vue 395 sur 510

l’industrie A tktouan

récente dans la ville pour y avoir encore acquis le droit
de cité et pour s’y être implantée solidement. Les procédés
dont usent les ciseleurs-guillocheurs n’ont d’ailleurs rien
de particulier.

Nous ne parlerons également que pour mémoire des
nielleurs et damasquineurs sur fer et sur bois. Ce sont
des professions peu importantes, dont les procédés n’ont
rien de spécial. Les fabricants de fûts de fusil sont aussi,
en général, damasquineurs sur bois. Ils ont pour outils
de petits burins dont ils se servent pour faire la place des
fils, de petits marteaux pour les enfoncer et les mettre en
place pour matière première, des fils d’or ou d’argent
ronds, fabriqués par les Juifs bijoutiers de Tétouan. Avant
de les poser, ils aplatissent ces fils au marteau.
La damasquinerie s’applique aussi à d’autres objets que
les crosses de fusil, par exemple aux noix de bois noir qui
servent à renfermer le tabac à priser, etc.

Les horlogers (Mouâguenjiya) sont

1 Juif au Mellâh;\ Musulman à Soûq Elr’ezel; Musul-
man assez renommé au Neyyârîn (Si Mohammed Elr’o-
mâry2).

Ils réparent tant bien que mal les montres et horloges,
à des prix moyens. Rien de particulier à ajouter.
A. Joly.