M. Calderon s’est attaché principalement à indiquer les causes qui ont entraîné, au Maroc, la ruine de la société musulmane ; c’est là aussi notre but,mais c’est surtout la ruine ou plutôt les ruines que nous voulons décrire ; on verra clairement l’impuissance où se trouve, au Maroc, la société musulmane de se relever elle-même et de se reconstituer. Le tableau douloureux que nous allons tracer ne renfermera point un seul fait dont nous ne puissions prouver la rigoureuse exactitude, non pas seulement par les témoignages de M. Calderon et de l’auteur des Costumbres de Marruecos mais par ceux de plusieurs condamnés politiques, officiers, généraux, membres des cortès, déportés en 1823 aux présides de Ceuta, de Melilla, du Peñon de la Gomera et d’Alhucemas, dont nous avons recueilli les observations et les souvenirs. Après bien des jours d’une rude captivité, quelques-uns parvinrent à tromper la surveillance de leurs gardiens, ils se réfugièrent à Tétuan, où ils attendirent la mort du roi Ferdinand C’est à l’un d’eux, à un ancien député de Navarre, que nous devons un manuscrit auquel nous emprunterons de curieux détails sur les coutumes des Maures et des Juifs. Aux termes des vieux traités existant entre l’Espagne et le Maroc, le ministre Calomarde réclama l’extradition des proscrits. L’empereur Abderrahman éluda les sollicitations du cabinet de Madrid, et, à ce sujet, il faut le dire, les réfugiés espagnols ne furent pas un seul instant inquiétés.