Ibn Al-Athir, Kamil fi-Tarikh : Prémices et lancement de l’invasion franque, v. 1240

I : Montée en puissance des francs, vassalité au roi des romains, victoire des Turkmens, prise d’Antioche, défaite des Sâhib-s syro-mésopotamiens, massacre de Maarat, bataille de Jerusalem.

1085 : C’est à l’année 478 qu’il faut faire remonter l’apparition de la puissance des Francs, l’influence qu’ils exercèrent, leurs attaquent contre l’Islam et leurs invasions dans Ses pays […] ils s’emparèrent de la cité de Tolède et d’autres villes d’Andalûs. En l’année 483/1091, ils pénétrèrent […] dans l’île de Sicile et en firent la conquête, et, de là, ils passèrent en Ifriqîa et en subjuguèrent des parties, qui ne tardèrent pas à leur être reprises. Enfin, ainsi que tu vas le découvrir, ils se répandirent ailleurs.

L’an 490/1097 fut celle de la marche des Francs vers le Pays de Shâm ; ce qui donna lieu à cette expédition, c’est que le prince Bardwîl avait levé de nombreuses troupes dans l’intention de se joindre à Rujâr, qui avait fait la conquête de la Sicile, il avait envoyé ces mots à Rujâr : « Me voilà la tête d’une armée considérable de Francs, je me rends auprès de toi et de là, je passerai en Ifriqîa et t’aiderai à en faire la conquête ». A cette nouvelle, Rujâr assembla ses compagnons et leur demanda conseil. Tous répondirent : « Par l’évangile, ce projet est excellent pour nous et pour lui, ainsi tout le pays deviendra chrétien ! »Mais il leva le pied, et faisant un grand pet, déclara : Par ma Foi, voilà qui vaut mieux que tout ce que vous dites ! » Comment-cela ? répondirent-ils ; il reprit : « Lorsque cette armée sera arrivée, j’aurais à fournir une flotte nombreuse et foule d’autres choses pour la faire passer en Ifriqîa, elle, et mes propres troupes, si nous conquérons ce pays, il sera à eux, sans compter qu’il faudrait alors leur fournir des vivres de Sicile, et je serai privé de mon Bien annuel, s’ils sont vaincus, ils reviendront en Sicile et j’aurais alors à souffrir leur présence. Ajoutez à cela que Tamîm (Ibn Zîrî) sera en droit de me rappeler ma parole et ma mauvaise foi à son égard, en interrompant notre amitié et les liens qui existaient entre nos deux pays. D’ailleurs, l’Ifrîqîa est toujours à notre convenance, et lorsque nous serons assez fort, nous en ferons la conquête » Sur ce, Rujâr fit venir le délégué de Bardwîl et lui dit : « Si vous voulez vous lancer en Jihâd contre les Musulmans, allez donc à Bayt-al-Maqdis pour la leur arracher des mains ! » Cette conquête serait pour vous une source de gloire, quant à l’Afrique, il existe entre ce pays et moi des serments et des promesses ».

Voilà comment les Francs prirent al direction du pays de Shâm ; mais d’autres assurent que ce furent les Gens d’Egypte, de la Maison de ‘Alî, qui appelèrent les Francs, à la vue de l’ascendant du clan des Saljûq, jour après jour, dans sa conquête du Shâm, jusqu’à Ghaza, de sorte que plus un seul obstacle ne pouvait interdire à Al-Afsîs l’entrée de Miçr, ils en auraient conçus des craintes et envoyèrent des diplomates aux Francs pour les amener à prendre le Shâm et à se placer ainsi entre eux et leurs ennemis.

