Pomponius Mela d’Ispalis : Description des colonnes d’Hercule, v. 45 n-è

L’océan Atlantique baigne, comme je l’ai dit, les côtes occidentales de la terre. Si de cet océan on veut pénétrer dans notre mer, on rencontre l’Hispanie à gauche, et la Mauritanie à droite: par l’une commence l’Europe, et par l’autre l’Afrique. La côte de la Mauritanie s’étend jusqu’au Mulucha, depuis tin promontoire que les Grecs appellent Ampélusie, nom différent de celui que lui donnent les Africains, quoiqu’ils aient tous deux la même signification. Ce promontoire renferme un antre consacré à Hercule, au delà duquel est Tingé, ville très ancienne, et bâtie, dit-on, par Antée. On rapporte comme une preuve de cette origine, l’existence d’un bouclier fait de cuir d’éléphant, et d’une telle grandeur qu’il ne pourrait aujourd’hui convenir à personne. Les habitants du pays tiennent et donnent pour certain qu’il fut porté par ce géant, ce qui le rend pour eux l’objet d’une vénération toute particulière.
On dit qu’Antée a régné sur la côte de l’Afrique qui se termine en pointe. On donne comme preuve de cette légende une colline, de faible hauteur, qui ressemble à un homme couché et qui est, disent les habitants, son tombeau.
Plus loin est une très haute montagne, qui fait face à celle qui s’élève sur la côte opposée de l’Hispanie: l’une se nomme Abyla, l’autre Calpé, et toutes deux ensemble les colonnes d’Hercule. La fable ajoute qu’autrefois ces deux montagnes n’en faisaient qu’une, qui fut divisée par Hercule; et qu’ainsi l’Océan, jusqu’alors arrêté par cette barrière, trouva un passage pour se répandre dans les lieux qu’il inonde aujourd’hui. A partir de ce point, la mer s’élargit et se déploie avec une grande impétuosité entre deux rives lointaines.