Cette mer commence par un bras qui se détache de l’Océan, et dont la partie la plus étroite est située entre la côte de Tanger et de Ceuta, dans le Maghreb, et la côte d’Espagne. Cet endroit, connu sous le nom de Sîta (?), n’a qu’une largeur d’environ 10 milles, qu’il faut traverser pour aller du Maghreb en Espagne et d’Espagne au Maghreb.
On le nomme az-Zuqâq « le détroit ». Dans la suite de cet ouvrage (quand nous traiterons de l’Egypte) nous parlerons du pont qui reliait les deux côtes d’Europe et d’Afrique, et nous dirons comment il fut submergé.
Nous ferons aussi mention du passage qui existe entre l’île de Chypre et le territoire d’el-Arich, et qui était fréquenté par les caravanes. ( ?)
Au point de jonction de la mer des Rûm et de l’Océan se trouvent les phares de cuivre et de pierre bâtis par Hercule le héros ; ils sont couverts de caractères et surmontés de statues qui semblent dire du geste :
« Il n’y a ni route ni voie derrière nous, pour ceux qui, de la mer des Rûm, voudraient entrer dans l’Océan. »
En effet, aucun navire ne le parcourt ; on n’y trouve pas de terre cultivée et habitée par des êtres raisonnables ; on n’en connaît ni l’étendue ni la fin ; on ignore le but où elle conduit, et on la nomme mer des Ténèbres, mer Verte ou mer Environnante.
On a soutenu que ces phares ne s’élevaient pas sur ce détroit, mais sur des îles de la mer Environnante situées près de la côte. C’est une opinion assez généralement répandue, que cette mer est la source de toutes les autres mers.
On en raconte des choses merveilleuses, que nous avons rapportées dans notre ouvrage intitulé, les Annales historiques, en parlant de ce qu’ont vu les hommes qui y ont pénétré au risque de leur vie, et dont les uns sont revenus sains et saufs, tandis que les autres ont péri.
Ainsi un habitant de l’Espagne nommé Khach-Khach, et natif de Cordoue, réunit une troupe de jeunes gens, ses compatriotes, et voyagea avec eux sur l’Océan dans des embarcations qu’il avait équipées. Après une absence assez longue, ils revinrent tous chargés de butin. Au surplus cette histoire est connue de tous les Hispaniens.
Entre l’endroit où ce phare est établi et le point où commencent les deux mers, la distance est longue, tant qu’on reste dans ce détroit et qu’on est sous l’influence de son courant, parce que l’eau qui passe de l’Océan à la mer des Rûm a un courant