[…] A leur arrivée à Constantinople, le Roi des Romains leur refusa le passage : « Je en vous permettrai de vous rendre dans les Pays d’islâm que si vous me jurez de me remettre en mains la cité d’Antioche ! » Le Roi cherchait à exciter les Francs contre les Musulmans et espérait que les Turks n’en laisserait pas un en vie, tant il avait remarqué en eux ardeur et bravoure […] Qilij Arslan vint en effet à leur rencontre avec toutes ses troupes et les mit en fuite […]d’où ils arrivèrent devant Antioche. Quand Bâghî-Syân découvrit les envahisseur, il craignit les Chrétiens de la cité, un jour, il fit sortir les Musulmans des murs pour nettoyer les douves, le lendemain, ce furent les chrétiens, mais le soir […] il les arrêta : « Antioche vous a jadis appartenu, laissez-la moi jusqu’à ce que nous voyions l’issue de la lutte ouverte entre Moi et les Francs ! ». Sur ce, les chrétiens s’enquirent de leurs enfants et de leurs femmes, Bâghî Syân répondit qu’il s’en chargerait et les Chrétiens se rendirent auprès des Francs. […] B-S n’oublia pas de pouvoir aux besoins des familles chrétiennes et arrêta les mains de ceux qui étaient tentés de leur faire du tort ; mais à la fin, les Francs se mirent d’intelligence avec le commandant d’une des tours, un fabricant de cuirasses nommé Rûzia […]Les Francs, pendant le siège d’Antioche, avaient écrit au Sâhib de Dimashq, pour lui dire qu’il pouvait se rassurer, qu’eux n’en voulaient qu’aux pays qui avaient appartenu aux Romains, et qu’ils respecteraient tout el reste ; c’était une ruse de leur part afin de dissuader les musulmans de secourir Antioche. Quand Quwâm Ad-Dawla Karbûqâ fut instruit de l’invasion des Francs sur Antioche, il rassembla en effet ses troupes et s’avançant vers le Shâm, il dressa sa tente à Marj Dâbiq, et tous les Soldats du Shâm vinrent à lui, Nuzul comme Arabes, sauf ceux de Halab, et se rassemblèrent Daqâq b. Tutush et Tughtakîn l’Ata-Beg, et Jinnâh ad-Dawla, Sâhib de Himç et Arslân-Tâsh, Sâhib de Sinjâr […] quant les Francs en eurent vent, ils furent terrorisés et se trouvaient en grande faiblesse et en manque de vivres. Les Musulmans s’avancèrent vers Antioche et commencèrent le siège, mais Karbûqâ se mit à méconduire ses vassaux, prenant un ton fier envers les autres Commandeurs, persuadé qu’il parviendrait à els soumettre, mais les Commandeurs s’en irritèrent vivrement et dissimulèrent leur mécontentement, attendant, pour le manifester, le jour de la bataille, et de l’abandonner devant l’ennemi. 13 jours s’étaient écoulés depuis que les Francs étaient entré dans Antioche, et ils n’avaient plus de quoi manger, les riches abattaient leurs bêtes de somme, les pauvres se nourrissaient de cadavres et de feuilles d’arbres. Dans cette situation, ils demandèrent le Sauf-Conduit à Karbûqâ pour évacuer, mais il les refoula : « Vous ne sortirez qu’à la pointe de l’épée ! »

Il y avait parmi les Rois Bardwîl, et Can-Jîl (Raymond de St-Gilles) et Kundfruy et Al-Qamuç (Comes), Sâhib d’Ar-Ruhâ et Buymund Sâhib d’Antioche, le premier des Soldats et le plus le plus Obéi d’entre eux, il avait la Ruse des hommes. Il dit leur déclara que « La lance qui frappa le Christ fut enterré dans al-Qasbân d’Antioche, c’est un édifice majestueux, si vous la trouvez, vous vaincrez, sinon, cous périrez sans recours ! »

[découverte de la lance, défaite de Karbûqâ…]

Les Francs restèrent maîtres des approvisionnements de l’armée en vivre, argent, outils, bêtes et armes, ils ne manquaient plus de rien, et leur courage rebondit […] Puis les Francs se portèrent devant Ma‘arat al-Nu‘mân qu’ils assiégèrent […] les francs élevèrent une tour de bois face aux murs de la cité, les citoyens livrèrent un combat terrible, et se retirèrent sans dommages, mais la nuit venue […] la terreur s’empara d’eux, ils s’imaginèrent qu’en se retranchant dans quelques grandes demeures, ils opposeraient une résistance plus efficace. Ils descendirent donc du haut du rempart […] et les Francs entrèrent aussitôt, il se fit massacre pendant 3 jours, des myriades furent tués, et un grand nombre capturés. Les Francs y restèrent 40 jours avant de se diriger vers Ghazna (Arca).

[…]

La même année, le Lieutenant envoya un émissaire au Sultân Bark-Yâruq pour l’informer de la présence des Francs, lui présenter la gravité des faits et le sommer d’y porter remède avant qu’ils n’accroissent leur puissance. [prise de Jerusalem aux Fatimides qui l’avaient enlevés] Les Francs massacrèrent plus de 7 myriades dans le Masjid al-Aqsâ, parmi eux on remarquait un grand nombre d’Imâms des Musulmans, et de leurs Savants, de leurs Serviteurs et de personnes de vie pieuse te mortifiée, qui avaient quittés leur patrire pour venir prier en ce noble lieu. Les Francs prirent dans la Qubbat du Rocher plus de 40 lampes d’argent de 3600 drachmes chacunes, ils prirent aussi un Tannûr d’argent de 40 Ratl syriens, ainsi que 150 autres lampes : leur butin était immense.